La Syrie continue de diviser les pays arabes, même au sommet arabe de Baghdad, et même s'ils ont exprimé jeudi dans la capitale irakienne leur soutien aux aspirations du peuple syrien en termes de liberté et de démocratie et à son droit de décider de son avenir à travers l'alternance pacifique au pouvoir, appelant à mettre un terme à l'effusion de sang tout en favorisant la solution politique et le dialogue national. Dans la «déclaration de Baghdad», les dirigeants arabes ont rejeté l'intervention étrangère en Syrie afin de préserver l'intégrité territoriale du pays et l'unité de son peuple, soulignant leur soutien aux décisions de la ligue arabe et à la mission de Kofi Annan, qui a proposé un plan de sortie de crise en six points. La Syrie a accepté les six points présentés par Kofi Annan, selon la Déclaration qui met en avant la nécessité de les mettre en œuvre afin de faire cesser l'effusion de sang et favoriser une solution pacifique à la crise qui frappe le pays conformément à la décision du conseil de ministres. Le plan de paix présenté par l'émissaire de ONU-Ligue arabe, Kofi Annan prévoit notamment la cessation des violences par toutes les parties, la fourniture d'aide humanitaire et la libération des personnes détenues arbitrairement. La déclaration finale du sommet arabe de Baghdad des chefs d'Etat et de leurs représentants demande au «gouvernement syrien et à toutes les composantes de l'opposition d'adopter une attitude positive envers la mission de M. Annan en entamant un dialogue national sérieux basé sur le plan soumis par la Ligue arabe et la résolution adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU». Ils se déclarent par ailleurs en «faveur de l'unité et la stabilité de la Syrie et contre toute intervention militaire», et «condamnent les violations des droits de l'Homme contre les civils et considèrent le massacre de Baba Amr commis par les forces militaires et de sécurité syriennes comme des crimes contre l'humanité». Dans la même déclaration, les pays arabes «dénoncent les violences, les meurtres et l'effusion de sang, se prononcent en faveur d'une solution politique par des négociations nationales, refusent l'ingérence étrangère dans la crise syrienne». Pour autant, dans une capitale irakienne pratiquement fermée et sous très haute surveillance, la voix des pays arabes manquait de vigueur et marquait de profondes divergences sur le dossier syrien, qui a pratiquement focalisé les travaux d'une rencontre pratiquement boycottée par l'Arabie Saoudite et le Qatar, qui n'ont envoyé que des responsables de seconde zone, Doha et Ryadh étant favorables à une solution musclée en Syrie. Bien sûr, il y avait l'Emir du Koweit à ce sommet mais le poids des absences et des décisions molles, vus de Syrie, est une immense déception pour les peuples arabes. La Syrie, absente à ce sommet, a été ainsi au cœur des débats et des positions parfois extrêmes de certains pays arabes, qui veulent autant «régler son compte à Bachar Al Assad», que de le chasser du pouvoir s'il le faut en appelant à une intervention étrangère. Vendredi en Syrie, la «mollesse» de la position des pays arabes a été dénoncée au cours de manifestations. Car la «Déclaration de Baghdad», qui s'abstient d'appeler au départ du président syrien et à l'armement des rebelles syriens, reste vague en mentionnant «le légitime désir de liberté et de démocratie du peuple syrien qui souhaite choisir son avenir, et appuient un transfert pacifique de l'autorité». Et, hormis la Tunisie, aucun des 21 pays représentés n'a appelé directement à un départ du président Assad, au moment où les violences en Syrie ont fait plus de 9.000 morts selon des décomptes de l'opposition. Mais, en Syrie, la situation reste inchangée. Le régime syrien a intensifié hier ses opérations militaires contre les villes rebelles malgré sa promesse de faire réussir la dernière mission de paix, suscitant l'impatience de l'émissaire international Kofi Annan qui a demandé un cessez-le-feu «immédiat». Dans le même temps, des milliers de personnes manifestaient à travers le pays pour exprimer leur déception après le sommet arabe de jeudi. Devant la persistance de la répression des manifestants, le porte-parole de l'émissaire conjoint de l'ONU et de la Ligue Arabe pour la Syrie, Kofi Annan, a appelé Bachar al-Assad à appliquer le plan Annan «maintenant». «Nous attendons de lui que le plan soit exécuté immédiatement. A l'évidence, nous n'avons pas constaté de cessation des hostilités sur le terrain. C'est notre grande préoccupation», a déclaré M. Ahmad Fawzi.»Il est impératif que les tueries cessent (...), que les violences cessent», a-t-il ajouté. Apparemment, les pays arabes tout autant que l'ONU n'ont pas les arguments politiques pour que le régime de Bachar Al Assad fasse cesser la répression du peuple syrien, ni pour apaiser la situation.