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L'insoutenable et indicible odyssée-tragédie des migrants aux portes de l'Europe, ou le temps venu des rêves confisqués
Rodéo existentiel
Publié dans La Nouvelle République le 03 - 03 - 2025

«Quand les gens se soucient plus du sort des animaux que des hommes, c'est que l'on commence à traiter les hommes comme des animaux.» (Emmanuel Todd).
«La terre se couvre d'une nouvelle race d'hommes, à la fois instruits et analphabètes, maîtrisant les ordinateurs et ne comprenant plus rien aux âmes, oubliant même ce qu'un tel mot a pu signifier jadis » (Chistian Bobin).
Toujours est-il que, au vu de tant d'improvisations erratiques et replâtrages enchaînés, cela rappelle, à s'y méprendre, d'autres postures politiques ; habituellement décrites comme comparables celles de «l'autruche». Ces réflexes font tâche d'huile et donnent déjà le vertigo à plus d'un puisqu'il est ainsi rapporté que « plus d'un millier de volontaires se sont rassemblés dans l'Etat de l'Arizona (...) dans le but de créer des patrouilles privées le long de la frontière mexicaine pour lutter contre l'entrée d'immigrants illégaux.» (Cf. Le Quotidien d'Oran, 3 avril 2005). Allant même jusqu'à s'arroger et s'octroyer unilatéralement le titre, suffisamment éloquent et évocateur, de «justiciers». En Floride, d'autres groupuscules de miliciens excités parlaient quant à eux de «tirer d'abord (et) discuter ensuite...! » Cela dit, il ne fait aucun doute que c'est bien elle-même qui, ne cessant de claironner et vanter en exhibant ce même modèle soi-disant éclectique avec promesses d'émancipation à l'appui, se permit d'ouvrir la boite de Pandore de ses propres mains en donnant libre cours à tous excès et toutes les dérives tout en chamboulant les structures sociales et culturelles des territoires conquis: « la migration clandestine est la dernière facette du colonialisme. Partout, il y a des pions qui travaillent pour les intérêts de l'Occident.
C'est l'Europe qui a créé un rêve dans la tête des Africains, afin d'éviter qu'ils ne développent leurs pays. Ils sont comme des papillons attirés par la flamme!» (Cf. Libération, 31/10/2019). Tout comme elle est responsable du chaos qu'elle a engendré dans le sillage de son long feuilleton colonial et ses mythes trompeurs diffusés à la pelle. Ce qui n'empêchera pas pour autant certains grosses gueules bien connues, en France en particulier, de parler de «colonisation à l'envers menée par les Noirs et Arabes» (dixit O. Faure, Premier Secrétaire du P.S). D'autant que nombre d'entre les «acteurs» du microcosme politique européen perdent de vue aussi qu'après les avoir tellement appâtés, abusés par son train de vie «mirifique», et pour n'avoir aussi jamais cessé d'en vanter à cors et à cris les contours racoleurs (moyennant tous les vecteurs culturels mis à disposition: livres, films, émissions radiophoniques et télévisées, programmes d'enseignement, mode, musique, cuisine...), voilà qu'elle donne l'impression de s'en mordre aujourd'hui les doigts à pleines dents. Choisissant dès lors de leur tourner carrément le dos sans faire dans la dentelle et s'empressant in fine de leur claquer violemment la porte au nez in fine parce que jugés céans indésirables ; et partant, non intégrables dans son «puzzle/lego» culturel. Mais aussi leur en faisant voir de toutes les couleurs sans leur épargner pour autant aucune des facettes liées aux traitements les plus dégradants et déshumanisants qui puissent être. Concrètement, absolument rien ne manque dans l'impressionnante panoplie dissuasive mobilisée et activée spécialement dans ce sens: moqueries, intimidations, insultes, injures racistes, brimades vexantes et autres sévices en tous genres. Sans oublier évidemment d'autres fourchettes d'abus accompagnés de leur lot d'humiliations fortuites (ou musclées injonctions) débitées, signifiées et projetées à brûle pourpoint comme des balles explosives. De la bouche même d'agents, qui, toutes proportions gardées et à peu de choses près, se trouvent reproduire et reconduire quasiment les mêmes prototypes de procédures punitives expéditives que celles appliquées auparavant dans les anciens territoires colonisés. C'est dire que l'Europe n'a rien perdu de ses vieux et ataviques réflexes protectionnistes. D'ailleurs connues pour être largement appliquées encore dans les banlieues baptisées «territoires difficiles» comme le souligne ce commentaire insipide : «dans les banlieues, des affaires aux circonstances opaques (...) ruinent la confiance des habitants des quartiers envers ceux qui portent l'uniforme, surtout parmi les jeunes.» (in Le Temps.ch du 05/06/2020).
Désormais les banlieues font office des «nouveaux quartiers indigènes» de la France postcoloniale qui, apparemment, a un mal fou à se libérer des démons racistes qui l'habitent de pied en cape et la rongent petit feu. Viennent ensuite s'ajouter d'autres volées de mesquines déplacées et obscènes vulgarités. Jusqu'à finir par transformer chaque instant de leur quotidien en un véritable cauchemar vécu en continu dans des «systèmes/labyrinthes», tels que conçus, générés et mis sur rail par tous les nouveaux minotaures rugissants, gesticulants et paradant dans les venelles du monde actuel. Et dire que certains en sont déjà à imaginer d'autres procédés à mettre en œuvre : «il y a aussi une autre idée, ce serait d'installer des machines à vagues dans la manche pour repousser les frêles embarcations des migrants vers les côtes françaises. Ces projets ont créé un tollé au Royaume-Uni, il n'est pas certain du tout qu'ils soient appliqués, mais cela montre qu'en matière de lutte contre l'immigration illégale, le gouvernement ne se fixe aucune limite, explique le journaliste de France Télévisions François Beaudonnet... » (Cf. France 2, 2oct. 2020). A juste titre, Alice Diop parlera quant à elle de «vies déchirées, terriblement éprouvées (qui) se trainent au rythme insupportablement kafkaïen de l'administration française» (Cf. «La Permanence» http://www.cases-rebelles.org/ septembre 2016). Une manière comme une autre d'attirer l'attention sur ces «traitements intolérables (infligés) à des personnes fuyant tant de souffrances.»
Et comme pour couronner le tout : une errance sans fin doublée d'une poignante désespérance que sans doute même les plus grands récits imagés de la mythologie antique n'ont pu relater, évoquer ou suggérer, dans leurs trames énigmatiques si caractéristiques.
Bref, autant de maltraitances et souffrances malvenues faisant instantanément resurgir à la mémoire des uns et des autres les pires mécanismes de domination oppressive et déshumanisante que ceux engendrés, hier, sous nos propres latitudes par l'infernale et redoutable machine coloniale, qui, pratiquement sans discontinuer s'était déjà exercée à y expérimenter les mêmes procédés félons en prenant un soin extrême à détourner les esprits par moult sornettes et autres mystifications pointées dans l'intention de mieux faire courber les échines de ses victimes désignées. La colonisation a fait vivre l'enfer à nos sociétés en s'acharnant à leur faire perdre tous leurs repères culturels. Ainsi après avoir ruiné et mis sens dessous leurs pays respectifs, l'Occident malabar n'en finit pas de mener en bateau des cohortes entières de migrants. Tels de petits enfants, subjugués et hypnotisés, ces derniers suivent docilement «le joueur de flûte» qui, après s'être emparé de leur esprit frêle, les entraine vers son néant. Et comme tels, restent invariablement sourds à tout appel de la raison sensée, réfléchie. Pourtant seul et unique moyen à même de les amener à s'en détacher afin de changer significativement de cap dans leur périple existentiel, et chemin faisant, prendre un nouveau départ dans le cours d'une vie mouvementée. Du bon pied cette fois-ci !
Sur ce, il va de soi qu'il portera, aujourd'hui comme hier, la responsabilité de tous les impensables dérèglements, déracinements et tant d'autres brouillages sciemment provoqués, par suite du chaos induit pendant la longue nuit coloniale obscurantiste dont il fut à l'origine de bout en bout. Tout comme il portera aussi le poids sur sa conscience blafarde et livide jusqu'au jugement dernier, celle des milliers de morts enregistrés : soit en cours de route, soit engloutis à jamais dans les profondeurs abyssales de la Méditerranée ou de la Manche. Cela dit, il est on ne peut plus clair que ce qui se passe aujourd'hui à vaste échelle, ce n'est aussi en quelque sorte que le sombre retour de flamme de tous les indescriptibles désordres occasionnés et autres invraisemblables chamboulements massifs qu'il aura lui-même contribué à provoquer dans le quotidien d'autres sociétés jusque-là organisées, stables, configurées selon leurs propres normes attitrées avant qu'il ne se ramène en trombe, enfourchant ses grands chevaux mécaniques, pour y semer sur le long terme le désastre, la désolation, les désespérances et plus terribles dommages en rapport.
Invité sur France 2, Bruno Gaccio fera cette déclaration : « Ce qu'on fait à l'Afrique à un moment nous revient à la figure. On a créé une telle misère... ».
De son côté l'essayiste canadienne Naomi Klein ne manquera pas de dire dans ce sens : « Nous avons exporté notre mode de vie fondé sur le gaspillage dans tous les coins du monde», ce qui expliquerait alors doute pourquoi aussi l'on voit certains (comme littéralement hypnotisés par les lumières factices de tous ses flonflons et n'en finissant pas d'en rêver tout éveillés) faire ce pari fou qui les pousse à croire pouvoir atteindre ses rivages, quitte à courir le risque d'y payer le prix fort en cours de route : «Les scènes des embarcations de fortune ployant sous le poids des immigrés clandestins, qui finissent souvent dans les rets des gardes-frontières (...) quand elles ne sombrent pas avec leurs occupants au cours des traversées de tous les dangers sont devenues monnaie courante. Tous les moyens sophistiqués mis en place par les autorités espagnoles pour venir à bout de l'immigration clandestine se sont révélés inefficaces et inappropriés.» (Cf. El Watan, 6 octobre 2005, p.24).
Dès lors, cette Europe claironnante n'est-elle pas aussi tenue d'une manière ou d'une autre d'indemniser aujourd'hui ces pays qu'elle a elle-même contribué à mettre à genoux, puis laissés (lorsque vint pour elle l'échéance de devoir s'en retirer à contrecœur à la faveur des mouvements libérateurs et indépendances recouvrées) en piteux état et en lambeaux.
(A Suivre…)
Mahmoud Ariba
Professeur retraité,
Faculté des sciences sociales,
université Oran2
Bref, littéralement sur le carreau et au bord de la banqueroute asphyxiante. Autrement dit: désorganisés, fracassés, balafrés, dépecés, disloqués, délabrés, ravagés, déboussolés et détériorés. Car, redisons-le, la colonisation n'avait rien d'une promenade ou randonnée pittoresque, mais fut bel et bien une mise à sac; pernicieusement orchestrée et planifiée par un conglomérat d'associations de malfaiteurs au sens littéral et juridique du terme. Et comme tels, agissant alors en bandes organisées, coalisées et synchronisées. Au final, la colonisation ne fut ni plus ni moins qu'une vaste escroquerie et démoniaque arnaque dont eurent à faire les frais nombre de pays africains; livrés aux rapines à grande échelle.
Dans ces conditions, avec les considérables moyens aujourd'hui à sa disposition, cette même Europe n'est-elle pas tenue d'assumer enfin sa part de responsabilité historique en la matière; à savoir: assurer des conditions d'accueil dignes à ces demandeurs d'asile fuyant, par fournées, des contrées devenues invivables pour nombre de ceux cherchant à s'en éloigner à tout prix?
Cela dit si, à sa manière, la mise en branle de l'Union européenne témoignait de l'amplitude des reclassements envisagés dès l'après-guerre (et complémentairement de la perception contractée des nouveaux enjeux déclarés aux horizons du monde contemporain), elle n'en confirme pas moins aussi la surprenante survivance de réflexes agrégatifs ataviques ainsi que la non moins surprenante pérennité de paradigmes foncièrement/abusivement discriminateurs (''racaille'', ''roturier'', ''gueux'', ''fripouille'', ''barbare'', ''canaille'') , tels que se déclinant encore à l'aune des seuls standards/critères normatifs. Et autres «segmentations catégorielles» ''made in Europa'', demeurées pratiquement inchangées à ce jour. C'est un peu comme si les effluves caractéristiques des moites et grises périodes médiévales considérées retrouvaient soudainement vie/force/vigueur dans le cours chaviré, gerbant et tourbillonnant, du temps présent.
En clair, exactement comme ce fut le cas durant la sinistre période coloniale où l'in interdisait déjà aux autochtones de se hasarder à venir se promener dans les quartiers et/ou plages huppés; alors strictement réservés aux seuls spécimens/bipèdes de race blanche et/ou souche européenne.
Comme obsédée à vouloir s'offrir coûte que coûte une nouvelle posture apprêtée (tout en poursuivant inlassablement l'accomplissement de son intégration prométhéenne et s'activant à rénover presque au pas de charge son architecture/topographie géopolitique ; dans l'espoir de pouvoir faire ainsi contrepoids à d'autres ensembles autrement plus imposants) l'Europe semble malgré tout renouer avec un fonds rassis de vieux réflexes indubitablement hyper-protectionnistes. Mais pas seulement puisque, chemin faisant, elle a tout l'air de renouer aussi avec une ''nomenclature mentale'' pour le moins étriquée un peu tuméfiée. Voire gangrenée et rigidement stratifiée qui, indéniablement, semble plonger ses racines dans un registre ; prétendument dépassé, révolu et forclos.
Ceci étant dit, nul doute aussi que toutes les sociétés portent en elles la marque profonde des strates et sédiments à la fois indélébiles et inaltérables de leur passé. Elles ont beau évoluer, se perfectionner ou se métamorphoser au fil du temps, elles n'en conservent pas moins dans les plis ou replis de leur mémoire bien des schèmes et/ou schémas distinctifs de périodes pourtant définitivement dépassées voire considérées depuis longtemps comme révolues. L'évolution récente de l'Europe et sa gestion musclée, de plus en plus restrictive des flux migratoires, confirment on ne peut mieux l'évidence de typologies/catégories contractées et/ou engrangées depuis des lustres, faisant de la ''dé-figuration'' de l'Autre __ par le truchement d'irréductibles, tenaces et quasi-inamovibles préjugés__ un exercice convenu depuis de longues traites déjà. Autrement dit consacré, avalisé, ancré en bien des ''chaumières idéologiques'' y encastrées et enchâssées.
On le voit bien donc, ici et là les idéologies fondamentalement racistes et xénophobes reprennent du poil de la bête, portées comme le sont par des rhétoriques fondamentalement réactionnaires, et pire encore semblent avoir même le vent en poupe. Sous couvert de saccadées bouffées de populismes, extrémismes fracassants et autres «nationalismes ataviques», du moins comme le prouve du reste l'immense boule de neige de la même veine balayant présentement son tracé géographique du Nord au Sud, s'incrustant ou se nichant dans certaines de ses typiques anfractuosités.
Alors quand on entend les uns et les autres parmi tous ses joueurs de ''cornemuse/biniou démagogique'' se revendiquer ostentatoirement des Lumières, et subsidiairement du triomphe de la raison en rapport, on a presque envie de s'esclaffer et se tordre de rire ; tellement la grosse pilule a du mal a passer. Parce que dénotant, dans le même temps, d'un cynisme froid quasiment sans limites. A titre d'exemple: l'Europe de vendre des jouets qui pourraient blesser ses enfants, mais dans le même temps accepte de vendre à l'entité sioniste des millions d'armes qui tuent des milliers d'enfants palestiniens.
Aussi la question se pose-t-elle alors de savoir ce qu'il serait alors réellement advenu de l'Occident, dans les faits, sans les prétendus dividendes référés à «sa modernité»; dont il n'arrête pas de s'en revendiquer à gorge déployée et à tout bout de champ?
Indirectement tout cela témoigne aussi, à l'évidence, d'une faillite certaine de toute l'entreprise éducative dans la mesure où celle-ci s'est révélée inapte à extirper, sinon juguler efficacement tous les résidus/oripeaux non soldés de nombre de sombres clichés sommaires, de chapelets de stéréotypes et/ou préjugés foncièrement négatifs; par ailleurs encore durablement enfouis, lovés, encastrés et/ou scellés dans les esprits des uns et des autres. En sus, de tous les persistants raptus racistes issus de la venimeuse/pernicieuse idéologie coloniale de sinistre/lugubre mémoire; restés actifs sous cape (ou en mode subliminaire) de mille et une façons possibles.
Ainsi apprend-on que lors du siège de Bastogne en pleine tourmente de la guerre qui y faisait rage, et donc aussi «en pleine boucherie, le racisme des Etats-Unis ségrégationnistes trouve encore le moyen d'exprimer sa stupidité. Quelques GI refusent d'être soignés par une infirmière noire», qui plus est engagée volontaire (Cf. RTBF.be 18/12/2019). Ainsi a-t-on pu voir dernièrement une chaîne de télévision publique se fendre d'une proposition malvenue de tester un vaccin en Afrique puis, aussitôt après que les réactions outrées lui tombent dessus, faire rapidement marche arrière et se confondre en excuses plates de mauvais aloi. Mais trop tard le venin avait bel et bien été épanché et nulle excuse ne saurait réparer le fait accompli: «l'Europe, lit-on dans le Temps.ch du 21/03/2020, n'est pas sociale (...), n'est pas humaine. Elle n'est qu'économique.» Ce à quoi vient se superposer cet autre témoignage parachevant le tableau esquissé tantôt et faisant à son tour état d'«une Europe vieillissante, qui ne fait plus assez d'enfants pour renouveler sa population, mais qui en même temps dresse avec rage des barrières contre les forces jeunes et vives qui lui proposent têtes et bras, parce qu'elles ont la peau noire ou brune, et une autre religion. » (SPN).
Plus largement comme tout un chacun peut le constater de visu, l'on assiste à la déhiscence programmée et/ou synchronisée de nouveaux murs atypiques: Berlin, Lampedusa, Sangatte, Calais, l'île de Lesbos, dans la Manche même, et ce concomitamment à l'érection ininterrompue d'autres types de barrières/clôtures (juridiques, numériques...). Toutes imaginées, conçues, concoctées et faites pour: dissuader, terroriser, éloigner, exclure, bannir. Sans le moindre micron d'état d'âme !
Ainsi on ne compte désormais plus les lieux de privation de liberté et autres zones de non-droit dans lesquelles sont enfermés les candidats malheureux à l'exil, y affluant par vagues successives pour se voir être entassés les uns sur les autres dans les plus effroyables et inhumaines conditions qui puissent être: «La Méditerranée, qui était un lieu de connexions, de rencontres d'élites, de marins, de galériens, et le lieu de la «lingua franca», va devenir un espace de séparation géographique et juridique» (Cf. Https://www.franceculture.fr/emissions/matieres-a-penser/des-colonies-35-histoires-dalgerie). Aux joviales, ouvertes et décontractées sociétés d'hier ont peu à peu succédé des sociétés balourdes, compassées, crispées, qui ont tendance à se recroqueviller et se refermer davantage sur elles-mêmes comme des huitres effarouchées. De plus, proliférant sans doute bien plus vite aussi que la chienlit et ayant le vent en poupe, les idéologies destructrices semblent aussi mener grand monde en bateau en poussant les uns contre les autres ; sous l'œil, narquoisement goguenard, de ceux qui, toute honte bue, en revendiquent aujourd'hui ostentatoirement la paternité patentée.
Autre question lancinante: cette même Europe est-elle bien sûre, dans de semblables conditions, d'avoir soldé tout compte avec un passé décrit comme particulièrement ténébreux, comme cela fut précédemment le cas durant son long et ''obscurantissime'' intermède dit médiéval ; et ce faisant d'être vraiment apaisée, tranquillisée, rassérénée dans son corps comme dans son esprit ? Son nouveau rythme d'assemblage olympien qu'elle s'est imposée, à un rythme époustouflant et quasiment au pas de charge, lui assure-t-il véritablement les instruments de la sérénité, la pacification et renouveau tant recherchés sous son toit clairsemé d'étoiles filantes?
En attendant, il y a tout lieu de croire que l'inquiétant climat raciste, qui, au jour le jour s'y profile déjà avec ses lourds et compacts nuages noirs, n'est sûrement pas fait pour inspirer ni encore moins nourrir une confiance ouverte poussée à son paroxysme.
Tout un chacun sait pourtant que depuis la chute mémorable du mur de Berlin en 1989, loin de s'estomper ou décliner, l'épicentre des inquiétudes n'a fait simplement que se déplacer, s'élargir, vers d'autres méridiens géopolitiques. L'on ne peut s'empêcher de rappeler S. Huntington et sa vision (presque à la Nostradamus) sur le choc des civilisations, de même que la focalisation sous-jacente: pleine tout à la fois de non-dits/presque-dits. En particulier sur l'Islam comme nouveau pôle archi-dominant sur l'échiquier géopolitique et/ou géostratégique. Des thèses-brasiers/bûchers/braséros qui n'ont visiblement de cesse qu'à exaspérer et attiser encore davantage les plus vives tensions et plus irréductibles susceptibilités
Du reste en témoignait une fébrilité décuplée _ comparable aux pratiques des temps médiévaux _ avec laquelle, un peu partout, des hommes politiques européens se prirent à réclamer sine die une législation autrement plus sévère, musclée même, pour réglementer l'immigration voire les simples mouvements de voyageurs se déplaçant en toute légalité, mais néanmoins eux aussi déjà confrontés à toutes les mauvaises humeurs capricieuses de ''ronds de cuir'' écumant les travées des chapelles administratives occidentales. «La manière dont on regarde les immigrés en France, qu'ils soient clandestins ou non, c'est comme si on les ignorait dans ce qu'ils sont, des êtres vivants avec des histoires, des traditions, des familles derrière eux. On n'observe qu'un profil et on ne voit qu'une chose, voilà l'immigré, un parasite social. C'est présenter l'étranger comme la cause de toutes les insécurités... ». (Déclaration d'un étudiant camerounais in Le Nouvel Observateur, 4 mai 2006).
Au point qu'il faille se demander si l'écroulement du mur de Berlin en 1989 n'eut pas d'autre fin que celle donnant lieu à l'éclosion/érection d'autres «zones interdites» sous le non moins fallacieux prétexte que l'Europe n'avait plus les capacités physiques d'absorber et supporter de tels flux migratoires .
Mais en fait elle-même, juste auparavant s'était-elle jamais embarrassée de quelconques scrupules lorsqu'elle se permit, des siècles durant, de violer/fouler en toute impunité l'intégrité territoriale, la quiétude, les assises culturelles et l'art de vivre de pays qu'elle a profondément saccagés, balafrés, laminés et ruinés par suite des incalculables dommages portant la marque d'un tyrannique pouvoir colonial dans toute son horreur amplifiée qui les aura aussi défigurés en grandeur nature; puis abandonnés à la va vite et délaissés carrément sur le carreau dans un fâcheux/piteux état lorsque vint l'inéluctable et cruciale échéance des indépendances qui imposa à ses sbires/mercenaires/soudards de devoir plier bagage pour rentrer dans leur bercail matriciel?
Bref, nonobstant de faux airs d'émancipation et/ou progrès avérés tout se passe comme si l'Europe continuait de colporter et trimballer, dans son héritage culturel et outillage mental, un bien curieux bric-à-brac. Où la peur de l'Autre demeure d'une surprenante et permanente traçabilité. Puisqu'un peu partout, à travers les allées du vieux continent, prolifèrent et prospèrent des ''architectes/zinzins'' ; tous férus d'une législation de plus en plus restrictive et contraignante. Y compris parfois contre ses propres «indigènes», comme l'exemple nous en est donnée avec la «réforme de trop» des retraites ; aujourd'hui menée en France tambour battant, à la hussarde et marche forcée.
Ainsi est-il constaté que la contrée en question tout entière se mobilise, avec une fébrilité difficilement contenue, pour ériger toute une succession de barrières afin de se ''protéger'' et se prémunir contre les assauts d'on ne sait quels ''envahisseurs potentiels'' ni quels indésirables ''nouveaux barbares''. En définitive l'espace dit ''Schengen'' ne serait-il pas finalement que le fac-similé (au sens propre et au figuré) d'un château-fort, dans une réplique qui s'affirme en tous points renouer avec ce que ledit édifice représentait en pleine phase médiévale comme environnement expressément destiné à des fins auto-centrées et hyper-protectionnistes? Mais alors, de ses propres barbares de jadis (les Huns, Francs, Burgondes, Normands et autres Wisigoths hirsutes, déguenillés, affamés...) s'en souviendrait-elle un peu quelque part ? Ou bien les sas de sa phénoménale mémoire (d'habitude pourtant si singulièrement foisonnante, fertile et pointilleuse) ne s'entrouvriraient-ils _ à l'occasion _ que subrepticement; auquel cas pour n'avoir aussi à restituer, au bout du compte, que des paramètres préalablement sélectionnés/calibrés/codés pour servir tant d'autres inavouables desseins? Et ses propres migrants, à elle, qui vont vadrouiller vers les pays du Maghreb, du reste de l'Afrique ou d'Amérique Latine pourquoi évite-t-elle précisément d'en parler à satiété comme elle le fait pour d'autres?
C'est pourquoi il y a lieu de rappeler ici à cette même l'Europe qu'elle aussi eut ses propres fournées de ''barbares'': «quand les Francs, à leur tour, franchirent le Rhin et se répandirent en Gaule (ils) passèrent comme un véritable torrent furieux par-dessus toutes les populations qui s'étaient successivement établies dans le pays.» (Cf. E. Durkheim in L'évolution pédagogique en France, PUF 1963, p.41).
Concrètement c'est surtout du côté de ses rivages méditerranéens que l'effort d'édification desdites barrières/ verrous/repoussoirs semble de loin le plus manifeste autant que le plus impressionnant à bien des égards.
Les immigrants africains seraient donc ces hordes blafardes (comme celles déclarées jadis barbares) dont on chercherait à arrêter net, sinon détourner l'interminable et ininterrompu flux. En tout cas, ce ne sont ni les farfelues étiquettes ou autres épithètes aussi formellement inélégantes que disgracieuses (telles que ''nouveaux barbares'', ''nouveaux galériens'', ''nouveaux gueux'', ''laissés pour compte'') qui manquent dans des lexiques ; connus pour faire ouvertement peu de cas de la notion cardinale de «respect de la dignité humaine». Et comporter même, par-dessus le marché, une sacrée dose __ ostentatoirement et abusivement ''technocratiques''__ de cruauté viscérale. D'ailleurs souvent poussée au paroxysme par une foultitude de stratagèmes, simulacres, raccourcis ou autres faux-fuyants utilisés à tour de bras.
Bien plus encore, avec un ''cartésianisme'' de plus en plus rigidement carré, l'Europe s'enfonce davantage dans des catégories désuètes qui, à n'en pas douter, ne manqueront pas d'ajouter encore d'autres tâches noires : dans un pédigrée qui, bien que se voulant présomptueusement ''relooké'', n'en trimballe pas moins de tenaces, persistants et insolubles stéréotypes réducteurs.
Il n'empêche que «l'Europe est moralement, spirituellement, indéfendable» comme le soulignait déjà avec force et panache un Aimé Césaire légitimement remonté/aigri dans son fameux Discours sur le colonialisme. Ce sur quoi vient s'ajouter cet autre constat imparable: « l'Europe n'est pas sociale (…), n'est pas humaine. Elle n'est qu'économique» (Cf. Le Temps.Ch, 20/3/2020).
D'où encore la question suivante: de quelle curieuse philosophie se réclamerait donc aujourd'hui cette Europe qui envisage même de ''parquer'' et ''regrouper''__ pour mieux les trier__ les candidats à l'immigration dans des territoires éloignés; les privant ainsi du droit naturel de se déplacer, se croiser, se brasser, s'embrasser même, et par la même occasion de connaître d'autres horizons tout en poursuivant une aspiration légitime de rechercher de nouvelles expériences voire aussi de changer significativement leur sort d'une façon ou une autre? «Aux arrages continentaux, répondent les faux barrages locaux pour attiser la haine de l'autre et grossir la révulsion des espaces communs (...) La civilisation universelle ne serait donc pas ce bien commun à l'humanité capable de la détourner des enfers puisque, au contraire, la majorité des acteurs de l'histoire contemporaine s'ingénient, chacun à sa façon, chacun avec ses croyances et ses vérités, à cultiver le méfait.» Cf. Le Quotidien d'Oran, 25 juillet 2005, p.24
Pourtant il n'y a pas si longtemps de cela (tout juste aux siècles derniers et même aujourd'hui encore), combien de millions d'Européens sont allés tenter leurs chances vers le nouveau monde ou d'autres contrées attractives; mais aussi pour fuir le climat plus qu'oppressant, gluant et sinistre qui, en ce temps précis, planait déjà sur toute l'Europe grandeur nature? Et de quelle non moins curieuse morale se prévaut-elle aussi pour interdire même à des étudiants de venir continuer et prolonger sur ses rives leur légitime quête de savoir et de connaissance en choisissant comme elle le fait de les astreindre à un fastidieux, épuisant et tout aussi humiliant parcours du combattant? Parmi les mesures dissuasives projetées, l'augmentation radicale des frais d'inscription pour les étudiants étrangers aura sans doute pour effet de vider les campus d'un nombre considérable d'entre eux parce que dans l'incapacité de supporter de tels frais supplémentaires. Si l'on remontait plus loin dans le temps au seuil des universités médiévales, les escouades d'étudiants itinérants et/ou pérégrinants auraient-ils jamais pu quitter les limites de leurs terroirs respectifs si des ''baillis/prévôts'', par trop zélés, avaient concocté les mêmes palettes de restrictions et d'interdictions contraignantes? Face à ce constat, Frédéric Sawicki Professeur de science politique à Paris 1-Panthéon-Sorbonne – Chercheur au CESSP-CNRS – Co-rédacteur en chef de Politix (Revue des sciences sociales du politique) résume les choses à sa manière en déclarant : «il faut appeler un chat un chat: la décision de multiplier par 15 les droits d'inscription pour les étudiants extérieurs à l'Union européenne vise à remplacer des pauvres par des riches et des noirs par des blancs. Elle est profondément discriminatoire» (Cf. Twitter, 24/11/2018).
Le sémillant Marco Polo aurait-il pu, en son temps, entamer franchement son fameux et impressionnant périple s'il avait buté sur de telles travées avant même de lever l'ancre de son port d'attache ? Et son fameux «livre des merveilles» aurait-il jamais pu voir le jour? Mais en écrivant ce qu'il a consigné dans son célèbre récit de voyages, lui-même ne cumulait-il pas déjà dans ses représentations des partis-pris un peu identiques à ceux encore actifs de nos jour? Ainsi évoquant son contact avec les habitants de zanzibar le voit-on faire l'étonnante description que voici: «ils avaient une très grande bouche, des lèvres épaisses et un nez de singe. Ils se promenaient nus et étaient totalement noirs, de sorte que s'ils étaient apparus dans une autre région du monde, on les aurait pris pour des diables»? (Cf. Le Monde Diplomatique, Août 2005).
C'est dire par là aussi l'étonnante et stupéfiante permanence caractérisant de tenaces et irréductibles préjugés qui, en rangées superposées, semblent ancrés, lovés et incrustés, dans les esprits depuis de longues traites déjà.
Idem pour notre emblématique et frétillant globe-trotter maghrébin bien connu, Ibn Battuta qui, lui aussi, passa la quasi totalité de son existence à voyager et parcourir toutes les latitudes d'Ouest en Est, du Nord au Sud? Insatiables et infatigables, ces voyageurs d'exception auraient-ils pu valablement entamer leurs périples exemplaires et renouvelés si d'aventure ils avaient été de ce temps-ci, et dès lors s'étaient trouvés confrontés à une Europe grincheuse telle celle engoncée, coincée, crispée et grabataire dans sa facture/couture actuelle?
Quoi qu'il en soit ils furent aussi à leur manière de téméraires initiateurs de zones d'échanges, audacieux passeurs de messages culturels, entre des univers ; pourtant fort éloignés et aussi différents les uns des autres. Des voyages qui, d'ailleurs, continuent malgré tout de faire rêver et inspirer plus d'un. Montaigne ne disait-il pas que «chaque homme (portait) en lui la forme entière de l'humaine condition»? Lui qui pensait sincèrement qu'«il ne se connaîtrait lui-même qu'en regardant également hors de lui, chez les gens d'aujourd'hui et ceux d'autrefois », ne se voyait que «frottant et limant sa cervelle contre celle d'autrui», que penserait-il au fond de lui-même s'il avait été de ce temps terne/rabougri et s'était trouvé directement confronté à de telles propensions désormais en vogue ici et là aux quatre coins du vieux continent?
Cependant ces distances phénoménales, gigantesques, souvent fabuleuses mêmes qu'ils entreprirent en toute bonne foi (avec une fougue, une passion incomparables à tout jamais) de raccourcir, atténuer ou estomper, ne voilà-t-il pas présentement des partis-pris pluriels ici et là œuvrer en silence et/ou en catimini à les reconstruire, réinstaller, en disséminant leurs graines acides aux quatre vents?
Exit donc le temps des rêves, des somptueuses escapades, le besoin impérieux de prendre l'air, de même que la nécessité d'aller très loin pour arpenter les horizons, vibrer au rythme singulièrement revigorant et stimulant de l'humaine aventure ? Exit également la magnificence inégalée des voyages au long cours qui tout à la fois changent, transforment, embellissent, enrichissent, structurent et construisent les cœurs en les ouvrant vers plus de sagesse, de sérénité, de modestie, d'humilité; en les purifiant comme sous les effets immédiats d'un élixir de jouvence à nul autre pareil! Exit enfin le plaisir que l'on peut/doit légitimement ressentir à franchir des espaces toujours renouvelés pour aller apprendre d'autres langues, voir d'autres systèmes de pensée, d'autres modèles culturels différents! Ces voyages sensés transformer, en profondeur et en positif, car participant à la divulgation d'une sagesse millénaire partagée, seraient donc en voie d'assèchement voire aussi d'éradication tout court. Comme seraient bel et bien comptés aussi les jours des brassages/métissages culturels adossés à l'importance et la richesse des heureuses rencontres, des expériences fortifiantes dans le périple existentiel des jeunes gens, à l'instar de ceux de tous les arpenteurs de nouveaux horizons en quête de contact nourricier, revigorant, aux quatre coins du monde au sens large et divers du terme.
Avec les draconiennes fermetures imposées aux voyages, c'est l'expérience humaine/humaniste qui se voit limitée et diminuée à la portion congrue. Plus de place alors aux délassements revigorants au détour des voyages tonifiants/stimulants et énergisants, ni pour la saine convivialité entre des êtres qui se croisent pour échanger, s'enrichir d'apports nouveau; partager aussi des moments privilégiés, enthousiasmants, à même de créer quelques richissimes affinités de part et d'autre des frontières/clôtures intangibles : «l'homme était fier d'être le fils de la route, fier d'avoir pour patrie une caravane »(Cf. Le Quotidien d'Oran , 2 nov. 2006).
__ Chercherait-on ainsi à tarir à jamais les incroyables, intenses et stimulants échanges humains qui, de tous temps, ont irrigué, fécondé et jumelé les rives de la Méditerranée? L'émerveillement ne serait-il donc plus de mise ni même considéré à juste titre comme le premier pas vers la connaissance mutuelle et la sensibilisation réciproque entre les diverses cultures? Comment dès lors ne pas être sidéré, interloqué, devant la mise en place de ce quadrillage galopant et en coupe réglée, qui semble ne promettre pour l'avenir, si l'on ne prenait garde aux excès toujours probables, qu'un monde de plus en plus bouffi, aigri, concentrationnaire, réducteur et inhibiteur des plus fécondes, franches, sensibilités?
La Cimade (France) s'est interrogée en ces termes : «Moïche Zakharovitch Chagalov, Sara Illinichtna Stern ou Maria Salomea Sklodowska plus connus sous les noms de Marc Chagall, Sonia Delaunay ou Marie Curie auraient-il pu rester en France à l'heure des politiques répressives mises en œuvre par Emmanuel Macron et son Gouvernement?
Après avoir dormi sous des tentes Porte de La Chapelle, ils et elles auraient peut-être été déboutées de leur demande, considérées comme des fraudeuses, enfermées et expulsées du territoire avec une interdiction de revenir en France et en Europe de 5 ans… » (Cf. Twitter, 14/11/2019).
A bien des égards les péripéties imposées aujourd'hui aux paisibles voyageurs dépassent de fort loin celles relatées au détour du fantastique voyage d'Ulysse et ses compagnons de fortune, et donnent à penser que la parabole déclinant les douze travaux d'Hercule (ou celle rappelant le fameux rocher de Sisyphe) ne relève pas non plus du seul ordre de la pure allégorie ni simple détour symbolique.
A voir en tout cas le surplus de zèle aussi excessif qu'intempestif dont il est présentement fait preuve dans le carré géographique d'en face, y compris de la part de récents destinataires d'un portefeuille en charge justement du volet référé à la panoplie sécuritaire (capables même pour l'occasion d'oublier et gommer toutes traces _ pourtant indélébiles et imprescriptibles _ rappelant à la mémoire un statut antérieur de familles d'anciens immigrants ; installés dans l'Hexagone de fraîche date) l'on ne peut que songer au vieux dicton ; rappelant à quel point certains n'en démordent pas de leurs curieuses facéties en s'acharnant à vouloir se montrer ''plus royalistes que le roi''.
Tel est le cas d'un Sarkozy: «immigré lui aussi de la deuxième génération, (qui) s'en prend à des immigrés comme lui, mais venant d'une autre planète spirituelle et temporelle»(Cf. L'Expression, 27 avril 2006) a aujourd'hui l'impudent culot de parler du «droit du sol» à gorge déployée. Et patati patata!
En outre, prenant un malin plaisir à imaginer, concocter et peaufiner des procédures restrictives toujours plus dures et corsées que celles antérieurement mises en place dans les pays; où, lui-même fuyant alors sa Hongrie natale, trouva refuge en qualité d'immigré. Avant que d'en arriver à y exercer, ultérieurement, les plus hautes charges dans la vie politique dans une période relativement récent. Du reste l'empreinte de ses filouteries bassement politiciennes est toujours au-devant de l'actualité, comme le prouvent des dossiers en cours devant les instances judiciaires pour financements illicites de sa campagne présidentielle par des fonds libyens… sa ''gratification'' d'un bracelet électronique témoigne de l'ampleur des dévergondages autant que bassesses de celui qui, lors de son discours à Dakar, avait déclaré sur un ton plein de suffisance et condescendance: « …la colonisation (a) ouvert les cœurs et les esprits des Africains à l'universel et au progrès.»
L'engeance semble se perpétuer puisque le même côté délinquant/trublion est repéré chez l'insignifiant rejeton et pâle histrion dénommé Louis. Lequel, sans même prendre de pincettes, vient tout récemment de menacer de «brûler d'Ambassade d'Algérie» si d'aventure il avait été «aux manettes» (sic!). Ainsi, à ce qu'il paraît, le ''fiston'' rêve-t-il d'être lui aussi aux commandes, comme si la fonction présidentielle n'était strictement prédestinée et réservée qu'à la lignée des mis en cause...
De toute évidence dans cette Europe, qui en vient à appuyer fiévreusement sur le champignon de la plus sévère et rigoureuse intransigeance tous azimuts, il est comme des esprits tourmentés travaillant sans cesse à altérer les liens d'échange, exaspérer davantage les sensibilités des uns et des autres. Ce faisant d'autres chantres d'une technocratie décidément envahissante, apparemment peu tentés par le côté humain et convivial, dévoilent au fil des jours une forme aggravée de la plus moite insensibilité. Agissant le plus souvent au seul déclic des chiffres sonnants et trébuchants, dans toute leur froideur statistique calculée, et avec une logique presque aux formes arrêtés d'un pied à coulisse, ils font ainsi peu de cas, dans leur sémantique usagée et délavée, de dimensions cardinales que toutes les procédures éducatives sensées s'évertuent pourtant à incruster, patiemment et précocement, dans le cœur même de leurs futurs dépositaires.
Comme chacun peut le constater, les tenanciers de l'acte (ou même du discours) unilatéral ne sont donc ni dans une logique de facilitation ni encore moins dans celle d'une cohabitation féconde entre les cultures, pas plus qu'ils ne semblent être en mesure non plus de se hisser au niveau ouvrant sur la reconnaissance de l'Autre comme appartenant de plain pied à l'indivisible et indissociable humanité. Le Monde Diplomatique, novembre 2004, parlait à juste titre de la «construction des barbares», c'est-à-dire la présentation des jeunes issus de l'immigration comme des violents, des antisémites, des sexistes... Et de citer opportunément un P. Bourdieu qui dès 1989, avec la verve énergique et musclée qu'on luit connaissait, écrivait sans détours: «en projetant sur cet évènement mineur, d'ailleurs aussitôt oublié, le voile des grands principes, liberté, laïcité, libération des femmes, etc., les éternels prétendants au titre de maître à penser ont livré, comme dans un test projectif, leurs prises de position inavouées sur le problème de l'immigration». (Cf. Le Monde diplomatique, novembre 2004). Dans les colonnes du même journal (daté de janvier 2006) Emmanuel Levinas nomme ''évènement'' la rencontre avec l'Autre. Il la qualifie même d'évènement fondamental. Il s'agit selon lui de l'expérience la plus importante, celle qui ouvre les plus grands horizons (...). La rencontre avec l'Autre, avec des êtres humains différents, constitue depuis toujours l'expérience fondamentale et universelle de notre espèce».
«Protéger l'Europe de la misère du Tiers-Monde », tel serait donc le fin mot de cette ''bunkérisation'' rampante de la bedonnante et opulente Europe (effectuée et consommée presque en catimini). Laquelle, d'ailleurs, ne cache même plus sa froide et stricte indifférence devant la criante détresse sans nom de ces Trans/SDF abandonnés tristement à leur triste sort. Ou sinon comme pour certains : renvoyés sans ménagements ni égards aucuns vers leurs pays d'origine. Quand ce n'est pas carrément vers les portes brûlantes et torrides du désert pour y être happés et avalés, sous son implacable et impitoyable étreinte. Séance tenante! Ajoutons que d'autres migrants se sont vus confisqués, en plein hiver, tentes et couvertures ; sous l'œil goguenard et méprisant de policiers aux airs de miliciens guêtrés de pied en cape ... A titre d'exemple «l'année 2018 s'est achevée sur ce terrible constat: 433 SDF sont morts sur les trottoirs de France. C'est 30 de plus qu'en 2017 ». (Cf. Les Répliques.com).
Ainsi est-il rapporté en ce sens que «sous la pression de l'Union européenne, le Maroc fait la chasse aux migrants» (Cf. Le Monde, 15/10/2018). Et de fait donc assume un rôle de sous-traitance pour devoir satisfaire aux désidératas des commanditaires officiant/paradant dans les travées institutionnelles feutrées du vieux et sénile continent. Tandis qu'en Libye, en l'absence d'une autorité régulatrice et légitimement reconnue depuis le chaos y engendré par celui émigra des rives Danube vers celles de la Seine, combien d'autres migrants se voient confrontés à tous les aléas de l'infortune dans les camps de regroupement: l'esclavagisme humiliant, la faim, la torture, les viols répétés, les rackets, les mutilations et autres meurtrissures inouïes; en sus de l'incommensurable, extrême, indicible et innommable précarité contigüe au plus déplorable état lié à chacun d'entre eux?
Cependant en Europe même leur calvaire est tout aussi cauchemardesque comme peuvent en témoigner les opérations expéditives menées: «refoulement des migrants en Italie, contrôles discriminatoires, courses-poursuites dans la montagne, propos menaçants...» (Cf. http://www.infomigrants.net/fr/post/12795-19/10/2018). Sans oublier d'autres propos sermonneurs débités par tous les ''ronds de cuir'' prestement mobilisés en de semblables circonstances.
Le comble sera atteint lorsque dans une commune dirigée par l'extrême droite en Italie décida de priver de cantine les enfants étrangers, une décision qui sonnera comme une réplique donnée au refus d'accorder des repas de substitution dans certaines municipalités de la même mouvance/obédience idéologique activant et caracolant actuellement en France. Sans oublier la triste réalité des rétentions arbitraires auxquelles n'échappent même plus des enfants en bas-âge qui se voient subir alors de plein fouet, à l'aube même de leur vie naissante, toutes les maltraitances mal seyantes/malséantes émanant d'institutions carrés ayant pignon sur rue. En l'occurrence ce ne sont donc pas les individus qu'il y a lieu de culpabiliser mais plutôt nombre d'institutions qui ont tout l'air de perdre pied, en plus d'avoir aussi souvent perdu le Nord...
Selon Unicef France, «en France, des milliers d'enfants sont enfermés dans des conditions insupportables en raison du statut migratoire de leurs parents» dans des centres de rétention ; dits parfois aussi «zones d'attente» comme pour atténuer la charge corrosive de la signification qui leur reste apparentée. Ce qui fera dire à Eva Joly: «La rhétorique du gouvernement au sujet de l'immigration fait froid dans le dos.» (Cf. Twitter).
Comme quoi les ''nouveaux minotaures'' sévissant actuellement dans les arcanes du monde politique européen, avec leurs discours musclés tendus comme des arbalètes, ont de quoi susciter les plus légitimes et vives inquiétudes de tout un chacun. D'autant que les conditions misérables, indignes et franchement inhumaines dans lesquelles se voient entassés nombre de migrants/exilés venus s'échouer sur les bords insalubres de Calais ou du canal de Saint-Denis, dans un pays où l'on a tendance à légiférer plus sur la cause animale que sur l'humaine condition proprement dite, incitent à devoir s'interroger sur toutes les zones d'ombre et/ou de non-droit, qui, en tant que telles, viennent assombrir de jour en jour le quotidien de ces nouveaux «damnés/parias de la terre»; que la roue de l'infortune aura conduits, jetés, versés ou balancés vers ces rivages inhospitaliers aux contours de plus en plus froids, verglacés ou vitrifiés: «pour preuve, dans les espaces modernes et civilisés, on accepte bien un chien dans son lit, mais on refuse de partager un trottoir avec un humain» (Cf. Le Quotidien d'Oran, 26/10/2019).
Autant le dire ici sans détours et sans fioritures: à l'exception de quelques rares organisations/associations humanitaires ou individualités au cœur étonnamment battant, accomplissant envers et contre tous ce qu'elles croient être leur devoir, et d'autres salvatrices réactions de solidarité ou soutien actif (comme par exemple lors de grandes catastrophes naturelles survenant quelque part); le constat reste néanmoins que la conscience et la générosité humaines paraissent aujourd'hui sérieusement battre de l'aile face à ce drame de grande ampleur et cette non moins incommensurable tragédie migratoire. Le tout dans un monde souvent décrit comme de plus en plus instable, hostile, dangereux et périlleux à tous points de vue.
L'absurdité atteignant parfois son point/pic culminant lorsque des personnes venant en aide à ces malheureux se voient notifier l'accusation infâmante de «délits d'assistance, de solidarité», et sans ménagements se voient trainées devant la justice; alors même qu'elles estimaient, en leur âme et conscience, n'avoir accompli au fond que ce que leur dictaient leur irréfragable conscience humaine, et subséquemment l'indéracinable, inaltérable et inextinguible sens inné de justice sociale allant de pair avec.
Lors donc, à l'exception de quelques associations activant dans ce sens et menant un travail réellement exemplaire en direction de tous ces infortunés pris au collet, la politique migratoire européenne met à nu les cafouillages d'institutions paraissant pour le moins déroutées, comme prises au dépourvu dans leur propre cul de sac. Soit un peu exactement comme ce fut le cas en mai 1968 où justement parce que n'ayant rien vu venir de l'immense onde de choc en résultant, elles réagirent souvent dans la débandade ou même l'improvisation bâclée face à un mouvement de fond, de grande ampleur; et en définitive par une incapacité criarde quant à le maitriser et gérer efficacement de bout en bout. Pour peu que l'on s'en donne la peine de les identifier aujourd'hui même, les retombées de ce ''mouvement/lame de fond'' (d'ailleurs encore perceptibles à bien des niveaux et étages des sociétés contemporaines) nous rappellent que les institutions sociales sont tenues d'apprendre aussi des leçons de leurs propres faux-pas comme de leurs échecs consommés enregistrés en cours de route.
Sans doute y a-t-il alors lieu de souligner que l'actualité archi-mouvementée (dominée comme elle l'est par des menaces de toutes sortes: attentats, prises d'otages, malaises, marasmes, inquiétudes plurielles et exponentielles...) alimente à souhait et à satiété cette crispation soudaine, si prononcée, qui, par conséquent, vient nourrir et renforcer les vieux et indéracinables réflexes de repli identitaire.
Comme le note à bon escient A. Touraine, «les situations de crise entrainent dans toute société des conduites qu'on peut considérer comme pathologiques» (Cf. Pour la sociologie, Ed. du Seuil 1974, p.41).
Ce faisant d'aucuns croient avoir la main facile en rendant le nouveau contexte international responsable de toutes ces tracasseries et péripéties qui compliquent encore davantage la vie de tous les exilés et damnés/parias de la terre, plus que jamais confrontés aux plus graves violations de leurs droits fondamentaux et soumis à tous les formes d'arbitraires. Le moins qu'on puisse dire, en l'occurrence, c'est que ce vingt-et-unième s'ouvre et inaugure son passage par un alarmisme déferlant immodérément amplifié, n'en finissant pas de traverser sans distinction des sociétés dites ''évoluées'' comme celles en voie de développement (dites parfois aussi ''retardataires''); et dès lors faisant aussi le lit à toutes les surenchères xénophobes de facture autoritariste et/ou totalitaire. A l'image de celles qui, en ce moment même, déferle à travers les allées de l'Europe en la submergeant quasiment de part en part, sans pour autant retenir l'attention de qui de droit et la laissant pratiquement de glace devant des scènes sidérantes montrant la traque incessante de migrants; pourchassés sans répit et confrontés aux pires conditions de vie que l'on puisse imaginer (enfants séparés de leurs parents, incarcérés et ''engrillagés'' dans des cages en acier...).
Comme des bergers criant au loup à tout bout de champ, le constat est que l'on joue aujourd'hui démesurément sur les seuls registres de la peur panique et du désarroi. En sachant par avance que dans tous les inconscients sommeillent déjà des fibres de peurs archétypales qui, tels de mauvais génies enfermés dans des bouteilles, ne demandent qu'à être réactivées pour remonter à la surface en une décuplée et mordante puissance à la moindre occasion, au moindre bruissement ou plus infime froissement. Mais pour autant, se préoccupe-t-on vraiment des incalculables conséquences que cela pourrait avoir pour l'avenir, et d'abord sur la vie en commun au niveau infra ou supranational? Ne sont-ce donc pas là de nouvelles et évidentes formes tranchées d'oppression, d'exclusion, sans bornes?
Il n'en reste pas moins vrai que la gestion, en dents de scie, de ladite problématique migratoire (y compris dans sa version dite clandestine) sous le sceau du seul critère de l'urgence, met aussi à nu une plate déconfiture de systèmes institutionnels archi-engoncés et boursouflés de pied en cape.
Parfois jusqu'à la déraison pointée qui, contrairement à leurs prétentions d'efficacité managériale (sic), se révèlent en vérité dans leur piètre et sordide nudité. C'est-à-dire tout bonnement incapables de cerner comme il se doit et prendre à bras le corps un problème crucial d'une telle envergure.
Ceci étant, que dire encore de systèmes étatiques européens qui en sont venus à interdire aussi de donner des repas aux migrants ; alors que simples bénévoles, avec bien peu de moyens, se mettent en quatre pour honorer le principe cardinal d'une hospitalité agissante à l'égard de tous ces malheureux piégés dans des camps insalubres et des conditions plus que désastreuses? Ces personnes admirables se font un devoir d'entretenir intacte, contre vents et marées, la flamme vive de la fraternité humaine. Ainsi, inlassablement, peut-on les voir battre le pavé pour aller à la rencontre de tous ces déshérités abandonnés à leur sort ; dormant à la belle étoile et exposés à la merci des rudes et terribles morsures de l'hiver ; venant s'ajouter aux maltraitances infligées par des systèmes administratifs sans pitié ni état d'âme.
Cela dit l'Europe d'hier s'était-elle formalisée ou même embarrassée de quelconques scrupules lorsqu'elle eut à lancer, au siècle dernier, ses hordes de sbires, gredins, rebouteux mercenaires de tous poils et acabits aux quatre coins du monde pour: piller, voler, rafler, violer, saccager, détruire, terroriser ; en toute impunité et sans les moindres états d'âme?
La construction même de sa gigantesque puissance actuelle n'est-t-elle pas aussi redevable aux anciens territoires colonisés; pris à la gorge, vampirisés et dépossédés de leurs richesses jusqu'à la lie?
Sa phénoménale mémoire, pourtant d'habitude si éminemment pointilleuse quant il s'agit de remonter assez loin dans le temps pour réactiver ses propres sources gréco-latines ou chrétiennes, conserve-t-elle comme il se doit les chroniques marquantes de ses bateaux-négriers qui venaient prendre livraison de cargaisons entières d'hommes libres, déracinés de leur sol natal et déportés manu militari (enchainés et entassés dans des conditions infrahumaines) sur des distances inimaginables pour un voyage sans retour ; et pire encore: abusivement voués, hélas, à l'esclavage et échangés/monnayés comme de simples marchandises?
Alors exploités et instrumentalisés sans merci, ils serviront pour faire tourner à plein régime les grands centres industriels naissants du monde dit alors ''civilisé''.
Cette même mémoire si experte et habile quant il s'agit encore de remonter allègrement le cours du temps aurait-elle subitement oublié comment, au 19ème siècle, les missionnaires allemands, français, anglais...sillonnaient déjà en long et en large les terres africaines (Namibie, Afrique du Nord, du Sud, de l'Ouest ou de l'Est...), et surtout comment, contrairement aux allégations des chantres d'une laïcité aujourd'hui plus que dévoyée, la religion avait bel et bien servi de cheval de Troie aux démoniaques puissances colonisatrices pour intégrer, embrigader et caporaliser les consciences de populations souvent restées à l'état de prime nature ; c'est-à-dire dès lors: plus vulnérables et plus exposées aux envahisseurs potentiels parce que démunies de moyens significatifs pour se défendre contre des convoitises plurielles?
Des sociétés toutefois mûres, sereines et stabilisées, culturellement parlant, mais que la démoniaque et criminelle entreprise coloniale vint bouleverser, chambouler et déstructurer de fond en comble en venant y inoculer ses plus mortels et dangereux virus idéologiques. Sans oublier la façon honteuse, indigne et peu glorieuse, dont elle-même (l'Europe) s'était impunément appropriée et partagée l'Afrique de bout en bout _ sans états d'âme _ en marchant même sur le corps de ses enfants exterminés, décapités ou alors réduits en esclavage.
A bien des égards le fléau colonialiste prédateur ne fut rien d'autre que du banditisme/gangstérisme pur et dur porté par des Etats grandeur nature, et comme tels ne reculant devant absolument rien pour exploiter, spolier et opprimer à grande échelle d'autres Etats constitués. Mais en revanche, sur le moment encore peu pourvus et/ou outillés en moyens d'autodéfense ou dissuasifs. Contre de telles agressives et belliqueuses incursions ; alors fomentées par toutes les puissances/mafieuses des siècles derniers.
En ce sens la colonisation, en sus de son caractère illégitime, fut aussi une violence démesurément disproportionnée enclenchée par des officines aux allures de bandes organisées. Une colonisation raciste qui avait tous les traits d'un braquage organisé par des Etats mafieux, grandeur nature, contre la souveraineté d'autres Etats. Et qui, loin d'avoir été une promenade pittoresque, fut au contraire un long fleuve de tourments indescriptibles. Tel un méga-cyclone, son passage ravageur a grandement chamboulé et déréglé les conditions de vie des sociétés mises au pas. En prenant les commandes et s'emparant de leurs destinées, cette même colonisation a aussi significativement leur vision/conception du monde.
Le tsunami colonial ayant pris soin de défigurer, désosser et déstructurer, nos sociétés comme nos cultures pérennes. A. Mabankou déclare ne manque pas de déclarer dans ce sens: « Avant la venue des Européens, les Africains avaient une vie quotidienne, comme toutes les régions du monde. Cette vie a été détournée par l'arrivée de cultures qui n'étaient pas portées par le sens de l'hospitalité et de la courtoisie.» Et de préciser encore dans ce sillage: «la colonisation, la post-colonisation ne sont pas l'histoire de l'Afrique mais plutôt l'histoire de la rencontre entre l'Europe et l'Afrique, une histoire violente d'hypocrisie, de mépris, de duperie et d'assassinats» (Cf. LeTemps. Ch, 24/08/2018).
Dans son discours sur le colonialisme (1950), Aimé Césaire ne cache pas son irritation à fleur de peau en déclarant: « moi je parle de sociétés vidées d'elles-mêmes, de cultures piétinées, d'institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties, d'extraordinaires possibilités supprimées. On me lance à la tête des faits , des statistiques, des kilomètres de routes ; de chemins de fer. Je parle de millions d'hommes arrachés (...) à leur terre, à leur vie, à leurs habitudes, à la vie, à la danse, à la sagesse. Je parle de millions d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité, le tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme... »
Sans l'âpre et farouche résistance menée alors par nos valeureux aînés probablement que ce processus destructeur et désintégrateur aurait pu finir par tout emporter. Mais n'en déplaise à tous les valets/bassets en lice (et/ou en laisse), ces dignes aînés hors-pair (d'ailleurs souvent décrits par d'autres comme ayant du ''sang de lion'' coulant dans leurs veines), sans être sortis de grandes écoles militaires ou toutes autres structures de cet ordre, auront tout de même réussi à faire plier la puante et malfaisante bête jusqu'à lui faire toucher genou à terre, puis en dernier ressort battre ridiculement en retraite sans demander son compte. Ainsi pour avoir tourné en bourrique ce même colonialisme mille fois maudit, ces dignes aînés d'hier furent aussi incontestablement, à tous points de vue, des hommes d'exception; de plus parfaitement reconnaissables à leur singulier port altier et digne, leur regard droit, perçant et téméraire. Leurs voix assurées, toujours mesurées, parce que mues, irriguées et animées par un sens aigu des responsabilités portées sur leurs épaules...
Aujourd'hui sévèrement régentée, quadrillée, ceinturée, jugulée et suturée au sein même des Universités européennes jusqu'à l'heure actuelle, L'Histoire coloniale demeurera-t-elle pour longtemps encore un sujet tabou, c'est-à-dire fermement maintenu sous cloche (pour ne pas dire aussi sous clé et enfouie dans le corset) afin de ne pas voir briser les scellés d'un illusoire consensus péniblement et/ou laborieusement construit, mais jusqu'à quand?
Voici aussi pourquoi il ne fait aucun doute que l'Europe actuelle colporte dans ses entrailles de biens lourdes ruminations coupables, et reste aussi profondément travaillée par nombre de réflexes archaïques, n'en déplaise à ses tribuns excités sans doute un peu trop grisés par leur illusoire opulence du moment. Enfin pour avoir enfanté des maladies extrêmement graves comme l'hitlérisme ou le fascisme guerroyant, produit d'authentiques spécimens de racistes déclarés (et d'autres rejetons délirants connus, cotés et classés pour leur bavante et/ou dégoulinante phraséologie avérée) 15, elle reste donc singulièrement marquée par ses empreintes idéologiques résiduelles. Et chemin faisant, ostensiblement traversée aussi par les relents de la suspicion et du rejet systématiques de l'Autre.
Cette Europe qui, traditionnellement, aime cultiver si bien l'esthétique des mots et les flonflons d'apparat ou la valse-musette, n'est-elle pas __ moralement __ tenue de rendre l'ascenseur pour une fois et apporter une aide plus décisive encore au relèvement de l'Afrique en particulier, ce continent admirable face à l'adversité d'hier et d'aujourd'hui, qui, courageusement et dignement, tente de se relever de ses blessures encore vives pour se reconstruire, se transformer, se moderniser tout en essayant de garder pied dans ses fastueuses et non moins fabuleuses racines? Cette belle et incomparable Afrique, qui dans les années soixante au terme de près de deux siècles de domination coloniale sauvage, destructrice et dévastatrice, retrouvait enfin les lumières du jour, et s'éveillait alors, langoureuse et sublime, à la brise revigorante, stimulante, d'une liberté revitalisante enfin retrouvée.
L'Europe, qui aime tant se draper/parer de tous les atours sonnants et trébuchants de: «démocratie», «liberté», «égalité», humanisme», et on ne sait quoi encore comme d'autres slogans superfétatoires gonflés comme des outres pleines jusqu'au ras de la grandiloquente condescendance, ne se laisserait-elle pas quelque part lester/duper/gruger par un mode de vie archi-conventionnel voire un peu pantouflard aussi qui, en vérité, sied ou cadre mal avec l'affirmation dogmatiquement péremptoire de tels principes qu'elle prétend toujours porter ostentatoirement, et défendre bec et ongle? Mais alors qu'on veuille bien nous expliquer pourquoi un pays comme la France encourage-t-il, lui, ses expatriés à s'installer dans d'autres continents, et les considère-t-il comme contribuant au rayonnement de sa culture; ou bien est-ce à dire aussi que l'aspiration à l'autonomie au bout de l'expatriation, aux yeux d'un Occident toujours emmitouflé dans ses sempiternelles certitudes, n'est donc valablement recevable ou envisageable que pour sa seule progéniture mais sûrement pas pour celle des autres ''peuplades'' évoluant dans ses marges périphériques? Ces dernières se voient donc empêchées de découvrir de nouveaux horizons, d'explorer de nouvelles idées et voir de nouvelles dimensions au détour de déplacements profitables à tous points de vue.
Ceci fera dire à Rama Yade: «alors que, depuis plusieurs années, l'Europe et les Etats-Unis ont fait le choix de se protéger des migrations derrière des frontières militarisées, s'interdisant de facto de penser la destinée collective de l'humanité, seule l'Afrique, avec sa jeunesse en perpétuel mouvement, apparaît en capacité d'envisager ce commun. Tel n'est pas le moindre des paradoxes que de voir les pays riches, initiateurs de la mondialisation, la refuser lorsqu'il s'agit de la circulation des hommes, à moins que ceux-ci ne soient leurs propres ressortissants, dès lors pourvus de la capacité d'aller où bon leur semble et même d'y importer le coronavirus!» (Cf. Le Monde, 06/04//2020).
En tout état de cause si aide à l'Afrique il y a aujourd'hui, elle est certainement loin d'atteindre encore les proportions souhaitables et légitimement justifiées par les contraintes impressionnantes rencontrées ici et là dans le continent en question. Alors problème de maturité, de rodage ou de perspective...? Pourquoi pas! En tout état de cause, le fait est que l'Europe dévoile aujourd'hui un regard bien ambigu, sacrément ambivalent et gravement paradoxal car ce même regard n'est absolument pas neutre ni pleinement franc eu égard aux louvoiements, atermoiements et/ou rodomontades, tantôt teintés de condescendance tantôt de bedonnant paternalisme, qui, présentement, caractérisent encore nombre de ses cercles/cénacles politiques attitrés. Bien plus encore l'Europe donne la curieuse et nette impression de vouloir se dédouaner à moindre frais des dures épreuves et autres traumatismes engendrés par la colonisation; dont les séquelles des ultimes reliquats, contrairement à ce que pourraient croire les uns ou les autres, sont loin d'être définitivement pansées, guéries, suturées.
Pour autant, s'était-elle hier formalisée outre mesure des désagréments, déchirements, exactions, et même des pillages ou rapines organisés16, dont elle se rendait ouvertement coupable dans les pays conquis puis dominés pendant de longues périodes; allant bien au-delà d'un siècle voire bien plus encore pour certaines contrées géographiques? Elle s'est rempli les poches en pillant sans compter les sociétés qu'elle avait colonisées sans merci puis exploitées sans répit. En témoignent encore les blessures psychologiques encore visibles dans des sociétés endommagées, lézardées, balafrée, tourmentées, délabrées et laissées presque en lambeaux lorsque prirent fin les horreurs du feuilleton colonial.
Aurait-elle aussi oublié si vite qu'il y a un peu d'un siècle ses propres hordes de débonnaires fuyaient en toute hâte son continent pour aller se déverser et s'agglutiner sur d'autres rivages, notamment ceux africains? Ses propres chroniques ne retracent-elles pas l'itinéraire peu honorable et peu glorieux de sa propre canaille, sa racaille ou sa plèbe, avec le tout-venant de roturiers et autres hurluberlus chiffonnés, poisseux et poussiéreux (selon sa propre terminologie/maison) comme le reproche en est précisément fait aujourd'hui, expressément et manifestement, non seulement aux immigrants clandestins ou aux réfugiés, ces parias des temps modernes jetés sur les routes de l'infortune à travers les déserts et les mers); mais même envers ceux qui, le plus légalement du monde, viennent à transiter momentanément par ses ports et/ou aéroports?17
Ainsi au fil des jours est-il constaté comme un surplus ahurissant de réglementations tatillonnes qui, les unes après les autres, viennent indument bousculer le cours naturel des phénomènes migratoires fondamentalement humains par leur charge tant émotionnelle que culturelle. Chacun se rappelle pourtant qu'à l'époque où il n'y avait absolument pas de visas18, il n'y avait pas foule et, à ce qu'on sache, l'on ne se bousculait aucunement aux portes de l'Europe comme s'ingénie et/ou s'escrime outre mesure cette dernière à en faire courir aujourd'hui le bruit à tout bout de champ. Pourtant à bien y réfléchir encore une fois, l''édification même de sa prospérité et son opulence économiques ne sont-elles pas, à bien des égards, redevables à tous ces pays qu'elle juge aujourd'hui subitement et promptement peu fréquentables ou, sinon, recommandables?
«L'Europe, déclare avec justesse F. Fanon, est littéralement la création du tiers-monde. Les richesses qui l'étouffent sont celles qui ont été volées aux peuples sous-développées»( Cf. Les damnés de la terre, petite collection Maspéro, Paris 1969, p.59). Nos sociétés, en effet, furent pendant longtemps des greniers/cornes d'abondance où, avec une avidité outrageusement décuplée, elle s'était servie impunément sans compter pendant des décennies. Et d'une certaine manière donc furent aussi «la poule aux œufs d'or» grâce à laquelle elle put se remplir les poches à gogo19 et en non stop. Disons-le nettement : la colonisation a pris son pied et étendu son emprise sans jamais demander l'avis des premiers concernés au premier chef.
Encore une fois sa mémoire pourtant habituellement si étonnamment vive et puissamment synchronisée serait-elle devenue à ce point sélective au point de lui faire oublier que tout récemment encore elle ''s'invitait'', en déboulant/forçant les portes chez des peuples autochtones, et s'empressant sans états d'âme de les soumettre aux affres et atrocités plurielles de son implacable étau colonial? Sa libération même du joug nazi (né de ses entrailles) ne doit-elle donc rien aux ''indigènes'' d'hier souvent enrôlés de force et convoyés par fournées entières __baptisés et prestement qualifiés pour la circonstance es-tirailleurs, chasseurs ou spahis__ vers les ''fronts chauds/fronts fournaises'' d'où seulement un nombre infime put en ressortir indemne. Et entre nous dans quel état puisque le plus souvent : blessés, estropiés, éborgnés, mutilés, culs de jatte et/ou invalides pour le restant de leurs jours. Dans cette guerre terrible, l'Algérie a fourni à la France coloniale des milliers de soldats soumis au service militaire obligatoire et, le plus souvent, envoyés au front dans des sections d'assaut. Plus de 175 000 soldats venus d'Algérie participèrent à cette guerre, 26 000 d'entre eux ne reviendront jamais. L'Histoire le retiendra, plus de 150 000 soldats algériens ont été engagés dans le premier conflit mondial et furent présents dans toutes les campagnes de guerre, de la Tunisie à l'Italie, et poursuivirent les combats en Provence, dans les Vosges et libérèrent l'Alsace. Durant toute la période de la guerre, ils constituaient une véritable « réserve » de soldats pour la France coloniale. Les soldats algériens, des tirailleurs, embarqués le 5 août 1914 à Alger, arrivèrent le 15 août à la frontière belge. Ils étaient remarquables pour leur bravoure et leur courage au combat, selon les historiens. Ils étaient reconnus comme des hommes qui combattaient «avec ardeur et beaucoup de bravoure».
Sans le sacrifice de ces farouches combattants algériens (au lieu et place des nouveaux fanfarons de l'Extrême-droite avec des prototypes comme E. Zemmour, Ciotti, Bardella, Menard et consorts) la France aurait-elle pu retrouver sa liberté d'action en un temps si court? Et dès lors, ne se sentirait-elle donc pas redevable, à tout jamais, envers leurs ascendants et/ou descendants?
Ne parlons pas du sort des «oubliés du paquebot Afrique» qui transportait 192 tirailleurs sénégalais et qui sombra dans l'Atlantique non mentionné dans les manuels d'histoire et absent da-droite ns les commémorations cycliques organisées pour se rafraîchir une mémoire pour le moins particulièrement sélective et étrangement tâtonnante ; «à bord, presque autant de tirailleurs africains que de civils partis faire fortune ou chercher une nouvelle vie dans les colonies ouest-africaines, alors promesse d'eldorado. Est-ce parce que le souvenir récent du Titanic, et les séquelles de la guerre, occultent ce nouveau drame, est-ce parce la majorité des victimes ne figurent pas au premier plan de la scène sociale? (...) Qu'est-ce qui fait que cet évènement n'a toujours pas « fait date » (souligné parv nous) sur le plan historique, ni encore intégré pleinement les mémoires collectives?» (Cf. France culture ; 11/10/2020)
D'aucuns aiment rappeler aussi, à bon escient, l'exploitation honteuse des populations de l'ex-Indochine réquisitionnés au titre de main d'œuvre gratuite ou bon marché, et de citer le sort réservé aux milliers de travailleurs (originaires du Viêt-Nam, Cambodge, Laos... ) pendant la tourmente issue de la première guerre mondiale; dont certains alors encore enfants, abusivement sous-payés comparativement à d'autres adultes, serviront dans les arsenaux puis, successivement, dans les secteurs de la sidérurgie et des vastes domaines agricoles. Leurs fiers et distingués descendants mériteraient-ils ainsi de se voir reconduire vers leurs territoires devenus eux aussi singulièrement inhospitaliers et austères? N'ont-ils donc même plus le droit de construire, comme cela se fait souvent à un âge précis, des rêves au demeurant plus que légitimement fondés en ayant la possibilité de parcourir et découvrir les allées du monde pour l'explorer et s'imprégner de ses fastueuses richesses? N'ont-ils donc même plus libre accès, au même titre que d'autres battants, à l'esprit aventurier, entrepreneurial et innovant?
Décidément, c'est une bien drôle et assez curieuse leçon de ''morale rance'' que celle dont nous chauffe/rabat/rabâche les oreilles _ par corbeilles statistiques interposées, bidonnées et/ou mitonnées _ l'Europe grincheuse, maussade et pince sans rire que celle d'aujourd'hui!
Ne se souvient-elle donc même plus de son énorme, incommensurable et inaliénable ''dette de sang'' contractée envers les Maghrébins en particulier et les Africains d'une manière générale?
Un blogueur africain a bien raison de rappeler que c'est bien l'Europe, en mal d'expansion, qui s'est ramenée sur ses grands chevaux en Afrique pour vanter son mode de vie et ses succédanés: «S'ils vous disent de rentrer chez vous, rappelez leur que ce sont eux qui ont décidé de lier leur histoire à la nôtre (et on leur avait rien demandé).» (Cf. Twitter, 8/10/2019).
N'oublions pas d'évoquer ici l'accaparement de terres en Afrique par des entreprises étrangères (Belges, françaises, Suisses...) exploiteuses avec, au bout du processus, des populations appauvries, dépossédées de leurs ressources vitales. Tout cela semblant s'opérer en droite ligne des convoitises d'hier qui avaient abouti au dépeçage en règle des richesses du continent par tous les prédateurs en lice, enrôlés sous la férule de l'effroyable machine coloniale.
A entendre les uns et les autres, parmi tous les ''acteurs/oisillons'' que compte son landernau politique, parler en chœur et à tour de bras de «trier», «sélectionner» et «calibrer» même les candidats à l'immigration, l'on se prend incidemment à penser qu'il ne leur a donc pas suffi d'avoir ''sucé'' _ par ''colonialisme/vampire'' interposé _ toute la sève maîtresse/nourricière des pays conquis, colonisés, opprimés, asservis et aliénés; voici qu'ils rêvent maintenant de continuer à ''pomper'' à distance les jeunes pousses que nos propres systèmes d'enseignement et/ou de formation ont eu pourtant tant de mal et bien des difficultés à préparer et façonner pour leur propre avenir. «Si nous sommes privés de cerveaux, nos pays ne pourront jamais décoller ». Déclaration de Alpha Oumar Konaré, Sécrétaire Général de l'Union Africaine. Cf. Canal Algérie, Journal de 2O heures, 04/04/06)
Dans le même temps, peut-on lire dans l'Expression (30/10/2018), «certains profils sont toujours les bienvenus, logiciel ou pas. Les médecins font partie de la population algérienne, dont «raffole» l'espace Schengen. A méditer.»
Aujourd'hui comme hier, l'Occident maquignon/croquemitaine ne nous conçoit donc que ''moulés'' à son diapason sans nulle autre issue/perspective de rechange; c'est-à-dire indéfiniment ''mesurés'', ''scannés'', ''toisés', ''sondés'', ''évalués'' mais aussi ''soudés'' à l'aune du seul modèle (politique, économique, social, scientifique et culturel) qui est le sien. Pas plus qu'il n'est en mesure de concevoir l'idée que nos sociétés et cultures aient pu développer des caractéristiques spécifiques adaptées à leurs contextes respectifs.
Comme un infatigable, incontrôlable et insatiable joueur de poker entendant vouloir garder à son seul avantage la main courante et obstinément décidé à ne plus la lâcher, il a bien du mal à reconnaître le droit légitime d'autres sociétés à dire aujourd'hui leur mot et tracer leur avenir de leurs propres mains. En vérité lui qui nous a toujours jugé ''hors-norme'' par rapport à sa grille opérationnelle dite de ''l'occidentalement correct'' (et de ce fait semblant prendre même un malin plaisir à déconstruire, un à un, nos patterns culturels) s'acharne mordicus à vouloir sans cesse renforcer et consolider ses propres kits qui lui servent de bornes référentielles.
Quand l'arrogance20 fait à ce point fi de toute nuance respectueuse, c'est reconnaitre alors qu'il n'y a plus de limites d'aucune sorte faites pour réguler l'ordre des choses! Reste alors à savoir quel est le sens d'une culture qui prend plaisir à faire barrage aux accents caractéristiques par lesquels entendent s'exprimer et se définir d'autres cultures: «Ainsi, écrit Théophile Obenga, c'est l'Occident qui décide qui est développé et qui est sous-développé, qui développe et qui doit être développé, et comme le développer. Et comme l'Occident développe la machine en sous-développant l'homme, l'on mesure le danger qu'il y a à partir des langues et problématisations étrangères à l'Afrique et propres à l'Occident.» (Cf. La philosophie africaine de la période pharaonique 2780-330 avant notre ère, l'Harmattan 1990, p.11).
Ce même Occident ne veut donc pas entériner le partage équitable et amiable de rôles dans une approche égalitaire tirant sa substance et son impact d'une vision consensuelle élargie à toutes les cultures en présence. De façon à ce que chacune d'elle soit perçue comme partie prenante dans le vaste et coloré mouvement d'ensemble qu'anime et innerve toute la civilisation humaine de bout en bout.
Toujours arcboutée et droite dans ses bottes/guêtres noires, l'Europe ne nous conçoit que comme de simples pays pourvoyeurs potentiels: hier comme chairs à canon ayant pris part à toutes ses guerres maudites ; aujourd'hui soit comme gros bras saisonniers soit comme ''neurones d'appoint'' destinés à revitaliser, en cas de besoin, une croissance hypothétique; devenue comme chacun le sait, depuis quelques temps déjà singulièrement toussoteuse voire aussi quelque peu atone21.
D'où il y a lieu de se demander alors à nouveau si cette Europe qui, crânement, s'enferre et s'enferme dans son séculaire et persistant narcissisme primaire, a bien soldé tout compte avec ses vieux démons avachis, ses délires racistes, ses résidus idéologiques, ses oripeaux impérialo-colonialistes22 et autres terrifiants réflexes esclavagistes.
En vérité ce pointillisme ''bureaucratico-technocratique'', tel que récemment activé puis mis en branle à l'échelle de son carré géopolitique, ne vise sûrement pas autre chose que de restreindre drastiquement le nombre d'étrangers susceptibles de modifier la donne démographique qui, en l'état actuel des choses, sert au premier chef les intérêts d'un même et puissant lobby, celui ''juif/crif''' pour ne point le nommer qui se taille pratiquement la part du lion aux quatre coins de la planète; fortement assuré comme il est de ne jamais pouvoir être inquiété ou mis en difficulté de quelque façon que ce soit. Du moins tant que durera sa démoniaque/diabolique hégémonie sur l'ensemble des médias dominants et la finance mondiale réunis. Car c'est bien cela qui, faisant présentement sa force, constitue aussi son véritable talon d'Achille. Autant dire que le jour où cessera, pour de vrai, sa prééminence séculaire sur ce plan précis ; alors, immanquablement, disparaîtra de lui-même l'infernal pouvoir aujourd'hui exercé par la maléfique entité sioniste à l'échelle du monde.
En attendant la diabolique entité sioniste fait montre d'une sauvagerie extrême dont les Palestiniens payent, au jour le jour, le prix fort en victimes de tous âges.
Comme dans les films d'horreur où seulement la lumière du jour peut avoir raison des vampires, il faudrait donc maintenir continuellement braqués sur son point ''G'' les projecteurs de la vérité.
Preuve en est que toutes les mesures entrant dans ce cadre l'ont été, au premier degré, par des initiateurs relevant de cette mouvance archi-tentaculaire, dans le seul but qui est celui de continuer à avoir les coudées franches et s'assurer ainsi un train de vie doré et/ou édulcoré à l'échelle du vieux continent. Et de fait, ne disposent-ils pas déjà, comme d'une cerise sur le gâteau, de ''bouquets/panels'' de passeports à tour de bras (avec autant de nationalités différentes) leur donnant toutes facilités et commodités en rapport pour pouvoir se déplacer partout où ils le veulent, quand ils le veulent, et même se dandiner/pavaner comme bon leur semble à travers les cinq continents? Du reste ne contrôlent-ils et supervisent-ils pas aussi nombre de médias (tant publics que privés) ou d'autres rouages institutionnels clés en Europe; comme d'ailleurs aussi en d'autres contextes où, caracolant en pole position quasiment en circuit fermé, ils se passent le relais entre pairs et compères dans les coulisses de toutes les instances de pouvoir?
Enfin, actualité archi-mouvementée du moment oblige, l'on ne peut que relever également cette drôle de vison que celle concoctée ces jours-ci par l'Europe qui, d'un côté, privilégie pour elle-même le resserrement de ses rangs, et de l'autre fait tout pour départager/démembrer, morceler/désagréger (Afrique, Moyen-Orient, Amérique Latine...). Allant encore plus loin, comme pour parachever cet impressionnant dispositif/assemblage par une touche proprement «orwellienne», l'Europe s'est aussi empressée de projeter d'imposer et adjoindre à ses visas Schengen des procédés biométriques23 de plus en plus intrusifs. Etablissant ainsi de facto un saut qualitativement et quantitativement plus proche des terrifiants et angoissants synopsis de science-fiction24 _ façon/sauce Hollywoodienne _ que des nostalgiques ou romantiques épilogues issus des contes sensés voire parfumés de C. Perrault, C. Anderson ou des Frères Grimm...
Ce faisant, cahin-caha, l'Europe se retrouve à butiner dans des pratiques estampillées de la touche autoritariste/totalitariste crue (''touche stalinienne''). Et dans la foulée n'hésitant pas aussi à frapper, ostensiblement, du sceau de délit l'acte même de solidarité ; puisque criminalisant même les sauvetages en mer comme les plus simples mouvements migratoires qui, qu'elle veuille ou non, ont toujours été une constante avérée dans l'histoire du genre humain. Tout comme d'ailleurs observé aussi chez d'autres espèces que compte tout le spectre référé à la biodiversité au sens large du terme.
En définitive, l'enfermement à grande échelle qu'imposent aujourd'hui des Etats européens constitués, avec toutes les malencontreuses interdictions et draconiennes limitations aux déplacements des personnes, dépasse tout simplement l'entendement parce que n'ayant pas d'équivalent dans toute l'histoire antérieure. Indirectement ses nouveaux ''condottières et/ou sénéchaux'' ultranationalistes jusqu'à l'extrémisme bégayant, encouragent à tout va l'autarcie et le repli culturels dans leurs formes les plus extrêmes et endurcies; en ce qu'ils s'affirment en porte-à-faux avec le besoin naturel de l'homme qui est celui de se frotter à des horizons sans cesse relayés, renouvelés.
Que dire enfin face à ces procès médiatiques qui, à l'orée du vingt-unième siècle, s'amusent à livrer en pâture des groupes sociaux (ou ethniques) dont le seul tort est d'être porteurs de faciès brunâtres/noirâtres; jugés sine die incommodants par tous les satrapes débridés et adeptes délurés de la véhémente, gesticulante, ''commissérante'' harangue?
Successivement donc: pendant les deux phases coloniale et postcoloniale, les gens dits du Sud sont mis en demeure de se ''plier'' et/ou se ''soumettre'' aux normes/standards d'un Occident toujours râleur, ronchonneur, raseur de la tête aux pieds, du reste archi-connu pour être si imbu de sa petite personne et féru de son propre modèle jusqu'à la décharge extatique. C'est qu'apparemment, plus que jamais empêtré dans son charlatanisme idéologique galopant, il aime tant jouer encore au ''Caïd/armoire à glace/costaud'' dans ses rapports avec le reste du monde. Lui qui ne jure plus que par son seul dogme capitaliste, ses intérêts matériels les plus bassement égoïstes qui puissent être, et ne raisonne plus qu'en termes de meilleur contrôle de ses frontières. Et dans la foulée n'aime guère aussi voir violer ses propres lois mais prend un malin/sadique/fou plaisir à enfreindre, bousculer, bafouer, malmener et éventrer (façon ''Jack/l'éventreur'') celles en vigueur dans d'autres sociétés ; vis-à-vis desquelles, à ce jour, il demeure irréductiblement bourré de préjugés plus que tenaces.
Certes ce même ''Occident'' bouffi, joufflu et empiffré jusqu'aux ongles aura entretemps réussi à construire une civilisation (souvent décrite comme ''tous feux tous flammes'' et que certains pourraient sans doute même trouver plus ou moins enviable par son côté tape-à-l'œil) ; mais tout de même n'en comportant pas moins aussi, dans ses linéaments et/ou nervures endogènes, les germes aggravés de la paranoïaque, excessive et oppressive suffisance.
Pour preuve: pendant près de six siècles d'affilée il n'aura cessé d'enjoindre aux autres cultures de disqualifier, minorer, abjurer et renier leurs assises culturelles référentielles pour qu'en retour, au lieu et place, soient rapidement intronisées et plébiscitées les siennes propres au premier degré.
De prime abord, il n'a ni changé ni modulé, encore moins nuancé, son discours discriminatoire inflammatoire ni sa forfanterie habituelle. Plus globalement encore, il est permis de penser que si l'Occident s'était contenté de rester dans ses marges, peut-être bien que le monde actuel aurait pu éviter l'assourdissant et désopilant charivari qui, présentement, le fait tanguer/vaciller de fond en comble dans un roulis indescriptible quasiment sans fin. Mais aujourd'hui, désarçonné et sonné comme il l'est par une crise systémique de fond qui érode et taraude (en les liquéfiant, éparpillant et désarticulant) ses certitudes, on le voit cependant un peu à la peine comme acculé, coincé et pris à la gorge. Bref, forcé de réduire significativement sa voilure et à se serrer davantage encore la ceinture car ayant apparemment de plus en plus de difficultés à tenir convenablement la route.
En attendant, il est heureusement constaté que d'autres hommes, dans un admirable, poignant et sublime élan de solidarité, ne se contentent pas/plus de vains mots en l'air, mais n'en finissent pas d'agir concrètement, au quotidien, pour venir en aide aux plus démunis, aux faibles ou déclassés que la roue de la fortune a durement éprouvés.
Oui dans la statique et effrayante morosité ambiante générée par un modèle capitaliste vent debout et tous feux tout flamme, il est heureusement des hommes/battants qui, en leur âme et conscience, choisissent de garder invariablement le cap sur l'humain: cette intangible et irréfragable fibre matricielle qu'ils entendent préserver coûte que coûte et sauvegarder vaille que vaille, n'en déplaise à tous les systèmes/ballots, rigidement fermés, de ce temps grisonnant. Telles, entre autres, ces irremplaçables et incomparables familles d'accueils pour enfants malades venus d'horizons divers qui, souvent après le retour desdits enfants dans leurs pays respectifs, en parlent comme s'ils avaient été les fruits de leur propre chair.
Et en prime en parlent si bien qu'ils en viennent à pleurer à chaudes larmes: avec une intense et intégrale émotion ; tout autant qu'une bouleversante et déchirante spontanéité. On ne peut ne pas faire cas non plus du courage de ces familles qui adoptent des enfants handicapés et assument avec un courage admirable un surplus de responsabilité qui les honore et grandit à jamais. La sérénité visible et lisible sur leurs visages est d'ailleurs à elle seule suffisamment éloquente pour rendre compte des dividendes engrangés, dans leur cœur et leur être, à la faveur de ce magnifique don d'ouverture, partage et respect dû envers l'Autre. Ces images renvoient à la France profonde qui n'a absolument rien à voir avec une politique dictée par le puissant lobby sioniste qui supervise toutes les instances clés et y impose ses vues marquées par un racisme prononcé.
Ainsi sont signalées des «pratiques nouvelles d'hospitalité et de solidarité au sein de la population européenne (ainsi que) des actions collectives spontanées initiées par des volontaires non-politisés...»
Ces témoignages, mentionnés sur Twitter, donnent une idée des enchaînements vécus, au quotidien, par tous les aidants activant sur le terrain de l'action solidaire:
_«Et bien, on a du se battre au tribunal pour obtenir de donner de l'eau aux exilés. C'est inconcevable. »
_« Je me souviens, avant 1989, des miradors et des garde-frontières qui abattaient quiconque tentait de rejoindre Berlín Ouest. Les garde-frontières grecs ont abattu 5 migrant.e.s ces derniers jours. L'Union Européenne est officiellement passée de l'autre côté du rideau de fer.»
Comme dans les récits prenant corps dans la mythologie grecque, des ''Systèmes Augias/Procuste'' ambitionnent de ''calibrer'' les immigrants qui, d'aventure, viendraient s'abriter sous leurs murs, très souvent après un long et épuisant périple, pour s'accorder une courte halte sur le chemin de leurs pérégrinations et mésaventures; et ce sans même se rendre


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