Tout le monde était suspendu à une sortie médiatique de Liamine Zeroual. C'est désormais fait. L'ancien président de la République est sorti de sa réserve hier dans un long communiqué dont les termes savamment agencés ne confirment expressément ni son intention de revenir aux affaires ni son retrait définitif de la vie politique. Liamine Zeroual entame sa déclaration par une brève précision à propos de tout ce qui s'est dit autour de lui ces dernières semaines. « Tout récemment, quelques titres de la presse nationale ont rapporté l'information selon laquelle ma probable candidature à la prochaine élection présidentielle était non seulement envisageable mais assortie de certaines conditions qu'il me paraît inopportun, voire inélégant, de citer dans le présent communiqué », souligne l'ancien chef de l'Etat. M Zeroual reconnaît qu'« effectivement, de nombreux citoyens de différentes régions du pays » lui ont rendu visite et qu'il a eu à aborder avec eux « un sujet en rapport avec la prochaine élection présidentielle, dont ils estimaient l'importance acquise et la perspicacité évidente ». Faisant l'éloge de ceux qui l'ont sollicité pour présenter sa candidature à la prochaine élection présidentielle, Liamine Zeroual s'est dit « très touché par toutes les marques de confiance et ces innombrables élans de sympathie à l'endroit de son humble personne ». Il les remercie vivement et les assure « de sa perpétuelle gratitude, car il est profondément convaincu que leur démarche procède de ce légendaire esprit patriotique de l'Algérien et de sa fabuleuse prédisposition à assumer dès lors qu'il s'agit de défendre une cause en laquelle il croit ». Sans s'exprimer clairement sur la réponse qu'il leur a réservé, car il aurait quand même pu dire oui ou non pour lever définitivement l'équivoque, Liamine Zeroual s'est contenté de faire référence au discours qu'il avait prononcé le 11 septembre 1998 et à un communiqué de presse qu'il a rendu public le 6 janvier 2004. Il s'y trouve, selon lui, « quelques idées-force » se rapportant à son « appréhension de la pratique démocratique, son approche de l'exercice de l'acte politique et ultimement sa perception de l'intérêt supérieur de l'Algérie ». Doit-on comprendre par là que Liamine Zeroual, en se référant à sa déclaration de démission d'il y a plus de 11 ans, qu'il n'a plus aucune intention ni l'ambition de se lancer dans la prochaine compétition électorale ? Tourné dans tous les sens, le texte parvenu hier à El Watan invite à toutes les lectures. Pourquoi l'ancien président de la République a-t-il pris tout le soin de revenir longuement sur le bilan de son règne qu'il défend d'ailleurs magistralement ? Il a ainsi tenu à rappeler surtout la mobilisation de toutes les forces vives de la nation qui ont contribué au redressement du pays tant sur le plan sécuritaire « par le rétablissement de la sécurité des personnes et des biens », que sur le plan politique par « la restauration de l'édifice institutionnel ». Tout en insistant, dans les conditions qui prévalaient à l'époque, sur l'objectif atteint de « la relance de la dynamique du développement économique et social », Liamine Zeroual n'a pas hésité à mettre également l'accent sur ses réalisations sur le plan international. « Malgré son esseulement face à une crise multidimensionnelle des plus redoutables depuis l'indépendance nationale, l'Algérie peut aujourd'hui s'enorgueillir de s'être dignement comportée hier. Elle n'avait en rien entamé ses positions de principe sur les grandes questions internationales. C'est en comptant essentiellement sur ses propres capacités et ses potentialités intrinsèques qu'elle a pu faire un retour mérité sur la scène mondiale », a-t-il déclaré en substance. Forgée par cette période des plus cruciales de son existence, l'Algérie se doit, selon Liamine Zeroual, « de se tourner résolument vers l'avenir et de souscrire à une phase nouvelle empreinte de pratique démocratique réelle et d'un exercice sain de l'acte politique ». De son point de vue, « œuvrer à réaliser l'objectif suprême que constitue un authentique Etat de droit demeure la condition incontournable à satisfaire pour que la notion d'intérêt supérieur de l'Algérie soit le cœur battant de toute décision qui viendrait à engager l'avenir du pays et le devenir de la nation ». C'est en effet tout un programme. Tout compte fait, le communiqué de l'ancien chef de l'Etat pose autant de questions qu'il en résout. Considérant que lorsqu'il avait pris la décision en 1998 d'organiser une présidentielle anticipée, c'était pour donner un ancrage à l'alternance au pouvoir, l'ancien président de la République tient surtout à préciser qu'« un développement économique équilibré et bénéficiant à toutes les couches de la société ne saurait être durable en dehors de la pratique effective de la démocratie et sans le strict respect de la volonté populaire ». Liamine Zeroual est-il donc déçu ? Tout porte à le croire, à en décrypter la dernière séquence de sa déclaration : « En décidant, en toute liberté, de renoncer définitivement à ma carrière politique, j'ai estimé qu'il était temps que l'alternance se concrétise afin d'assurer un saut qualitatif à nos mœurs politiques et à la pratique de la démocratie, tant était loin de ma conception la notion de l'homme providentiel à laquelle je n'ai jamais cru. » Le ton utilisé par le général Zeroual ouvre la porte en effet à toutes les spéculations.