La réhabilitation définitive de Tamazight, langue et culture, doit se faire dans les institutions de notre pays, loin des surenchères et de calculs politiciens, a indiqué, hier lundi, le président de l'Assemblée populaire de wilaya (APW) de Tizi Ouzou, Hocine Haroun. Des institutions, a-t-il fait observer, qui soient à même d'assurer l'irréversibilité de son statut, sa promotion, son évolution et sa modernisation afin d'en faire un instrument indispensable au quotidien du peuple, à même, a-t-il estimé, de reconstruire le consensus de novembre. Il s'exprimait, hier lundi, à l'ouverture des travaux de la session extraordinaire de cette Assemblée consacrée à «tamazight, langue et culture, bilan et perspectives». «Nous sommes convaincus que la production, l'occupation du terrain de la création, l'investissement dans tous les espaces possibles, les supports médiatiques, audio-visuels, ... dans les deux aspects matériels et immatériels, contribueront à asseoir une base solide et stable d'une constante de la nation maintenant consacrée», a-t-il dit. «Où en sommes-nous dans le parcours de réhabilitation de tamazight, langue et culture ? Que faisons-nous réellement pour sa promotion ? Qu'en est-il de la généralisation de la langue ? Peut-on mesurer le sérieux et la volonté de sa prise en charge ?», s'est-il interrogé, déplorant que «l'acculturation, l'aliénation identitaire soient imprimées dans les esprits et chevillées dans les pratiques» et qu'il est, admet-il, difficile de s'en départir. M Haroun a, à cet effet, fait référence à un fervent défenseur de la cause amazighe, l'universitaire Salem Chaker qui, s'exprimant au sujet de la question identitaire, tamazight, a reconnu que «l'Algérie qui a maintenu pendant plus d'un quart de siècle une position d'occultation ou d'exclusion explicite vis-à-vis de la langue berbère, adopte, désormais, une nouvelle approche et un discours différent : le berbère n'est plus un tabou et son évocation ne suscite plus l'anathème quasi automatique de naguère». Salem Chaker, a-t-il poursuivi, s'est, en outre, interrogé sur la possibilité d'un compromis historique amazighité et Etat-nation algérien. Ce compromis, dixit, Salem Chaker, est-il en train de se mettre en place ?» Abordant la constitutionnalisation de cette langue, une revendication qui sera certainement retenue et consignée dans la délibération, à l'issue des travaux, le P/APW de Tizi Ouzou, reprenant Hassen Hireche, un autre universitaire, a estimé qu'«il est temps que l'officialisation de tamazight soit intégrée dans la Constitution» d'autant que «la coexistence de deux ou plusieurs langues officielles est un fait consacré dans de nombreux pays et permettra à l'Algérie de se réconcilier avec elle-même et d'asseoir la démocratie.» Le secrétaire général du Haut commissariat à l'amazighité (HCA), Youcef Merahi, a, pour sa part, regretté que «l'enseignement de tamazight soit en perpétuelle régression à l'échelle nationale». «Dix-sept années après l'introduction de tamazight dans le système éducatif, le nombre de wilayas où cette langue est enseignée s'est, pour des raisons multiples, réduit à dix contre seize en 1996», a fait observer M. Merahi. Le secrétaire général du HCA a relevé que du point de vue des statistiques, l'évolution est, certes, palpable avec un effectif de 37 690 apprenants encadrés par 233 enseignants, en 1995 contre 234 690 pour 1 654 enseignants en 2013. Mais, déplore-t-il, cette évolution ne concerne que six wilayas seulement.