Le porte-parole du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) aux négociations d'Evian, Rédha Malek, a déclaré que les Accords d'Evian ont "intégralement" repris les principes fondamentaux mentionnés dans la Déclaration du 1er novembre 1954 : l'intégrité du territoire, l'unité du peuple algérien et l'indépendance nationale. "Si nous avions accepté la division de l'Algérie, avec un Sahara sous contrôle français, nous aurions été confrontés très vite à une véritable guerre civile", a-t-il dit dans un entretien à l'hebdomadaire Jeune Afrique, citant le cas du Vietnam et de l'Irlande du Nord. Sur la clause des Accords portant sur les essais nucléaires français au Sahara, Rédha Malek a indiqué que l'Algérie était "obligée" de l'accepter. "C'était une exigence des Français qui avaient énormément investi dans ce programme nucléaire. De Gaulle en avait fait une question de paix ou de guerre. En pleine guerre froide, la sécurité de l'Etat français était en jeu. Mais dans l'annexe consacrée aux questions militaires, il est clairement précisé que l'Etat français était responsable et qu'il prendrait en charge les dommages causés", a-t-il dit, ajoutant que "les victimes des essais nucléaires peuvent s'appuyer sur cette disposition pour faire valoir leurs droits". Au sujet du "bail à la France" pour l'utilisation de la base navale de Mers-El-Kebir (Oran), il a précisé qu'au début des négociations, les représentants de l'Elysée, voulaient faire d'elle "une enclave sous souveraineté française", ajoutant que cette option était "inacceptable". "Après de longues discussions, nous nous sommes entendus sur une location. Alors que Paris exigeait une durée de quatre-vingt-dix-neuf ans, une période de quinze ans a été retenue. Le contrat devait être signé après l'indépendance, mais nous avons toujours refusé de le parapher", a poursuivi Rédha Malek, soulignant que "notre stratégie a porté ses fruits". Sur les dispositions des Accords permettant aux pieds noirs qui le souhaitent de rester, il affirmé que le FLN avait donné des garanties afin qu'ils puissent vivre en paix. "Louis Joxe, (ministre français des Affaires algériennes) savait qu'une partie des français désiraient partir et estimait à trois cent mille le nombre de personnes souhaitant s'installer définitivement en Algérie. Mais les attentats de l'OAS ont provoqué une panique parmi les européens. Les pires exactions ont eu lieu durant cette période du cessez-le-feu jusqu'à l'indépendance", a dit Redha Malek. "C'est le FLN qui est parvenu à éliminer cette organisation. Une fois la bataille perdue, les représentants de l'OAS ont demandé à négocier. Jean-Jacques Susini s'est entretenu avec Chawki Mostefaï, alors membre de l'exécutif provisoire. Mais cette réunion était purement formelle, car c'en était fini de l'OAS, a relevé Rédha Malek. A propos des représailles dont ont été victimes les harkis, après la proclamation du cessez-le-feu, il a indiqué que les Accords d'Evian prévoyaient la fin des poursuites contre les combattants algériens et les prisonniers politiques devaient également être libérés. "En échange, nous avions pris l'engagement d'empêcher toutes représailles contre les harkis". "Jamais le FLN n'a donné de directives pour exécuter les personnes ayant collaboré avec les forces coloniales. Dire cela est de la désinformation", a-t-il assuré. Sur le bilan des relations entre l'Algérie et la France, cinquante ans après l'indépendance, il a estimé que les premières années de l'Algérie indépendante ont contribué à l'effacement des séquelles du colonialisme" et qu'il y avait une certaine confiance en raison de la convergence entre les deux capitales en matière de politique étrangères. Sur les relations actuelles, il considère que si "la France veut avoir des relations normales avec l'Algérie, la première exigence est le respect des Algériens et de leur souveraineté. Sinon, il y aura toujours des malentendus, des incompréhensions et des complications". S'agissant de l'éventuelle adoption par l'Algérie d'une loi criminalisant le colonialisme, il a déclaré que "certains disent que la France doit présenter des excuses" et que "personnellement j'y suis opposé". "Une nation n'a pas à présenter des excuses à une autre nation. Le colonialisme est une période historique. La résistance algérienne est une autre. Nous avons mené un combat pour faire partir les Français avec les armes .Nous n'avons pas de complexes à avoir et absolument rien à demander", a-t-il souligné. Cela dit, a-t-il poursuivi, "l'adoption d'une loi déclarant le caractère positif de la colonisation est une véritable provocation". "Faut-il rappeler le génocide de la conquête de l'Algérie, les barriques d'oreilles coupées, les enfumades, les massacres", s'est ûil interrogé, ajoutant qu'"il nous suffit également de rappeler le code de l'indigénat". "La France a voulu faire de nous des sous-hommes", a conclu Rédha Malek.