Le maestro de la musique classique indienne, Amjad Ali Khan, qui joue ce week-end à Paris dans le cadre d'un concert exceptionnel de 24 heures par de dizaines d'artistes, est une légende vivante en Inde, mais il juge que son art millénaire ne s'adresse pas aux « masses ». « La musique classique est connectée au divin. Elle ne s'écrit pas, ne se lit pas et se transmet uniquement par la tradition », explique cet Indien musulman né en 1945 dans une grande famille de musiciens du centre du pays. Amjad Ali Khan, un père de famille souriant et distingué, s'est consacré toute sa vie à son instrument, le sarod, un énorme luth ramené d'Afghanistan vers l'Inde par l'un de ses ancêtres. Ses aïeux jouaient devant les cours des maharadjahs indiens et M. Khan raconte qu'en 1966, il s'était donné six heures d'affilée devant la famille du roi afghan, Zahir Shah. Alors qu'il doit se produire dans la nuit de samedi à dimanche à la cité de la Musique à Paris, pour un événement sans précédent de « ragas » indiens (de samedi 18h au dimanche 18h avec des retransmissions sur les sites internet www.citedelamusique.fr et www.sallepleyel.fr), il prévient d'avance les mélomanes que « la musique classique indienne n'est pas faite pour les masses ». Car l'artiste se désole de « la commercialisation de la musique par le cinéma » de Bollywood et ses chansons et danses populaires romantiques déclinées aujourd'hui en une myriade de clips vidéo qui envahissent les réseaux de télévision. « Les chansons et les danses sont la marque de fabrique du cinéma indien à destination du peuple. Mais ma musique est sans paroles. Elle ne peut pas être comprise, seulement ressentie », assène-t-il. « Depuis le XVIe siècle, la musique savante de l'Inde ("sangita") présente deux grandes traditions voisines : la musique hindoustanie dans le nord et la musique carnatique dans le sud », explique la spécialiste Françoise Delvoye dans son article La musique indienne publié dans l'ouvrage collectif L'Inde contemporaine. »