Plus qu'une source d'information, la presse a aussi un rôle citoyen et de leader d'opinion à défendre. Comme une institution et membre à part entière de la société civile, elle se doit de défendre les principes de démocratie et de liberté. Après la création, en 2005, du réseau des démocrates du monde arabe pour promouvoir le changement démocratique, le premier noyau pour la création du réseau de journalistes démocrates du monde arabe vient de voir le jour à la faveur d'une première réunion, qui s'est tenue à Alger les 5 et 6 décembre derniers. Regroupant des journalistes de Tunisie, de Libye et d'Algérie, cette rencontre qui a concerné des représentants des médias du Maghreb sera suivie par d'autres réunions destinées aux journalistes d'Egypte et du Moyen-Orient pour aboutir au congrès constitutif du réseau devant regrouper des journalistes de différents pays arabes. L'objectif assigné à ce réseau est de promouvoir la liberté d'expression et les droits des journalistes dans le monde arabe, réputé être un cadre restrictif et répressif des libertés. Organisée à l'initiative du réseau des démocrates du monde arabe, ladite rencontre a permis aux journalistes des pays du Maghreb d'échanger leurs expériences respectives et de parler des difficultés que rencontre la presse sous des régimes qui tendent à se ressembler dans le déni du droit à la libre parole. Souffrant séparément mais pareillement des abus d'autorité et des restrictions des champs d'expression libre, les journalistes arabes espèrent trouver, dans la création du réseau, des liens de solidarité et d'entraide pour ne pas se sentir seuls face à l'oppression. Si la presse algérienne a pu arracher dans le sang et la terreur une part de liberté, elle est aujourd'hui soumise à des lois de plus en plus réductrices de cette petite marge de liberté. « En Algérie, il existe une panoplie de lois qui condamnent le journaliste, allant du code pénal à la loi sur la santé, aux lois sur l'impression, etc. Les lois appliquées dans les pays du Maghreb sont en contradiction avec les conventions internationales sur la liberté d'expression », indique Boudjemaa Ghechir, président de la Ligue algérienne des droits de l'homme et membre du réseau des démocrates du monde arabe, qui regrette, pour le cas de l'Algérie, l'absence d'un cadre organisé pour les journalistes algériens. « Tant que le ministre de l'Intérieur continue d'avoir le droit de saisir tout journal accusé de porter atteinte à l'ordre public, on ne pourra pas exercer normalement notre métier », précise un confrère tunisien qui souligne la soumission des médias au pouvoir en place. Comme pour la Tunisie et l'Algérie, la presse marocaine fait face à de nombreux obstacles, notamment juridiques. Dans les trois pays, les mécanismes de protection des journalistes sont quasi inexistants. Les journalistes libyens s'étonnent, pour leur part, de l'absence même d'un cadre juridique organisant l'exercice journalistique en Libye. « Nous sommes inclassables, c'est l'absence de transparence ; toute publication est soumise à la commission de censure avant parution, ce n'est pas ce que l'on pourrait appeler un réel exercice du métier », ajoutent-ils. Entre les menaces d'emprisonnement, la précarité de la profession et la difficulté d'arriver aux sources d'information, pour ne citer que ces exemples, le journaliste maghrébin exerce son métier dans la difficulté permanente. C'est pour ne pas se résigner face à l'ordre établi et pour donner toute sa mesure au rôle de défenseur des principes démocratiques que les journalistes de la région ont décidé d'adhérer au réseau des journalistes démocrates du monde arabe.