Dix ans après la chute de Mouammar El-Kadhafi, la Libye reste prisonnière des milices armées et des mercenaires étrangers qui empêchent l'avancée de tout processus politique. Pour baliser le terrain à l'aboutissement d'un processus politique qui commencera par la tenue de l'élection présidentielle libyenne en décembre prochain, l'Algérie accueille, depuis hier, une réunion des ministres des Affaires étrangères des pays voisins de la Libye. Le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a tenu à associer à cette rencontre tous les pays qui partagent des frontières avec ce pays, à l'instar de la Tunisie, de l'Egypte, du Tchad, du Niger et du Soudan auxquels se sont joints l'envoyé des Nations unies pour la Libye et les délégués de l'Union africaine. Pour éviter un nouveau cycle de violences, le ministre algérien des Affaires étrangères a donné le ton dès l'ouverture des travaux de la rencontre, hier peu après la mi-journée. Il a lié l'avancée du processus politique au départ "dans les plus brefs délais" des mercenaires étrangers, dont le nombre est estimé par les Nations unies à près de 20 000 personnes. Pour Ramtane Lamamra, le processus de réconciliation en Libye "nécessite la poursuite des efforts pour le parachèvement de l'unification des institutions de l'Etat libyen, la réalisation de la réconciliation et le départ des mercenaires et des forces étrangères de tout le territoire libyen". "Une Libye stable et forte constituera sans nul doute le pilier de la sécurité et de l'intégration économique régionales", a ajouté le ministre algérien qui accusera certaines puissances, qu'il n'a pas nommées, de chercher à "accroître leur influence en Libye et faire de ce pays une plateforme pour redessiner les équilibres internationaux, au détriment des intérêts stratégiques de la Libye et de ses voisins". Il ajoutera que "les pays voisins de la Libye sont plus concernés que d'autres par les répercussions directes de la situation tumultueuse dans ce pays voisin et frère". Cette inquiétude que partage la ministre libyenne des Affaires étrangères qui estime que "si les institutions civiles ont été réunies" sous la houlette du gouvernement d'union nationale, il reste aux Libyens d'unifier "les forces armées". Car en plus de ce qui est appelé "l'armée nationale libyenne" que dirige Khalifa Haftar, un ancien officier d'El-Kadhafi proche de l'Egypte et des Emirats arabes unis, des milices armées opèrent un peu partout dans le pays. Cela complique la constitution d'une armée nationale. Najwa Al-Mangouche épingle, elle aussi, la présence de puissances étrangères sur le territoire de son pays. "La chose la plus grave est l'ingérence destructrice de certains pays, qui sont contraires aux us internationaux et qui œuvrent à créer des différends et à attiser des tensions", a-t-elle fustigé. Malgré cette situation complexe, la communauté internationale presse les responsables libyens à organiser des élections générales d'ici au 24 décembre prochain. "Le gouvernement (libyen) a pris les dispositions nécessaires pour la tenue des élections, mais nous avons besoin d'un cadre juridique. Les députés sont actuellement en train de finaliser la loi électorale et il nous reste encore très peu de temps", a déclaré l'envoyé spécial des Nations unies pour la Libye, Jan Kubis. "Je les ai invités à prendre leurs responsabilités et à ne pas perdre de temps", a-t-il ajouté. Il a rappelé que "le gouvernement d'unité nationale a dégagé le budget nécessaire à la tenue des élections, mais il est important qu'il y ait un cadre juridique le plus tôt possible". Cette exigence de départ des mercenaires étrangers a été le leitmotiv de tous les intervenants lors de la cérémonie d'ouverture qui s'est déroulée, hier matin, au Centre international des conférences, à Alger. Le secrétaire général de la Ligue arabe et le commissaire à la sécurité de l'Union africaine ont insisté sur cet aspect des choses. Tous se sont appesantis sur la nécessité d'enclencher au plus vite le processus politique actuellement dans l'impasse. Mais tous reconnaissent que cette élection n'est pas la panacée. La ministre libyenne des Affaires étrangères a même énuméré les axes du programme qui peut permettre une sortie de la crise de son pays. Outre le départ des "forces étrangères", elle a insisté sur l'arrêt de l'envoi des armes dans son pays, l'aide au développement des pays du Sahel pour limiter les flux migratoires et enfin un plan de développement économique de son pays. Des solutions qui ne sont pas forcément entre seulement les mains des Libyens. Ni des pays du voisinage puisque les pays qui aident les mercenaires étaient absents de cette réunion.