Les combattants de l'organisation terroriste autoproclamée Etat islamique auraient brûlé 2000 livres, manuscrits, des œuvres antiques et des vieux journaux détruits et incendiés, en envahissant la Bibliothèque centrale de Mossoul et le Musée. Cette information, sur ce qui pourrait être qualifié de plus grand atteinte à la mémoire collective et aux biens immatériels de la culture arabo-musulmane, a été livrée par certains médias, dont Al Arab TV et Associated Press, le 1er février. Selon ces sources, courant janvier, des combattants de Daech auraient pris possession de la Bibliothèque centrale, d'où ils ont emporté avec eux dans six pick-ups plus de 2000 livres pour les détruire. Etaient concernés les livres pour enfants, de poésie, de philosophie, de santé, de sport et de sciences, ainsi que les journaux datant du début du XXe siècle, des cartes ottomanes et des collections privées offertes par les vieilles familles de Mossoul. Seuls les livres traitant de l'islam auraient été épargnés. Un homme en tenue afghane aurait harangué la foule : "Ces livres appellent à la désobéissance à Dieu, ils doivent être brûlés", a-t-on relaté. Les assaillants auraient ensuite mis le feu aux documents devant les étudiants. Ils ont ainsi "assaini" les archives d'une bibliothèque sunnite, celle de l'Eglise latine et le monastère des dominicains. Ces nouveaux Mongols s'en sont ensuite pris à la bibliothèque du Musée de Mossoul et ont détruit des œuvres datant de 5000 ans avant Jésus Christ. Les bibliothèques de Mossoul avaient déjà subi deux pillages : en 2003 avec la chute de Saddam Hussein et en juin 2014 lorsque les terroristes ont pris le contrôle de la ville. De nombreux manuscrits ont été exportés clandestinement. Autant de crimes contre des biens qui appartiennent à toute l'humanité, ne sont pas sans nous interpeller sur la similitude avec ce qui eut lieu, à Bagdad en 1258, lorsque Hulagu Khan, petit-fils de Gengis Khan, a en prenant le contrôle de la capitale des Abbassides, jeté des milliers d'ouvrages, dans le tigre et l'Euphrate, jusqu'à construire un pont reliant les deux rives. À telle enseigne que la légende veut que les eaux du Tigre soient devenues noires de l'encre des dizaines de milliers d'ouvrages jetés dans le fleuve par les barbares. Bagdad abritait en effet la bibliothèque la plus richement dotée au monde, Bayt al-Hikma, mais aussi, dans chaque quartier, des bibliothèques publiques plus modestes, ainsi qu'un nombre impressionnant d'écoles, d'universités, de mosquées, d'hôpitaux... Ils disparaîtront sous les flammes, de même que sera saccagé le réseau sophistiqué de canaux qui faisait la prospérité de l'arrière-pays et, partant de la cité de Bagdad. Les historiographes arabes parlent aussi, de pas moins de 24 000 savants tués. Plus proches de nous encore, les groupes islamistes armés au Mali ont détruit des manuscrits tout autant millénaires, alors que, les talibans ont détruit des statues plusieurs fois millénaires. Ce qui nous renseigne, non seulement sur les desseins de ces "Hulagu" des temps modernes, dressés pour détruire l'histoire immatérielle du monde arabo-musulman, et sa déculturation. Daech "perçoit la culture, la civilisation et la science comme des ennemis féroces", dira, dans ce sens, le député irakien Hakim Al Zamili. A R.