Depuis l'avènement du professionnalisme dans le football algérien en 2011, les clubs dits professionnels au nombre de 32 (Ligues 1 et 2) n'ont jamais réussi à atteindre l'objectif tracé par cette politique prônée par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, à savoir l'autofinancement. Du reste, quelques mois après le lancement du plan de professionnalisation des clubs de football, les présidents de club se sont ligués contre les pouvoirs publics pour réclamer le maintien des subventions de l'Etat et des collectivités locales pour une durée déterminée afin leur permette de financer leurs besoins immédiats et tenter de parvenir progressivement à un équilibre de leurs budgets. Une doléance satisfaite illico presto et avalisée par le Conseil du gouvernement en avril 2011 à travers l'octroi d'une subvention étatique annuelle de 2,5 milliards de centimes à chaque club professionnel à titre de fonds de roulement. À cela s'ajoutent bien sûr les différentes aides que reçoivent les clubs des collectivités locales, wilaya et APC. Cependant, six ans après, la décision de l'ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, Hachemi Djiar, de répondre favorablement à la réclamation des présidents de club qui avaient menacé de boycotter les championnats des Ligues 1 et 2, les clubs continuent de patauger en pleine crise financière : 100% des équipes sont toujours largement déficitaires, à commencer par les grosses cylindrées, en l'occurrence le MCA, soutenu par Sonatrach, et l'USMA, propriété du groupe ETRHB. Pourtant, l'ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, Mohamed Tahmi, avait averti que cette assistance financière des pouvoirs publics cessera en 2018. "À partir de 2018, chaque club est appelé à fonctionner selon ses moyens et ressources. L'Etat continuera à accompagner le football professionnel mais pas pour longtemps", avait déclaré Tahmi en février 2015. À un an de la date butoir fixée par les pouvoirs publics, les finances des clubs sont toujours catastrophiques. En 2018, la situation ne sera guère meilleure, d'où certainement un nouveau prolongement du délai. Cependant, l'Etat avait fixé en 2011 les modalités d'octroi de ces subventions et surtout les chapitres de leur utilisation. Tout cela est codifié dans le décret exécutif n°14-368 du 15 décembre 2014 fixant les conditions et les modalités de l'octroi de l'aide et de la contribution de l'Etat et des collectivités locales au club sportif professionnel. Le décret n°14-368 de Sellal piétiné "L'aide et la contribution consenties par l'Etat et les collectivités locales visent à prendre en charge les missions incombant au club professionnel dans les domaines suivants : la participation du club sportif professionnel aux compétitions officielles internationales, reconnues par la fédération sportive nationale d'affiliation, la formation et le perfectionnement des jeunes talents sportifs ainsi que leur insertion scolaire ou professionnelle, la création de centres de formation des jeunes talents sportifs, à l'organisation et la participation aux stages de préparation et de regroupement des sportifs, à la détection, la prospection et l'orientation des jeunes talents sportifs, à la contribution et la promotion du fair-play, à la protection et au suivi médical des sportifs, à la participation aux actions de dépistage, de prévention et de lutte contre le dopage, à la participation et la prévention et la lutte contre la violence sous toutes ses formes dans les infrastructures sportives", explique le décret en question. Et d'ajouter : "Les formes de l'aide de la contribution de l'Etat et des collectivités locales peuvent prendre notamment les formes suivantes : les contributions d'équipement et de fonctionnement, les apports en matériels à travers l'attribution ou l'achat de matériel couvrant notamment les besoins de transport, des équipements sportifs et techniques exprimés par le club sportif professionnel concerné, la mise à disposition temporaire d'infrastructures sportives sur des bases conventionnelles, la réalisation d'infrastructures sportives pour leur exploitation par le club sportif professionnel, à l'octroi prioritaire de créneaux horaires pour l'utilisation des infrastructures sportives, la rémunération et/ou mise à disposition d'entraîneurs sur des bases conventionnelles dans le cadre des lois et règlements en vigueur, la mise en niveau des infrastructures sportives, l'achat de titres d'accès aux installations sportives, l'accès au foncier, l'achat d'espaces publicitaires lors des manifestations sportives, les prêts bancaires conformément aux lois et règlements en vigueur, l'hébergement des équipes des jeunes catégories, la prise en charge totale ou partielle des frais d'assurance liée à l'exploitation des infrastructures sportives publiques, la prise en charge des frais de déplacement des équipes et de leurs encadrements technique et administratif par voies aérienne ou terrestre à l'occasion de manifestations et compétitions sportives à l'intérieur du pays et à l'étranger dont les modalités et conditions d'application sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé des sports et du ministre chargé des finances." En outre, "le club sportif professionnel peut bénéficier du financement des travaux d'aménagement, de réhabilitation et de mise à niveau des infrastructures sportives relevant de l'Etat et des collectivités locales lorsqu'elles lui sont concédées". À aucun moment le décret n'évoque la possibilité pour les clubs de payer les salaires des joueurs avec cet argent des pouvoirs publics. Or la majorité des clubs a détourné cet argent provenant soit de l'Etat (2,5 milliards de centimes pour chaque club) soit des collectivités locales pour payer des salaires des joueurs ou des entraîneurs sous les yeux de l'administration centrale (MJS) ou des walis qui ne se soucient guère de l'utilisation de cette manne. Les présidents de club font ce qu'ils veulent de ces aides faramineuses pour remplir les poches des joueurs, notamment parfois même de leurs poches. Ils remboursent aussi avec cet argent de l'Etat des dettes contractées chez des privés. Des dettes parfois douteuses. L'arrivée d'un nouveau Premier ministre, en la personne de Abdelmadjid Tebboune, permettra-t-elle d'amener le MJS et les collectivités locales à accomplir rigoureusement leur mission de contrôle, loin de tous calculs politiciens ? Attendons pour voir. SAMIR LAMARI