L'épargne des ménages, captée par les banques, est estimée à 2 000 milliards de dinars (environ 18 milliards de dollars). Le problème est qu'autant d'argent (près de 18 milliards de dollars) sommeille dans les foyers. Le président-directeur général de la Cnep-Banque, Rachid Metref, semble n'avoir pas peur des mots et de dire les choses comme elles sont : l'épargne fait du surplace. Présent à une conférence sur l'épargne, organisée hier par l'Association des banques et les établissements financiers (Abef) au Centre international des conférences (CIC), Club-des-Pins, à Alger, il a, en effet, déclaré qu'il est particulièrement inquiétant de constater que l'épargne a tendance à perdre de l'élan et à stagner. "On assiste, a-t-il assené, à un mouvement de désépargne. Et la preuve est dans les chiffres." Il estime à 2 000 milliards de dinars (environ 18 milliards de dollars) l'épargne des ménages captée par les banques, alors que les ménages thésaurisent encore d'importantes sommes chez eux (près de 18 milliards de dollars). Autre fait inquiétant : le montant moyen du placement effectué par l'épargnant au niveau de la Cnep-Banque, une institution qui draine entre 50 et 60% de l'épargne, se situe autour de 200 000 DA, selon les termes de Rachid Metref. À la Cnep, un produit d'épargne avait été conçu depuis plusieurs années afin d'aider les gens à acquérir un logement. Et les citoyens s'y intéressaient. Cela commence, cependant, à changer, a-t-il affirmé. Autre signe associé à la désépargne : il y a des employés, et ils sont nombreux ceux qui, à chaque fin de mois, retirent la totalité de leur salaire, fait observer, pour sa part, Mohammed Krim, président-directeur général de la BDL, présent également à la rencontre citée plus haut. Le Pr Nemiri-Yaïci Farida, universitaire, a évoqué, pour sa part, les déterminants de l'épargne des ménages algériens. Elle a rappelé que les économistes considèrent que le revenu est le principal déterminant de l'épargne des ménages. Elle a cité Keynes qui a conclu à une relation positive entre l'épargne et le revenu courant. Le Pr Nemiri-Yaïci Farida a expliqué que le revenu disponible brut des ménages algériens influence positivement leur épargne à long terme. De façon plus intelligible, a-t-elle poursuivi, nous sommes enclins de penser qu'en dépit de la relation de long terme relevée, l'effet du revenu sur l'épargne n'est réellement perceptible en Algérie qu'à partir des années 2000. L'universitaire a mis en relief la relation entre consommation et comportement d'épargne. Généralement, a-t-elle noté, il est établi que la consommation est proportionnelle à la richesse, elle-même dépendante du revenu permanent. Il devient donc normal que les deux variables en question présentent, selon elle, une corrélation négative. Et d'ajouter : "Les effets du taux d'intérêt et du taux d'inflation sont difficilement interprétables, surtout dans le contexte algérien, avec un système collectif de protection sociale en vigueur. Celui-ci pèse sur l'épargne financière." Le Pr Nemiri-Yaïci Farida s'est attardée sur la faiblesse de l'épargne financière, soulignant que celle-ci n'est pas suffisamment mobilisée et que l'épargne bancaire quitte les banques pour aller vers la monnaie fiduciaire et les marchés informels. Elle explique, par ailleurs, que l'impact positif du revenu sur l'épargne est un résultat intuitif, mais soutenu par la théorie et les recherches empiriques antérieures. Elle a ajouté que la consommation et le taux d'inflation ont un impact négatif sur l'épargne. Quant au taux d'intérêt et au taux d'emploi, ils n'ont aucun effet significatif sur l'épargne des ménages, a-t-elle conclu. Mais, comment faut-il procéder pour inciter leurs ménages à déposer sur un compte les liquidités qu'ils gardent chez eux ? Il est question, dans le cadre de la mise en place d'un observatoire national de l'épargne, d'instaurer un fonds de placement appelé à garantir les rendements des placements des épargnants. Youcef Salami