L'ancien président Nicolas Sarkozy a été placé mercredi sous contrôle judiciaire à l'issue d'une garde à vue de 48 heures dans les locaux de la police judiciaire à Nanterre (banlieue de Paris), ce qui représente une première dans l'histoire de la 5e République. Même si le contrôle judiciaire ne vaut pas culpabilité, les juges chargés de l'enquête ont retenu comme chefs d'inculpation "corruption passive, financement illégal de campagne électorale et recel de détournements de fonds publics libyens". C'était le journal électronique Médiapart qui avait révélé en 2012, sur la base d'un document libyen, le financement de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy par le colonel Maammar el Gueddafi donnant ainsi à l'ouverture d'une information judiciaire en avril 2013, rappelle-t-on. Après plusieurs révélations et un ouvrage de deux journalistes, Fabrice Arfi et Karl Laske, qui lève tout doute sur le financement par el Gueddafi, assassiné le 20 octobre 2011 à Syrte dans l'est libyen, c'est pour la première fois que l'ancien président français a été entendu dans cette affaire. Ziad Takieddine avait révélé, dans une vidéo publiée le 15 novembre 2017, qu'il a "personnellement" remis à Claude Guéant, l'ancien directeur du cabinet du ministre de l'Intérieur, et à Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur alors, plusieurs valises contenant de l'argent liquide, préparées par le régime libyen, pour un montant total de 5 millions d'euros, précisant qu'à deux reprises il les avait remises à Claude Guéant, dans son bureau, puis une troisième fois, en janvier 2007, à Nicolas Sarkozy en personne, dans l'appartement privé du ministre de l'Intérieur. Plusieurs analystes de l'actualité française ont estimé jeudi que la mise en examen de l'ancien président français pourrait donner lieu à l'élargissement de l'enquête à la campagne présidentielle de 2007, à l'issue de laquelle la droite a gagné la course présidentielle. Mais, jugent-ils, cette affaire "tombe mal pour la droite qui est en train d'accomplir sa difficile reconstruction". D'autres évoquent même l'éventualité de l'ouverture du dossier de la guerre en Libye où la France, estime-t-on, aurait dépassé le mandat de l'ONU. Ce qui a laissé certains quotidiens penser que cette affaire "dessert l'image du pays" et "tourne en ridicule notre image de donneurs de leçons".