Le ministre des Finances Abderrahmane Raouya a souligné hier lundi, que le projet d'une réforme du système des subventions, aux couches sociales défavorisées, est toujours de mise. Il a expliqué à la radio nationale qu' « il est clair que cela ne peut pas continuer comme ça pour une simple équité sociale », estimant qu' « il n'est pas normal qu'un simple citoyen ne puisse pas profiter, parfois, de la subvention par rapport à quelqu'un qui perçoit un salaire plus important. » Avant lui, l'ex-ministre du Commerce Mohamed Benmeradi avait déjà évoqué l'éventualité d'une réforme de l'actuel système des subventions, qui ne profitent pas, exclusivement, aux couches sociales défavorisées ou aux bas salaires. M. Raouya a souligné qu'une commission du ministère des Finances travaille sur ce dossier, en concertation avec la Banque mondiale. « En tout état de cause, rien ne sera fait tant qu'on ne disposera pas de l'ensemble des paramètres pour la mise en place d'un nouveau système », a-t-il dit, précisant que « nous ne toucherons pas à la politique de subvention tant qu'on n'aura pas réglé, définitivement, l'identification des ménages, le montant et comment procéder ». Il a laissé entendre que l'application de cette réforme des subventions pourrait intervenir après un large débat national. « J'espère à partir de 2019 », a-t-il indiqué, estimant que le début de la levée de la subvention, devrait porter sur l'énergie ». Par ailleurs, le ministre des Finances a, une nouvelle fois, défendu le recours du gouvernement au financement non conventionnel, pour faire face à la crise financière, en particulier le manque de liquidités. Il a réaffirmé, à ce propos, que l'Algérie « est souveraine dans ses choix », et qu'elle a choisi cette option, qui « n'est pas sans risques », admet-il, en dépit des avertissements du FMI. Le ministre a reconnu que face à cette situation, « nous avons mis l'accent sur la rationalisation des dépenses, car nous ne pouvons, en fonction de la conjoncture financière interne et internationale, continuer sur les plans qui ont été effectifs, au courant de ces dernières années. » Et donc, « il fallait des règlements un peu particuliers pour la rationalisation des dépenses. » S'il reconnaît que le recours à la planche à billets' pour financer l'Economie nationale « n'est pas la seule » option, il a insisté pour souligner que « nous sommes souverains. Cette voie (le financement non conventionnel, Ndlr) n'est pas sans risque, c'est clair, mais le risque est mesuré et nous prenons l'ensemble des règles de rigueur pour maîtriser cet aspect du financement non conventionnel. » Selon M. Raouya, l'inflation se situerait à 4,3% en moyenne entre 2018 et 2020, et 5,5% pour 2018. « Et jusqu'à maintenant, nous avons un taux de 4%. C'est maîtrisé, a-t-il dit, et nous continuerons avec ces règles de rigueur ». Pour lui, le financement non conventionnel est beaucoup plus destiné à « l'investissement, et il va encourager la croissance, qui va venir assez fortement. » Le ministre des Finances a, en outre, affirmé que « pour l'instant, nous sommes sur ce crédit interne, nous le maîtrisons. Nous utilisons l'ensemble des moyens, soit par prêts bancaires, soit par le Fonds national d'investissements (FNI) », avant d'affirmer que « nous continuerons à ne pas recourir au financement externe », car affirme t-il, « l'endettement extérieur est absolument exclu ». Pour autant, l'Algérie peut recourir aux prêts financiers bilatéraux, a-t-il admis, relevant que « nous discutons sur le financement du grand port centre d'El Hamdania, pour un financement de l'Etat chinois. Il y a certains crédits qui peuvent être effectués lorsqu'il y a un retour d'investissement appréciable ». Revenant sur la Loi de finances complémentaire, pour 2018, il a expliqué qu'elle a été mise en place pour deux « grands axes importants: une autorisation de programme de 500 milliards de DA pour financer certains gros projets d'investissements, et une disposition relative au Commerce extérieur pour mettre un terme à une dérive dans ce secteur ». Selon le ministre des Finances, il a été découvert qu'il y avait « des produits finis, qui étaient importés, et qui avaient des avantages douaniers dans les pays de production, et donc on a mis en place un système de taxation pour que nous rétablissions notre balance commerciale pour les Etats avec lesquels nous sommes en accord. Dès qu'on rétablira notre balance commerciale, on peut envisager d'autres règles commerciales. » Situation financière tendue Plus globalement, et par rapport aux prix actuels du pétrole, M. Raouya estime que « la situation est toujours un peu tendue » sur le plan financier. « Nous avons un déficit à combler », a-t-il dit, relevant qu' « en 2018, il est de 1.800 mds de DA à combler par le financement non conventionnel. » « Ce déficit va reprendre en 2019, et quel que soit le prix du pétrole, cela ne veut, absolument rien dire, il peut retomber un jour ou l'autre, et donc il faut être regardant et ne pas tomber dans la facilité », a-t-il souligné. Le ministre des Finances a, d'autre part, regretté que la croissance économique soit toujours tirée par la dépense publique, sur la base d'une prise en charge de l'Etat de l'ensemble des investissements. M. Raouya a espéré qu'il y ait, davantage, d'investissements du secteur privé ou étranger. Sur le recouvrement fiscal, M. Raouya a admis que « ce n'est jamais parfait, les efforts doivent continuer, d'année en année, aller encore plus pour recouvrer encore plus. » Entre l'année 2000 et 2017, il y a eu une grande évolution dans le recouvrement fiscal: « on a eu 400 mds de DA, en 2000, et en 2015, nous étions à 2400 mds de DA, et nous sommes en 2017 à plus de 2600 mds de DA pour la DGI, seulement, et non pas la fiscalité ordinaire ». Ce qui a incité le gouvernement, selon le ministre des Finances, à « dégeler 600 milliards de DA pour des projets, rappelant que le gel de l'ensemble des projets est estimé pour une valeur de 2.200 milliards de DA. « Nous dégelons 600 milliards pour financer les infrastructures de l'Education, de la Santé et de l'Enseignement supérieur. En matière d'Education nationale, par exemple, 1.400 structures vont être édifiées », a-t-il précisé. Parlant de l'évasion fiscale, il a admis qu' « elle existe de par le monde pour celui qui trouve la parade ». Mais, pour le marché informel de la devise, il a souligné que « nous luttons contre ce phénomène, il y a des règles strictes, au niveau des devises, et la Banque d'Algérie a pris des instructions, dernièrement. Nos banquiers sont en train de mettre en place des dispositifs pour réguler toute cette masse d'argent », a-t-il indiqué, rappelant que « l'Etat est déterminé à lutter contre les pratiques frauduleuses. » « Il y a des dispositions législatives et des règlements pour lutter contre ces phénomènes, et si on ne lutte pas, c'est la fin d'un Etat », a t-il dit, estimant que « c'est normal qu'il y ait des luttes sans merci sur des aspects qui engendreraient de graves conséquences sur un Etat, quel que soit l'Etat où on est ». Par ailleurs, le ministre des Finances a estimé, concernant l'implication d'agents de Douanes ou des Impôts dans des affaires de drogue ou de corruption que « rien n'est encore acquis. Ce que j'ai à dire, pour lutter contre ces phénomènes, c'est qu'il faut avoir une grille d'analyse sur les risques. Les administrations doivent travailler sur ces aspects modernes de gestion et de lutte contre la fraude », ajoutant qu' « un bon système d'information doit nous permettre de réagir, à chaque fois que ce type de phénomènes se produit. » Pour lui, « il n'y a aucune tolérance en la matière ».