Tunis, Mohamed Kettou Mercredi, 1er janvier, les Tunisiens se sont réveillés, après une nuit de farniente, avec les déceptions accumulées durant toute l'année 2019. Ils espéraient vivre le réveillon avec, au moins, l'assurance d'avoir un gouvernement qui leur assurerait la stabilité politique du pays. En vain. Désigné le 15 novembre par le Président Kaïs Saïed pour former le nouveau gouvernement sur proposition du parti Ennahdha, Habib Jemli a pris plus que son temps pour y parvenir. Le délai d'un mois que lui accorde la Constitution a été largement dépassé privant, du coup, Habib Jemli d'une deuxième chance. Depuis sa désignation, il a effectué un marathon de consultations avec les partis susceptibles d'être représentés au gouvernement ou des personnalités indépendantes dont le CV devait répondre aux exigences de la période actuelle, marquée par une crise politique, économique et sociale sans précédent. A qui incombe la responsabilité de ce blocage ? La réponse diffère selon qu'on est «nahdhaoui» ou appartenant aux autres partis sollicités pour faire partie du gouvernement. Le parti islamiste, majoritaire au Parlement, estime avoir concédé un grand terrain à des adversaires qui seraient, un jour, des alliés au gouvernement. Quant aux autres, en particulier, Ettayar al Dimocrati (le Courant démocratique), ils ont placé la barre très haut, en revendiquant des portefeuilles de souveraineté. D'où le recours du chef du gouvernement désigné à des négociations interminables, qui ont toutes échoué. Pire encore, ce parti est allé jusqu'à accuser Rached Ghannouchi d'avoir demandé des garanties pour lui confier le ministère de l'Intérieur, ajoutant que Habib Jemli reçoit des instructions venant du parti islamiste. Une telle attitude reflète, si besoin est, la profonde crise politique qui secoue le pays et qui n'est que l'émanation de la guerre larvée, opposant Ennahdha aux autres partis politiques. Et comme cela ne suffisait pas, le parti d'Ennahdha voit son corps se lézarder, de l'aveu de certains de ses propres cadres, en rébellion contre leur chef Ghannouchi. Aujourd'hui que la naissance de ce gouvernement semble attendre une «césarienne», le Parlement se prépare à l'accueillir pour une séance au cours de laquelle il lui accordera ou lui refusera sa confiance. Cette réunion ne se tiendra pas, au mieux, avant samedi ou lundi prochain si, bien entendu, Habib Jemli arrête la liste de ses ministres dans les 48 heures qui viennent. M. K.