Après une longue maladie, Abdelkrim Souici vient de décéder. C'est avec infiniment de tristesse que ses compagnons et amis du Comité fédéral de la Fédération de France du FLN (1954-1962) apprennent la nouvelle. A Annaba, c'est dans un milieu entièrement acquis aux idées nationalistes que Abdelkrim Souici voit le jour. Avec les adolescents de son âge, il barbouille déjà les murs de la ville d'inscriptions portant le mot d'ordre de l'époque : « Libérez Messali ». Arrêté en 1954, inculpé d'atteinte à la sûreté de l'Etat, il est traduit devant le tribunal... pour enfants, car il est encore mineur. Quelque temps plus tard, on le retrouve comme chef de groupe puis responsable du MTLD en initiation et enfin membre d'un comité national de lutte contre le chômage, créé sous l'égide du parti. Il arrive en France avec l'éclatement de la crise du MTLD de février 1954, ce qui ne va pas favoriser son insertion dans la structure. Aussi, après quelques mois, Abdelkrim retourne en Algérie où il participe au CRUA. Après l'explosion de la Toussaint, il est arrêté puis libéré au bout de quelques jours. Fin novembre, à nouveau la France, il prend contact avec Boudjemaâ Amini et Terbouche, pour l'installation et l'expansion du FLN naissant. Ce dernier est l'homme idoine, puisqu'il est précisément chargé par Boudiaf, au nom de la délégation extérieure du Front, d'implanter le FLN en France. Ainsi, comme tous les anciens du MTLD, Abdelkrim Souici, en tant que militant du Front, va recommencer à la base. En avril 1955, il est nommé responsable adjoint de Doum pour la région parisienne. Responsabilité qu'il va assumer jusqu'en août 1956, date de sa première arrestation. Trois mois plus tard, en novembre, mis en liberté provisoire, il reprend aussitôt sa fonction et travaille à la mise sur pied d'un noyau d'organisation spéciale, chargée particulièrement de l'action armée. Aidé dans sa tâche par Ahmed Amari et Salah Bouchemal (qui tombera quelque temps après sous les balles d'un commando MNA), Abdelkrim va surtout déployer ses activités dans la recherche de l'armement. Un modeste service de logistique est également mis sur pied : dans ce cadre, un de ses hommes, Slim Ryad, envoyé en mission en Italie, réalise avec succès l'opération « Beretta » qui permit l'acquisition d'un lot initial de revolvers, fort utiles à un FLN en voie d'organisation. Moins heureuse sera l'opération « Beretta bis ». Les armes pénètrent sans encombre d'Italie en France. Mais la personne chargée de les ramener en région parisienne préfère les expédier de Nice par le train, en bagages non accompagnés. A Paris, gare de Lyon, lors de manipulations, une lourde valise s'écrase. Son contenu s'éparpille : une cinquantaine de revolvers et leurs munitions jonchent le sol. La police, aussitôt informée, place ses filets et attend. Omar Laloute est arrêté, et d'autres membres sérieusement « grillés ». Le groupe logistique, qui sans être pléthorique comprend d'anciens militants, tels Bachir Boumaza, Brahim (de Souk Ahras) ou Mohamed Zouaoui et bien d'autres encore venant de milieux divers, se propose en outre d'établir quelques filières pour le franchissement clandestin des frontières, de procurer des « planques » ainsi que tout ce qui est nécessaire à une organisation clandestine. Abdelkrim n'aura pas le temps d'atteindre valablement les buts poursuivis. Pour la seconde fois, il est arrêté en août 1957. Devant le tribunal, l'accusation ne peut prouver aucun grief contre lui. La relaxe s'impose. Aussitôt libéré, il apprend que la police le recherche, mais cette fois, semble-t-il, pour l'interner dans un camp... Aussitôt, il rejoint la Belgique puis l'Allemagne, grâce aux filières de l'Organisation. Boudaoud lui propose, en mai 1958, la charge des finances, au sein du Comité fédéral. Par la suite, il supervisera l'action de l'Amicale générale des travailleurs algériens (AGTA) et de la Section universitaire (SU) du FLN. Depuis décembre 1960, il est membre du Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA).Après l'indépendance, il est nommé ambassadeur d'Algérie à Cuba où il résidera pendant plusieurs années. Abdelkrim nous quitte, mais le souvenir d'un patriote sincère demeure, avec nos regrets de le voir sitôt ravi à notre affection. Que Dieu le prenne en son immense miséricorde.