Quand on va à El Oued en passant par Tablat, Boussaâda et Biskra, on mesure toute la richesse de la destination Algérie, pays « arc-en-ciel » qui arbore les quatre saisons en quelques heures de trajet. Pourtant, le même constat est fait par tous : le parc hôtelier est tristement pauvre pour tout routard ne pouvant se contenter d'un boui-boui pour gîte. Djillali Mehri et son partenaire international, le groupe Accor, l'ont parfaitement compris et entendent ainsi saisir la bonne affaire en essayant de combler un trou béant, partant du principe que « c'est l'infrastructure qui crée sa clientèle ». C'est ainsi qu'en 2005, un protocole d'accord a été passé entre le groupe Accor et le Groupe d'investisseurs du Maghreb et du Moyen-Orient (Gimmo) de Djillali Mehri pour la réalisation d'une chaîne de 36 hôtels, des Ibis pour la majorité, et quelque 4 à 8 Novotel. « Ce chiffre pourrait passer à 50 hôtels », déclare M. Mehri. Cela dépendra de l'évolution du marché touristique national et du climat des affaires. Trois ans plus tard, où en sont les choses ? M. Mehri nous annonce d'emblée l'inauguration, en janvier prochain, du premier Ibis de la chaîne, un hôtel de 263 chambres érigé à Bab Ezzouar, près de l'hôtel Mercure. « Il sera bientôt suivi d'un deuxième hôtel à Constantine », ajoute-t-il. L'ensemble de l'investissement portera sur quelque 3600 chambres. Le groupe Mehri, actionnaire à 50% dans cet important investissement, y contribue à hauteur de 25 à 30 milliards de dinars. Ce projet d'envergure devrait créer quelque 5000 emplois directs. « Nous avons fait relativement vite », exulte M. Mehri. « D'habitude, les projets commencent, puis en cours de route, ils n'aboutissent pas pour telle ou telle raison. Nous, nous avons été persévérants. Nous sommes en train d'avancer. A Oran et Tlemcen, les chantiers ont démarré. Les prochains, vont être Sétif, Annaba, Skikda et Jijel, puis cela va continuer à raison de quatre par quatre. » Concernant la fourchette des prix, les chambres seront louées pour une moyenne de 8000 DA, assure M. Mehri. « Nous avons opté pour la gamme des deux et trois étoiles. Ce sont des hôtels très confortables et avec un prix abordable qui répond aux classes moyennes. Le client y trouvera tout le confort qu'on trouve dans un 4 étoiles pour moitié prix parce qu'il faut un peu de tout. Il faut les hôtels de classe internationale, les 5 et les 4 étoiles, mais il faut aussi penser aux hôtels de moyenne gamme », explique le magnat du Souf. M. Mehri insistera par ailleurs sur l'importance du volet formation et annonce la création d'une école hôtelière à cet effet. Et de lancer, optimiste : « Je pense qu'on est tout près de faire démarrer le tourisme. Quand le tourisme va, tout va. Les commerçants travaillent, les transporteurs, les restaurateurs, l'artisanat… » Djillali Mehri ne manque pas d'attirer l'attention sur la nécessité de soutenir ces investissements par des mesures d'accompagnement afin de libérer l'initiative économique. « Nous avons un très beau pays. Il y a beaucoup de choses à faire dans le domaine du tourisme. Mais il faut qu'il y ait des mesures d'accompagnement. Il faut ouvrir le ciel d'Algérie. Il faut faciliter les autorisations. Il faut assouplir le visa. Pourquoi ne pas accorder par exemple le visa sur place, à l'aéroport ? », plaide-t-il. M. Mehri déplore également le sempiternel problème du foncier industriel. « Quand on trouve un terrain, on perd beaucoup de temps à faire des démarches pour l'acquérir. Que vaut un terrain s'il n'y a pas un projet dessus ? Il faut faciliter aux investisseurs l'accès au foncier pour pouvoir réaliser des projets. Nous, on ne fait pas de spéculation, on ne fait pas de promotion. On réalise des hôtels, ce sont des investissements très lourds, très lents. » A propos des entraves bureaucratiques, il dira : « Ça va mieux par rapport aux années précédentes. Mais nous continuons à rencontrer des lourdeurs administratives. Certes, nous sommes soutenus par le ministère du Tourisme. Individuellement, on nous aide, on est bien reçus, mais ce n'est pas suffisant. Le climat des affaires s'améliore mais lentement. Il y a une volonté de changement, mais ce n'est pas encore au point. Il faut que les choses aillent un peu plus vite. » Outre le projet de cette chaîne hôtelière, M. Mehri a annoncé le lancement d'un projet de construction de deux villages touristiques, le premier à Aïn Témouchent et le second à Oued Souf. Son ambition ? Détourner une partie des touristes nationaux qui vont chaque année passer leurs vacances en Tunisie. « Chaque année, il y a un million et demi de touristes qui vont en Tunisie ou au Maroc, parce qu'en famille, ils ne trouvent pas où aller. Nous, notre idée a été de créer deux complexes pour commencer. On attend la décision pour l'attribution du terrain », dit-il.