La Banque d'Algérie a déclaré avoir fait fonctionner la planche à billets pour créer 3.585 milliards de dinars de monnaie, pour faire tourner l'économie du pays. Dans une note de son gouverneur la banque d'Algérie a indiqué hier lundi que, dans le cadre du financement non conventionnel, elle a émis en deux tranches entre les mois d'octobre 2017 et janvier 2018 un montant de 3.585 milliards de dinars. La première tranche, émise fin octobre début novembre 2017 a été de 2.185 mds de DA, et la seconde, émise en janvier dernier a été de 1.400 mds de DA, soit un total de 3.585 mds de dinars, représentant la somme de 26 milliards d'euros. Ce financement, selon la banque d'Algérie citée par l'APS, a été rendu possible par un amendement de la loi relative à la monnaie et au crédit, pour financer directement le déficit budgétaire et le refinancement de dettes publiques, ainsi que le Fonds national d'investissement (FNI). Devant l'assèchement des liquidités bancaires consécutivement à la baisse drastique des recettes pétrolières entre 2015 et 2016, le Comité des opérations de politique monétaire (COPM) de la banque d'Algérie avait décidé en août 2017 de ramener le taux de la réserve obligatoire de 8% à 4% (après une baisse, en mai 2016, de 12% à 8%), pour «libérer une liquidité additionnelle sur le marché estimée à 350 milliards de DA. En fait, les clignotants à cette date étaient au rouge, puisque, toujours selon la banque centrale d'Algérie, à fin octobre 2017, les liquidités bancaires étaient de seulement 482 mds de DA, et que celles du Trésor domiciliées auprès de la banque d'Algérie ne totalisaient que seulement 51 mds de dinars. Le Premier ministre Ahmed Ouyahia avait rappelé qu'en septembre 2017, «l'Etat était dans une situation qui n'allait pas lui permettre de payer les fonctionnaires», précisant qu'à la même période de l'année, le Trésor public disposait de 50 milliards DA, alors qu'il lui fallait 150 milliards DA au moins. Il avait dit à ce moment-là devant le Parlement que «cette situation aurait pu nous amener à un arrêt total de l'économie nationale dans la mesure où c'était la sécheresse au niveau des banques». Mais, «aujourd'hui, la situation a pu être redressée certes, mais il reste encore un long chemin à parcourir d'autant plus que nous sommes engagés à atteindre un équilibre du budget en 2022», a-t-il ajouté lors de la dernière session du Conseil national du RND en fin de semaine à Alger. Cependant, le recours à la planche à billets, ou le financement non conventionnel, qui permet d'éviter les solutions classiques de l'endettement externe, ou un refinancement auprès de banques internationales, a été la cible d'attaques frontales du FMI et des partis politiques. Le FMI estime que l'Algérie devrait saisir les opportunités qui se présentaient à elle pour 'atteindre le double objectif de stabilisation macroéconomique et de promotion d'une croissance durable'', alors que le financement non conventionnel risque d'aggraver les déséquilibres, d'accentuer les tensions inflationnistes et d'accélérer la perte de réserves de changes, ce qui créera un environnement économique qui ne sera propice ni aux réformes, ni au développement du secteur privé. Pour les partis d'opposition, la planche à billets conduira à une flambée de l'inflation, à la baisse du pouvoir d'achat et à la chute du cours du dinar algérien. Pour autant, selon le gouverneur de la banque centrale, le recours à la 'planche à billets'' a eu un ' impact immédiat et le plus visible est la transition rapide d'un déficit de liquidité du système bancaire, dans son ensemble, vers un excédent substantiel de liquidités». Si le gouverneur de la banque centrale a relevé qu'après le mois d'août 2016, le système bancaire, dans son ensemble, «faisait face à un déficit de liquidités», la Banque d'Algérie «avait répondu en offrant des liquidités via des opérations de refinancement», soit le recours à la planche à billets. Et, à partir de mi-novembre 2017, «les facteurs autonomes ont généré, de nouveau, un excédent de liquidités important qui s'est élevé à environ 1.500 milliards de DA dans les premiers mois de 2018", explique le gouverneur de la banque d'Algérie, qui a indiqué que le taux directeur a été ramené à 3,5%. Pour autant, le danger du recours à la planche à billets est l'apparition d'un effet pervers, l'inflation. La banque centrale a donc entamé des opérations de stabilisation des prix dans «un environnement de surplus de liquidités substantiels et persistants», et, au 8 janvier 2018, «les opérations de reprise de liquidités ont débuté». Ces opérations, selon la banque d'Algérie, s'effectuent sous forme de dépôts à terme à 7 jours, étant donné que les montants à absorber sont décidés par la banque d'Algérie et adjugés à travers des enchères à taux variable avec un taux maximum proche du taux directeur (3,5%). Au cours des prochains mois, la banque d'Algérie «continuera à suivre de près tous les développements macroéconomiques et monétaires et ajustera, si nécessaire, les paramètres de l'ensemble des instruments à sa disposition pour assurer la stabilité des prix», affirme M. Loukal. Vendredi dernier devant les militants du RND, Ahmed Ouyahia avait qualifié le recours au financement non conventionnel de «choix courageux» du président Abdelaziz Bouteflika, avant de souligner que cette mesure a permis à l'Algérie de poursuivre son développement économique, tout en évitant de connaître la même situation de crise qu'en 1986.