Le Premier ministre tunisien Habib Jemli, désigné par le parti d'inspiration islamiste Ennahdha, a présenté jeudi son gouvernement composé de personnalités indépendantes après un mois et demi de tractations difficiles et l'échec des négociations avec les partis politiques. M. Jemli, ex-secrétaire d'Etat, a choisi des personnalités indépendantes. Plusieurs membres du gouvernement, qui doit être approuvé par le Parlement en début de semaine, ne sont pas connus du grand public. Le cabinet est composé de 28 ministres dont quatre femmes, et de 15 secrétaires d'Etat. "Je suis confiant que ce gouvernement sera approuvé par le Parlement", a déclaré M. Jemli à la presse. Ce dernier avait annoncé à plusieurs reprises avoir finalisé sa liste, mais celle-ci n'a été finalement signée par le président Kais Saied que ce jeudi. La jeune démocratie tunisienne a connu il y a quelques mois des élections législatives et présidentielle qui ont vu un grand renouvellement du Parlement et l'arrivée à la tête de l'Etat de M. Saied, sans parti. Avec seulement un quart des sièges, le parti Ennahdha est cependant le premier groupe de l'Assemblée, et son chef historique, Rached Ghannouchi, a été élu président de cette instance. Pour former un gouvernement, M. Jemli avait consulté partis, syndicats et personnalités nationales sans parvenir à rallier des partis à une coalition gouvernementale. Après l'échec des discussions, il avait annoncé le 23 décembre sa décision de former un gouvernement "d'indépendants" en raison des "tiraillements" entre partis dont certains ont imposé, selon lui, des "conditions énormes" pour participer au gouvernement. Deux importants partis, les sociaux-démocrates d'Attayar (22 sièges) et les nationalistes d'Al-Chaâb (15 sièges), ont renoncé à rejoindre le gouvernement, indiquant ne pas avoir obtenu les ministères-clés qu'ils demandaient, dont la Justice et l'Intérieur. D'autres partis ont dit craindre d'être associés à Ennahdha, qui a déjà été directement ou indirectement au pouvoir ces dernières années sans parvenir à faire décoller l'économie, ni répondre aux attentes sociales attisées par la révolution de 2011. Le bureau du Parlement se réunira demain pour fixer la date de la plénière destinée au vote de confiance, selon un communiqué. D'après la Constitution, si la confiance du Parlement n'est pas accordée, le président "engage des consultations dans un délai de dix jours avec les partis et les groupes parlementaires, en vue de charger la personnalité jugée la plus apte de former un gouvernement dans un délai maximum d'un mois". Le retard dans l'entrée en fonction d'un gouvernement risque de repousser davantage les réformes indispensables à la relance de l'économie nationale. La sécurité des frontières va être au cœur des préoccupations, notamment à l'aune des développements inquiétants en Libye, avec la quasi-certitude de l'intervention de l'armée turque pour soutenir officiellement le Gouvernement d'union nationale (GNA).