Vous en convenez sûrement, un Etat légitime sain et sauf repose sur 3 piliers avec une majuscule : l'Autorité, l'Ordre, et la Justice. Alors que dire de Kheira qui a peur de n'en avoir aucun ? C'est une photo que vous pouvez admirer dans votre code pénal national : L'avant-plan est totalement occupé par le crime commis contre l'Etat qui a caché ses biens et ses commis sous la chose publique. L'atteinte aux sujets ‘'ordinaires'' est reléguée à l'arrière-plan. Dans le système, le sujet n'a pas encore le poids d'un citoyen. L'acte terroriste se réconcilie. La maltraitance d'un enfant s'accepte. La révélation de grosses boulettes par un journaliste se réprime. Le sit-in, la marche, le rassemblement, ou le mécontentement manifeste, deviennent insurrection. Quelque part, dans un bout de la perle de Bouteflika, dans une daïra, au sein même du bureau de son chef : ‘'Moi aussi je m'en f. que tu sois ou pas ! Belhram que je prenne un logement ! 16 ans de képi et je ne prends walou ? Tu te trompes !'' C'est un jeune militaire en retraite anticipée, qui ridiculise, en termes scatologiques, de ton et de coups de poings sur le bureau, un vieux chef de daïra ayant largement dépassé l'âge de sa retraite. Ah ! L'ère à jamais révolue où le sous-préfet était escorté par une délégation plus impressionnante que celle d'un ministre d'aujourd'hui ! L'histoire vraie se passe en deux temps. Deux ‘'bambins'' qui somnolaient de jeûne partent en guerre à propos d'un bidon de figues de barbarie. ‘'Maudissez Satan ! Vous jeûnez, non ?'', s'interpose le souk qui les entourait, avec parti-pris, une moitié pour l'un et le reste pour l'autre belligérant. On se sépare avec rendez-vous de règlement des comptes pour plus tard. Pas plus tard qu'après l'iftar. Sur l'esplanade qui reste du jardin public en cours de désertification, débarquent une flotte de Mazda avec une foule de révoltés. Seules différences avec ceux qui cherchent Kadafou : les armes lourdes et la provenance du douar d'à côté. Les armes blanches, si et toute la panoplie : triques, gourdins, matraques, cannes, couteaux, haches, sapes, et, fait nouveau au douar, les sabres ! Dans le noir d'un centre-ville très mal éclairé, c'était le moyen-âge qui revenait ! Comme soufflé d'en haut, un fourgon avec un képi en guise de gyrophare passait à côté, imperturbable. Avant la guerre, il n'y a pas objet à provoquer le peuple héroïque. Après la guerre, ce sera l'affaire des pompiers pour encombrer les urgences et gonfler les statistiques. ‘'L'Insécurité'' est faite pour le décor. Du moins pour faire peur au peuple libéré à lui-même, et ménagé pour qu'il ne fasse pas comme ses frères arabes. Au mirador de la grande prison populaire, la sentinelle muette n'est pas sourde au spectacle moyenâgeux. Elle veille à ce que l'Intérieur ne commence à bouillir comme les prisonniers frères lâchés à eux-mêmes. Il s'agit de le dispenser d'une révolution en rond, à l'instar des voisins qui se cherchent. En attendant les réformes en cours de cuisine, le peuple a été mis en liberté de se dévorer entre douars, lignées tribales, ou cités dortoirs. Pourvu que les sièges soient occupés par les indus.