Il y a un an, le président Barack Obama avait saisi l'occasion lors de son allocution devant l'assemblée générale de ONU pour déclarer qu'il espérait accueillir la Palestine dans les rangs des pays membres avant le commencement de la nouvelle session. Son vœu n'ayant pas été exaucé à cause notamment de l'hostilité et de l'intransigeance du gouvernement israélien, que s'est-il passé depuis pour qu'il change, ainsi, d'avis ? Le président des Etats-Unis estime aujourd'hui, contre tout bon sens (et surtout contre la volonté de la communauté internationale), que la question palestinienne ne doit plus faire l'objet de discussions à l'ONU. Pis encore, l'option d'une demande d'adhésion est catégoriquement rejetée à présent par les Etats-Unis qui vont probablement y opposer au Conseil de sécurité leur veto. Pourtant, aux yeux de tous, un tel débat coule de source dès lors que c'est justement l'ancienne Société des nations qui avait consacré en 1947 le principe de la naissance de deux Etats. D'ailleurs, la résolution 181 relative à la partition de la Palestine en deux Etats a été exploitée depuis longtemps pour la création de l'Etat d'Israël. Soixante-trois ans plus tard, on dénie aux Palestiniens de bénéficier du même droit. En annonçant qu'il allait à New York pour demander l'adhésion «à part entière» de la Palestine devant le Conseil de sécurité de l'ONU, le président palestinien Mahmoud Abbas a adressé pour sa part une fin de non-recevoir aux conseils des émissaires américains, de l'Union européenne et du Quartette sur le Proche-Orient (Etats-Unis, Russie, UE, ONU) qui se sont succédé pour le dissuader, sans aucune explication plausible, d'emprunter cette voie. Membre du groupe de sages des «Elders» (Anciens) qui rassemble douze personnalités politiques œuvrant pour la paix et la défense des droits de l'homme, dont plusieurs prix Nobel de la paix comme l'opposante birmane Aung San Suu Kyi, l'ex-président américain Jimmy Carter a plaidé hier dans une contribution au journal Le Monde pour la création d'un Etat palestinien. Il révélera que le groupe des Elders auquel il appartient, a adressé un courrier aux ministres des Affaires étrangères de tous les Etats membres de l'UE en les exhortant à adopter une position commune en faveur d'une résolution qui reconnaîtrait le droit légitime du peuple palestinien à posséder son Etat. «Nous leur rappelons à cette occasion qu'une telle initiative répondrait en réalité aux conclusions du Conseil européen de décembre 2009, qui se prononcent pour une solution fondée sur la coexistence de deux Etats, avec Israël et un Etat de Palestine indépendant, démocratique, d'un seul tenant et viable, coexistant dans la paix et la sécurité». Pour Jimmy Carter, si l'Union européenne adoptait une position positive et unie sur la résolution onusienne envisagée, cela lui conférerait un poids supplémentaire qui lui permettrait de jouer un rôle politique accru dans le processus de résolution du conflit. Mais rien n'est moins sûr. On parle de profondes divergences entre les Européens. L'Italie, la République tchèque, les Pays-Bas et la Pologne seraient hostiles à une demande d'adhésion palestinienne, selon des sources diplomatiques à Bruxelles. L'Allemagne pourrait aussi s'y opposer. La plupart des autres pays européens tendent à y être favorables, mais beaucoup redoutent que l'UE se déchire en public sur cette question. En France, la question fait débat. Il se trouve même des sénateurs PS qui ont demandé à Sarkozy d'user de son droit de veto pour empêcher la Palestine de devenir un Etat-membre de l'ONU. Face à cette confusion, une chose est néanmoins sûre. Il est à redouter sérieusement une grave détérioration de la situation sécuritaire mondiale à la suite d'un éventuel et énième déni de justice à l'égard des Palestiniens. Affaire à suivre.