Chapeau de pêcheur et short de rigueur, l'allure estivale sur fond débonnaire, Abderrahmane Bekhti, peintre de talent nous invite jusqu'à la fin du mois pour découvrir quelques jeunes pinceaux d'ici et de quelques villes du centre et du sud. Au menu, une belle petite bibliothèque municipale à l'entrée de la ville, à l'intérieur une cours assez vaste, au milieu un bassin dans lequel s'amuse à se dissimuler sous nos yeux une jolie petite tortue aquatique. Les murs alentours sont magiquement transformés en cimaises accueillantes qui existent littéralement depuis l'année 2006 pour nous mener en voyage dans un univers baigné de couleurs et de graphismes dans une exposition collective emmenée par le plasticien Abderrhamane Bekhti, animateur de cette joyeuse bande de jeunes et de moins jeunes pinceaux. Dessin au crayon, à la plume, scènes de genre au couteau, paysages et compositions diversement interprétées sur divers supports par les artistes Réda Khouane, Mohamed Bakli, Amir Bendali, Tahar Abdellaoui... La part du lion revient à Bekhti pour une série de travaux assez intéressants entre surréalisme régulier qui le caractérise par ses allants à faire de l'huile son viatique dans le domaine des arts plastiques, la balade est agréable, Abderrahmane le bien nommé partage avec nous ses scènes énigmatiques toutes en questionnements et en interrogations lancinantes visible dans des tableaux entrepris dans la rigueur et le sérieux. En effet le plasticien même s'il s'offre quelques plages de répit dans des «Marines» réalisées ici et là comme pour se reposer de son art subtil du mystère laisse un talent entier s'exprimer à l'huile sur toile. Force récurrente, l'inspiration de Bekhti impose des visages régulièrement féminins, des compositions souvent géométriques, insolites, faisant d'étranges quadrillages dans «les» cieux dessinés, les sols qui prennent des formes étranges, le plasticien inscrit ses scènes dans des mises en places insolentes, provocantes car prenant à contre-pied le bon sens malgré une fabuleuse maîtrise du dessin et de l'élément graphique. Notre ami reste l'un des tenants du dessin et de l'élément graphique. Notre ami reste l'un des tenants d'un art surréaliste que se plaît souvent à surfer entre Prévert ou Baudelaire sans aucune limite imposée. Abderrahmane Bekhti nous montre élégamment un portrait d'enfant regardant vers le haut ; il s'en va vers des scènes du port de Cherchell, tutoie les Bellambras chauves de l'automne de Césarée, mais plonge aussi ses griffes inspirées dans des compositions plus profondes comme «Les Fantômes», «La botte», une peinture dialectique, entre rigueur de la botte confrontée à la fragilité de l'œuf, souvent considéré comme le siège de la vie et élément paradoxal entre solidité et apparente fragilité. La récurrence d'éléments graphiques porte toute la symbolique du peintre qui s'offre à foison les feuilles de Platane comme semble-t-il élément rassurant qui le lie par la nostalgie à des éléments du passé, ainsi l'œuvre «Nostalgie» avec l'éternelle esthétique féminine, tend à nous préciser cette idée. «Marabout», «Romance», «Les Amants», «Orpheline», «Amour dans le vent» nous plongent sans cesse dans des univers souvent hétéroclites, bien composés, souvent énigmatiques sur des questionnements renouvelés comme cette fougueuse illustration de Cheval qui galope dans une incarnation du temps qui passe. Cela tranche avec «Paresse», qui dans des pastels tranquillisants nous laisse une impression de calme. Voilà pour ce généreux plasticien qui prend plaisir à inviter aussi le talentueux calligraphe moderne Khouane de Cherchell qui nous livre quelques travaux très bien réalisés sur des compositions «écrites» de très belle manière, ce bon p'tit gars du cru promet encore d'autres aventures picturales que nous attendons avec curiosité. Les abstraits de Mohamed Bakli venu de Ghardaïa montrent autant un talent d'écriture auquel nous a habitué ce plasticien et théoricien de l'art qui nous montre pour cette fois de superbes compositions multicolores aux traits de pinceaux qui ne trompent pas sur les « parcours» insolents de touches sur la toile, très très intéressants comme point de vue plastique de la part de Mohamed Bakli sur ses travaux. Tahar Abdellaoui, venu de Blida nous offre quelques exercices de style déclinés sur des supports moyens, le couteau, la touche peinte, compositions de paysages pour un talent qui s'affirme avec une propension aux scènes de genre héritières d'une tendance à une forme d'expressionnisme même si l'origine est paradoxalement impressionniste si l'on considère le contraste entre touches nerveuses inscrites sur des scènes d'apparence plus «calmes». Le jeune pinceau du Zaccar, Amir Bendali nous offres quelques incursions lyriques dans le dessin au crayon à la plume, bien joué ! Avec en prime quelques éléments dessinés et peints dans une composition qui suggère une forme zoomorphe dans laquelle on devine un lézard pour des raisons évidentes d'héritage symbolique séculaire. Amir manie la couleur et la symbolique qui va avec dans un très bon assortiment, voilà aussi un artiste à suivre de près. Toute cette joyeuse bande mérite le détours par la bibliothèque municipale de Cherchell qui n'en est pas à son coup d'essai en accueillant aussi quelques bonnes lampées de musique andalouse, et rencontres culturelles, on l'aura constaté avec la délicieuse Henia Bekhti, eh oui, la fille de l'autre qui prouve que le fruit ne tombe jamais très loin de l'arbre... Visite enrichissante, plaisir des sens,. L'entrée est libre. Exposition collective, jusqu'à la fin août, Bibliothèque municipale de Cherchell, entrée libre.