La circulation des véhicules en cette dernière nuit de l'an 2004 dans la wilaya de Tipaza était très dense. Certains automobilistes imprudents sont aussitôt victimes des dérapages, la chaussée étant devenue glissante, tandis qu'une pluie fine continuait à arroser cet environnement devenu très sale. Il est 18h30. Il fait déjà nuit. Les techniciens de Naftal ont investi les stations-service pour procéder au changement du prix du gas-oil. Désormais, les prix affichés on été revus à la hausse pour le mazout, c'est-à-dire 12,75 DA le litre. Une file interminable de voitures venant de l'Est se dirigeait vers Tipaza. Il y a des véhicules qui circulent les feux allumés. Le ciel nuageux est bas, tandis que la mer commence à devenir calme, mais il n'y a point de pêcheurs à l'horizon. La plage Colonel Abbès commence à accueillir les fêtards. Au cabaret l'Arc-en-ciel, l'entrée a été fixée à 1500 DA, une boisson au choix est comprise. Treize artistes devaient se relayer durant la nuit du réveillon dans la discothèque. Les videurs du « temple » procèdent à la fouille automatique pour éviter les problèmes. Les hommes qui escaladaient les marches de l'escalier n'étaient pas bien habillés, certainement des ruraux fidèles de ce lieu de joie, venus fêter à leur manière le réveillon. Un gardien lance à un petit groupe de clients à l'entrée du cabaret : « Ecoutez, j'espère que vous n'êtes pas venus pour regarder seulement, il faut que vous consommez ». Plus loin encore, l'ambiance à l'entrée des « hôtels » Méditerranée et Kahina est morose. Le sable de la plage Colonel Abbès couvre déjà une partie de la chaussée. De rares véhicules sont garés le long de cette route dans l'obscurité. Le conducteur de la camionnette rouge de marque Toyota, une canette de bière à la main, enlace sa compagne. Ils sont seuls, loin des coins animés. La partie est de la plage Colonel Abbès est très obscure. le groupement de gendarmerie de Tipaza a mis en place un impressionnant dispositif pour permettre aux gens de passer les dernières minutes de 2004 et entamer l'an 2005 dans de bonnes conditions. Le commandant de la compagnie de gendarmerie de Koléa se trouve au niveau de la plage Colonel Abbès. Beaucoup de véhicules sont fouillés. « Nous accomplissons notre mission de contrôle et d'identification. Bien entendu, ces personnes ramènent avec elles des boissons alcoolisées. Elles sont déjà averties de notre présence, car au-delà de 2h 30, d'après notre expérience, on a l'impression que les véhicules circulent sans chauffeurs et cela devient naturellement très dangereux », dit-il. La conduite en état d'ivresse est déjà signalée en cette nuit du 31 décembre 2004, mais aucun accident n'a été enregistré. Au niveau de la partie est de la wilaya de Tipaza, les responsables de la Gendarmerie nationale ont mobilisé une quarantaine de véhicules. Nous avons dénombré 7 barrages fixes et 18 points de régulation. Les patrouilles de la Gendarmerie nationale, selon des sources officielles, au nombre de 7, continuent à circuler le long des routes nationales très fréquentées à l'est de la wilaya. Même les engins blindés ont été déployés dans certaines zones isolées. Le tronçon de Magtaâ Kheïra est emprunté par les automobilistes. L'immatriculation des véhicules illustre la provenance des conducteurs : Alger, Médéa, Blida, Boumerdès et Aïn Defla, tandis que ceux de Chlef son très peu nombreux. Les routes s'illuminent La ville de Koléa s'est vidée, hormis quelques grappes humaines. Le service d'hémodialyse de l'hôpital de Koléa est silencieux. Les femmes de ménage nettoient le couloir. Les patients dialysés sont concentrés. Notre présence spontanée dans ce service étonne. Azzedine, bientôt la quarantaine, déclare : « Je travaille dans ce service depuis 17 ans, et c'est pour la première fois que je vois venir un journaliste durant la nuit du nouvel an. » Par la suite, il nous présente sa femme qui se trouvait sur un lit. « Elle est dialysée depuis 21 ans, et je l'ai épousée. Nous vivons ensemble depuis douze ans. Je travaille dans ce service. Je n'ai pas fait de calcul avant de l'épouser et nous vivons dans le bonheur total. Certes, nous aurions aimé avoir un enfant », conclut-il. Une infirmière du service d'hémodialyse tient son mari par la main durant la séance. Il sourit à notre arrivée. « Il ne me reste pas beaucoup de minutes pour terminer la séance et je retournerai à Blida », ajoute-t-il. Les dialysés sont fatigués, mais nous souhaitent une bonne année. A l'entrée du service d'hémodialyse, une femme de Bou Ismaïl attend un parent pour l'accompagner à son domicile. Dans ses bras, elle tient une couverture et un cabas. Avant de quitter l'hôpital de Koléa, nous croisons des femmes médecins qui s'apprêtent à rejoindre le service de pédiatrie. L'une d'elles vient juste d'arriver. Elle habite Alger. Il est 22h15. Un passage chez une famille à Khemisti nous a permis de constater que ses membres sont réunis autour d'un repas typiquement algérien, avec une grande bûche sur la table. La pluie a cessé de tomber. Il est 23h 12. Nous arrivons au centre de conduite secondaire de Sonelgaz de Tipaza. Les techniciens chargés de la permanence veillent au bon fonctionnement de l'énergie électrique. « Cette nuit est exceptionnelle », nous déclare M. Cherfaoui. La directrice de la wilaya se trouvait là. Toutes les pannes sont spontanément détectées et les agents de Sonelgaz sont reliés par radio et téléphone, prêts à intervenir rapidement. Pour le moment, l'éclairage est assuré. les gendarmes en force Il est 23h 45. Nous allons au complexe touristique CET. Il n'y a plus de place pour stationner. Les étoiles sont apparues. Le ciel est dégagé, la lune à son tour s'est mêlée au décor. Les fêtards sont de plus en plus nombreux au CET. Un détour chez des personnes venues d'Alger pour réveillonner nous dévoile le bon état d'esprit qui règne à quelques minutes de l'année 2005. Les éléments de la sécurité du complexe et ceux de la Gendarmerie nationale veillent au grain. Des jeunes ont déjà perdu leurs réflexes. A l'intérieur du restaurant du CET, toutes les tables sont occupées et les bougies allumées. Le restaurant est très bien décoré. Le menu et la soirée artistique ont coûté 2500 DA. L'animation attire l'attention de l'assistance, le décompte a commencé. Il est minuit. C'est une autre ambiance. 2005 est là. A ce moment précis, certains couples ont préféré quitter le restaurant pour regagner le bungalow. A quelques encablures, à l'est du restaurant, c'est une autre fête qui se déroule au Horse club. Des jeunes filles maquillées et bien habillées, sexy, continuent à séduire. L'intérieur de la salle est sombre. L'entrée a été fixée à 1000 DA. Un prix qui a empêché de nombreux jeunes à pénétrer dans la discothèque. Les agents de sécurité du CET commencent à disperser ces jeunes pour les persuader d'aller dormir. Certains véhicules ont du mal à démarrer au niveau du parking. Les jeunes sont obligés de les pousser. Un élan de solidarité s'est constitué. Certaines automobiles sont déjà en marche. Il fait très beau. Les saluts fusent de partout. Il est 1h du matin. Le restaurant du complexe touristique la Corne d'or est plein à craquer. Il y a tout juste quelques gendarmes. Des gamins jouent sur le gazon. Les familles commencent à évacuer les lieux, la fatigue commence à faire ses effets. Le directeur s'est mis à l'extérieur du restaurant et regarde le va-et-vient des employés chargés du service. La Corne d'or, c'est plutôt calme. La splendeur nocturne de ces moments n'a rien à voir avec le début de la dernière soirée de 2004. Il n'y a pas assez de véhicules qui circulent. A l'entrée de Nador, deux camions militaires sont stationnés. Bien entendu, les éléments des forces de sécurité : militaires, policiers, gendarmes et gardes communaux, dressent des barrages à titre préventif. Personne n'est informé des lieux et des zones concernés. Un dispositif qui s'ajoute à celui mis en place afin d'assurer la sécurité des citoyens en cette nuit de réveillon. 3 h du matin est déjà passé, la fresque vivante vécue durant cette nuit du 31 décembre 2004 au 1er janvier 2005 nous a permis de connaître les différents décors, entre la joie et la tristesse, mais chacun attend des moments meilleurs pour 2005, qu'il soient à l'hôpital, à la maison ou dans son lieu de travail.