Se prévaloir de soutenir le président de la République pour dilapider les deniers publics, pour s'enrichir illicitement, porte atteinte à son image et par là aux institutions de la République. Aussi sans verser dans des règlements de comptes inutiles, devant mobiliser au lieu de diviser il serait suicidaire pour le pays tant de banaliser la corruption qui constitue une atteinte à la sécurité nationale que de s'attaquer au secteur privé productif tant national qu'international, inscrit comme acteur majeur dans la nouvelle Constitution, au nom d'une idéologie dépassée, avec le risque de faire fuir les capitaux. Les prédateurs qui ne contribuent nullement à la création de la richesse nationale, dont le président de la République n'a pas besoin de leurs soutiens, ne représentent qu'une minorité de rentiers, rejetés par la majorité des décideurs que de la population algérienne. Les échos favorables du soif de la moralisation qui parviennent tant de l'Est à l'Ouest, du Nord au Sud de l'immense majorité de la population doivent être pris en compte. Les partis politiques tant du pouvoir que de l'opposition doivent afficher une position claire à ce sujet s'ils ne veulent pas que le taux d'abstention et de bulletins nuls catastrophique pour la crédibilité de l'Etat. 1.- L'optimisme béat par le passé de certains responsables inconscients de la gravité de la situation socio-économique rêvant du retour d'un cours à 90/100 dollars, ( un ex-ministre en 2015 ayant affirmé à l'APS que même avec un cours de pétrole à 10 dollars, l'Algérie s'en sortirait) qui risque de déstabiliser le pays à terme, nous fait penser aux faux pronostics des anciens dirigeants des années 1986, pensant que des solutions monétaires et des schémas périmés de l'industrie mécanique du passé, oubliant que nous sommes à l'aube de la quatrième Révolution économique mondiale, peuvent résoudre les problèmes du fonctionnement de la société. Il faut recadrer le débat, et par un langage de vérité, s'attaquer à l'essence et non aux apparences. L'Algérie connaîtra dans les années 2018/2020 de vives tensions budgétaires. Et contrairement aux discours complaisants de certains experts algériens, induisant en erreur les autorités du pays, qui annonçaient un cours de 70/80 dollars pour 2015/2017 et plus entre 2017/2020, et comme je l'ai noté dans plusieurs contributions et notes adressées aux autorités du pays depuis plus de trois années, l'AIE le cours du pétrole sera bas en 2017/2020 du fait du déséquilibre offre/demande et des nouvelles mutations énergétiques. Je rappelle que les importations de biens, auxquels il faut ajouter les sorties de devises des services (10/11 milliards dollars/an) et de transferts légaux de capitaux (entre 4/5 milliards de dollars/an) se sont chiffrés à quelque 60 milliards de dollars en 2016, alors que les recettes n'ont pas dépassé les 29 milliards de dollars, bien qu'un important effort a été fait car durant l'année 2013, les sorties de devises ayant été supérieures à 75 milliards de dollars. Pour 2017, au vu du bilan des six premiers mois 2017, les importations de biens s'orientent vers 45/46 milliards de dollars et avec les services et les transferts légaux de capitaux presque le même montant de sorties de devises qu'en 2016, avec des recettes en devises variant entre 32/35 milliards de dollars si le cours en moyenne annuelle varie entre 50/55 dollars. Il faut revoir certaines lois et améliorer le climat des affaires par une nouvelle gouvernance par la lutte contre la bureaucratie, la réforme du système financier, le système socio-éducatif et le foncier et assouplir la règle des 49/51% généralisable à tous les segments, où l'Algérie supporte tous les surcoûts, sans compter le risque de corruption de certains prédateurs, posant la problématique de la balance devises et technologique positive. En plus de certains projets fortement capitalistiques, créant peu d'emplois, se pose le problème de leur rentabilité qui est incertain face à la restructuration industrielle mondiale, notamment celui de l'acier ou du ciment de ces usines de montage de voilures où tous les inputs sont importés, car nous sommes à l'ère de la mondialisation. 2.-La baisse du cours des hydrocarbures sera de longue durée et des stratégies d'adaptation deviennent urgentes afin d'éviter une déflagration sociale à terme, devant éviter l'illusion d'un modèle de consommation linéaire. L'on doit différencier régime et Etat au sens hégélien du terme. Il n'existe pas d'Etat standard mais que des équipements anthropologiques qui le façonne largement influencé par la mondialisation avec de nouvelles fonctions. Il devient dès lors urgent d'avoir des stratégies d'adaptation tenant compte de l'innovation destructrice pour reprendre l'expression du grand économiste Joseph Schumpeter dans son ouvrage universel « réformes et démocratie ». Comme il est admis qu'aucun segment politique, seul, ne peut résoudre la crise multidimensionnelle. Un consensus minimal associant toutes les forces politiques, économiques et sociales, sans exclusive, mais excluant tout extrémisme, est indispensable ce qui ne saurait signifier unanimisme signe la décadence de toute société. Il serait hasardeux pour l'avenir de l'Algérie d'aller vers un monologue, de combler le vide (culture bureaucratique rentière du passé) par certaines organisations incapables de mobiliser la société du fait de leur non crédibilité. Le pouvoir doit éviter comme par le passé par la distribution de la rente de continuer à créer administrativement et à instrumentaliser les partis politiques, à des fins étroites de court terme. En effet, il ne trouvera plus, en cas de crise majeure, de relais politiques et sociaux de médiation entre l'Etat et la société, le risque étant la confrontation directe des citoyens désorganisés avec les forces de sécurité. L'objectif stratégique est de redonner confiance, brisée entre l'Etat et les citoyens au moyen d'un dialogue fécond et productif afin de favoriser une mutation systémique fondée sur le développement de plus d'espaces de liberté. Pour dépasser cette situation anomique, toute action implique une vision stratégique d'adaptation à ce monde du XXIème siècle interdépendant turbulent et instable. Il existe un théorème en sciences politiques : 80% d'actions mal ciblées et désordonnées que l'on voile par de l'activisme, ont un impact de 20% sur les objectifs et 20% d'actions bien ciblées ont un impact sur 80%. L'Algérie a besoin d'une vision stratégique collant avec la transformation du nouveau monde, évitant l'illusion du juridisme. L'on peut avoir les meilleures lois du monde mais rarement appliquées. L'action concrète implique de cerner les causes fondamentales du blocage qui sont d'ordre systémique, reflétées par le divorce de l'importance de la dépense publique, plus de 800 milliards de dollars entre 200/2015 (équipement et fonctionnement) et les impacts économiques et sociaux, avec un taux de croissance moyen de 3%, alors qu'il aurait du dépasser 10/15%. Les données officielles de la Banque mondiale comme celles de la Banque d'Algérie permettent d'indiquer que pour la période 2000-2017, environ 97/98% des exportations sont le fait des hydrocarbures. L'enjeu majeur pour l'Algérie et sa survie implique donc de mettre en place des instruments opérationnels capables, d'identification, d'anticiper les modifications de comportement des acteurs économiques, politiques, sociaux et militaires, au moment où note région connait et devrait connaitre entre 2017/2020/2030 d'importants bouleversements géostratégiques notamment au niveau du bassin euro-méditerranéen et africain. 3.- Malgré les importantes potentialités de l'Algérie, la rente des hydrocarbures en anesthésiant tout esprit d'initiative, a largement influencé la nature des régimes et les politiques socio-économiques depuis l'indépendance à nos jours sans avoir réalisé le rêve du 1er Novembre 1954 et notamment de la plateforme de la Soummam, un Etat qui survit aux aléas de l'histoire et une économie diversifiée. L'Algérie se cherche toujours. L'Algérie a besoin d'une part une réorganisation du système partisan et de la société civile qui joue le rôle d'intermédiation efficace entre l'Etat et la société, évitant de laisser souvent les forces de sécurité confrontés directement aux tensions sociales, et d'autre part pour éviter la léthargie et la stérilité par la mobilisation de tous ses enfants dans leur diversité. Dans les pays dits démocratiques existent deux à quatre grands partis maximum avec des programmes politiques, sociaux, culturels et économiques. (A suivre) Dr Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international