Emblème de fécondité, symbole de paix et de richesse, l'olivier en cette saison alimente bien des discussions en Kabylie. Partout où il nous a été donné d'assister, et parfois de participer à ces palabres, que ce soit à Sidi Aïch, Adekar, El Kseur, Akbou… le même scénario se répète : chacun soutient mordicus que l'huile de sa région est unique et exceptionnelle. S'il l'on est natif d'une région où l'espèce « achemlal » domine, on prête à cette espèce toutes les vertus nutritives et thérapeutiques du monde ; si l'on est d'une région où c'est l'« ayemmel » qui est très répandu, on ne jure que par cette espèce. Si on habite une terre où l' « azerradj » l'emporte, on vous prendra au collet, si d'aventure, vous osez en dire du mal puisque en plus de son huile, cette espèce se conserve verte ou mûre, en saumure, pour la consommation. Ne se basant parfois que sur des idées reçues, ces citoyens débattent « en spécialistes » avec force conviction sur tout ce qui touche à l'oléiculture. Ainsi, si des spécialistes déconseillent le gaulage ce qui réjouit les citoyens des régions où l'on procède à la cueillette des olives à la main, les oléiculteurs « gauleurs » vous riront au nez en entendant ce genre de discours « On gaule nos oliviers, et ils ne se portent que trop bien. Nous avons des oliviers qui ont été des siècles durant gaulés par plusieurs générations, et ils sont, toujours là, majestueux, donnant des récoltes abondantes. Des siècles d'expérience vous parlent ; surtout n'allez pas nous parler du phénomène d'alternance puisque ce phénomène s'observe partout, pas seulement dans les régions où l'on pratique le gaulage. Qu'ont-ils à dire vos spécialistes devant cette réalité ? » se défendent-ils. Il en est de même concernant les huileries, chacun se porte en champion du type de l'huilerie où il livre ses olives. Les usagers des huileries traditionnelles vous citeront des arguments à la pelle pour vous convaincre du bien fondé de leur choix : « En plus d'avoir une huile cent pour cent naturelle et pressée à froid, vous aurez comme tout bon Kabyle de la margine pour toute l'année », arguent-ils. Les partisans des huileries modernes, de leur côté, entassent argument sur argument pour détruire les thèses des autres. « Soyons sérieux, les usagers des huileries traditionnelles ne se basent sur aucune étude sérieuse pour prouver ce qu'ils avancent, ils sont nostalgiques, un point, c'est tout ! Les huileries modernes sont meilleures en tout point de vue : hygiène, qualité et rapidité. Vous n'allez pas quand même nous dire que la version 2000 de Windows est mieux que celle de 2007, c'est inconcevable, c'est la même chose pour les huileries ! » argumente un enseignant « client » des huileries modernes. La « controverse » touche aussi aux procédés de conservation aussi bien des fruits que de l'huile, à la période de la récolte, au climat où l'olivier est cultivé.