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«Séparé de la société, l'Etat nourricier a tendance à être privatisé» Aissa Kadri. Sociologue, directeur de l'institut Maghreb-Europe à l'université Paris VIII
Les grandes affaires (corruption, détournement, drogue…) qui meublent l'actualité nationale de noms de fils de… dirigeants, cités ou impliqués… Ouled el qiada sont «partout», positionnés sur les sentiers de la rente. Peut-on parler à cet égard de reproduction sociale au sens de Pierre Bourdieu ? Le concept de reproduction sociale tel qu'analysé par Boudieu-Passeron concerne plutôt des sociétés capitalistes développées, relativement stabilisées du point de vue de la structuration des principales classes sociales. Dans leurs travaux, ceux-ci mettent au cœur du processus de reproduction la centralité des institutions éducatives et principalement l'enseignement supérieur. Ils montrent comment le système d'enseignement reproduit les inégalités, les différences entre les classes sociales principales et, plus largement, comment se reproduisent, à travers l'effet des différents capitaux, les mécanismes de domination entre les principales classes et groupes sociaux. Le développement de la connaissance, l'efficience propre de celle-ci sur l'activité productive sont bien au cœur du devenir de ces sociétés. En produisant pour le système économique, le système d'enseignement hiérarchise les individus sur une échelle de pouvoirs, de prestige et de revenus. Et ce sont les enfants des classes supérieures qui en sont les grands bénéficiaires. Ils sont en effet surreprésentés au niveau des Grandes Ecoles qui produisent les élites françaises. Bourdieu parlera même de noblesse d'Etat, en référence à la noblesse de l'ancien régime, pour caractériser ces élites qui sortent des Grandes Ecoles françaises comme l'ENA. Dans le cas algérien, passée la première décennie de l'indépendance, on ne peut en effet parler de reproduction sociale par le système d'enseignement. A l'indépendance, la structure de classe algérienne était plutôt «gélatineuse», faiblement structurée en classes fondamentales. Il y avait bien une petite bourgeoisie mais faible numériquement, quelques petites entreprises familiales, une grande propriété foncière de familles de notabilités qui, pour certaines, avaient perdu leur pouvoir sur les tribus désagrégées. Plus largement, la majorité de la société était composée de la paysannerie pauvre, du lumpenprolétariat occupant les bidonvilles et quartiers populaires des principales villes (entre 30 à 40% de la population sortait des camps de regroupement de réfugiés, de centres d'internement ou de prisons), ainsi que des catégories ouvrières issues du capitalisme colonial, tous sortis exsangues de la répression coloniale. La signification de l'origine sociale, de ses effets (capital culturel et social) n'apparaissait pas à cet égard évidente dans une société sortie du colonialisme où le taux d'analphabétisme avoisinait les 75% de la population. Certes, le haut enseignement supérieur paraissait «embourgeoisé», mais ce ne pouvait être, du point de vue des représentations dominantes, que scorie de la période coloniale. Les élèves issus des classes populaires n'étaient-ils pas au lendemain de l'indépendance en train de «pénétrer la citadelle», par la mise en place de nombreux examens et concours d'entrée substituts au bac, ouverts dès la rentrée de 1962. Cependant, ce sont plutôt des agents de l'administration publique qui vont en bénéficier dans le moment. De fait, l'université restait investie par la petite bourgeoisie, des passerelles paraissaient s'établir entre un Etat naissant, contrôlé par un pouvoir césariste, plébéien, en lien avec une petite bourgeoisie d'administration et l'université apparaissait comme moyen d'élargissement de la base sociale de celle-ci et de consolidation de son emprise sur les appareils d'Etat. On pouvait penser dans ce contexte que la reproduction sociale allait s'amorcer au bénéfice des classes supérieures, bourgeoisie, petite bourgeoisie et grands propriétaires fonciers, dont les enfants étaient les recrues principales de l'université nationale qui venait d'ouvrir ses portes. Sans doute, ce processus a-t-il été engagé, notamment pour la petite bourgeoisie issue de la colonisation, qui possédait une formation lettrée en français ou en arabe, qui a tendu à valoriser l'éducation dans son ascension sociale. Mais cela a très vite tourné court. L'évolution politique et socioéconomique du pays va considérablement modifier les rapports à l'éducation. Le gain facile, l'enrichissement subreptice, conjugués à la dévalorisation des diplômes consécutive à la faiblesse des qualifications et à l'inflation des certifications portée par une massification perçue faussement comme démocratisation, l'absence d'un secteur productif adapté, stable, efficient et la crise structurelle de l'emploi qui en découle, ont contribué à dénuer de sens l'institution d'enseignement et ses effets de certification. La société bloquée, dépossédée des savoirs stratégiques, d'abord par un modèle bureaucratique faussement socialisant, puis par le modèle d'un ersatz d'économie de marché hybride, non maîtrisée, retrouvait ses vieux atavismes : la primauté du pouvoir sur le savoir, de l'assistanat et du clientélisme sur l'effort et le travail, du religieux sur le scientifique, du répétitif sur le novateur. Bon nombre de réactions de chefs de familles encourageant leurs enfants, il est vrai par dépit mais aussi souvent par conviction, à faire des affaires, à «trabendiser» plutôt qu'à étudier, traduisent non des faits isolés mais un état d'esprit qui a gagné progressivement l'ensemble des groupes sociaux. Le désengagement est surtout visible chez les principaux concernés : étudiants du supérieur en majorité résignés, conscients qu'ils sont de leur statut de futur chômeurs et qui cherchent par le système de la débrouille et des relations à s'en sortir. Dans ces conditions tout se passait, à la fin de la double décennie qui a suivi l'indépendance, comme si l'université fonctionnait à vide et que la dévalorisation de la réussite par les études homogénéisait les stratégies des différents groupes sociaux dans le sens d'un désinvestissement éducatif. Le capital culturel, caractéristique de certaines catégories sociales, apparaissait à ce titre de peu d'effet dans la définition, le suivi des cursus de leurs enfants, leur réussite et leurs placements. Il l'était d'autant moins que la société s'inscrivait globalement dans une spirale de la régression culturelle. Dans ces processus de délitement, de désinstitutionnalisation généralisée, des institutions de reproduction sociale, les différentes classes et groupes sociaux s'adaptent en développant des stratégies de contournement. Les classes moyennes cherchent d'autres voies de formation et de salut pour leurs enfants, comme la formation à l'étranger ou dans les institutions locales qui y sont liées. Les bénéficiaires de l'Etat rentier, ceux qui occupent les lieux de pouvoir, principalement la nomenklatura d'Etat, tendent à diversifier, entre affaires, études à l'étranger et institutions de souveraineté (armée, ambassades, représentations d'entreprises nationales à l'étranger) le placement des leurs. Ces stratégies différenciées se conjuguent également avec des pratiques d'alliances matrimoniales, qui participent de la consolidation de l'affirmation de ces catégories sociales dans le champ des rapports de force entre réseaux de pouvoirs en ascension ou dominants. On voit bien au final que le concept de reproduction n'est pas complètement adéquat à des processus en cours qui ne se laissent pas enfermer dans une analyse qui prévaut pour des sociétés où la fonction de reproduction semble s'être globalement stabilisée à travers un processus de translation de chances d'accès aux différents ordres d'enseignement. Il faut, à mon sens, développer, à partir d'une perspective de sociohistoire, une approche anthropologique du système de pouvoir et de sa formation, conjuguée à une ethnographie au quotidien des relations sociales qu'il détermine, afin d'éclairer des logiques et mécanismes qui doivent beaucoup à des fondements et pratiques socioculturels caractéristiques. Plus qu'à Bourdieu, c'est à Ibn Khaldoun qu'il faut revenir pour expliquer les rapports entre pouvoirs et société en Algérie. Il y a ainsi à saisir l'espace du politique, dans ses relations multiformes avec les espaces sociaux, à travers des pratiques sociales et politiques, dont on observe au quotidien qu'elles ne se laissent pas enfermer de manière univoque, ni dans les catégories de la rationalité moderne, ni dans les catégories culturalistes, mais qui procèdent de bricolages, de syncrétisme et du mixte. C'est ce qu'on voit notamment dans l'appel, chez certaines élites, aux zaouias conjugué aux analyses les plus rationnelles sur l'économie monde. Qu'est-ce qu'un tel phénomène (de gestion patrimoniale des affaires de l'Etat) évoque pour vous ? Sommes-nous en présence d'une «nouvelle» classe sociale qui (sur le temps long ou court) investira (ou investi déjà) la sphère politique ? Sans doute y a-t-il à revisiter également les concepts de patrimonialisme et de néo-patrimonialisme, qui n'ont d'ailleurs rien de spécifique ici, puisque nombre de formes de domination néo-patrimoniale peuvent être relevées dans différentes configurations socioculturelles, pour éclairer ce qui favoriserait, dans le cas algérien, les processus informels en cours, la faible institutionnalisation de larges pans des relations sociales, et comprendre la nature des changements qui traversent la société. Pour expliquer rapidement, dans la forme néo-patrimoniale de l'Etat, et c'est de plus en plus le cas en Algérie, la gestion politique et les avantages qui lui sont liés fonctionnent comme des droits privés. S'il y a distinction formelle entre domaine privé et public, celle-ci n'est toujours pas prise en compte dans les actions et décisions. Les pratiques informelles subvertissent alors les règles formelles entre Etat et société dans des formes qui, comme le clientélisme, le patronage, la corruption, le népotisme, caractérisent les rapports sociaux entre gouvernants et gouvernés et tendent à envelopper la société. L'invention du politique, même si elle s'est faite selon le même modèle, n'a pas emprunté les mêmes chemins ici ou là et le modèle de l'Etat-nation pour autant qu'il soit universel est bien ici à réinterroger en fonction d'une histoire particulière et de spécificités culturelles. L'analyse culturelle de ce point de vue, pour autant qu'elle puisse être relativisée, peut être convoquée dans la saisie de la singularité d'expression des formes et de ces pratiques politiques observées au quotidien. On peut ainsi relever que la corruption devient sinon «systémique» du moins un mode de fonctionnement et de relations routinier, comme «mode de vie», qui commande tous les secteurs de la vie sociale. On le voit, on ne peut réduire ici l'Etat à la seule centralité politique et à une vision purement instrumentale. L'Etat rentier est ici au centre de rets de différents groupes, de «açabyas» intéressées au partage de la rente où les modes de circulation comme de communication prévalant entre centres de pouvoirs et périphéries, entre les différents cercles de pouvoirs ne permettent pas de distinguer et d'attribuer ce qui relève de l'Etat profond et ce qui relève du pouvoir apparent. Il faut penser ici l'Etat non comme attribut mais comme un système de relations dans la mesure où tout à la fois il peut déborder l'espace de l'Etat-nation, comme se localiser dans différents lieux, voire au plus bas de la société avec le poids croissant de l'informel. Ce qui fait que dans le cas algérien, l'Etat confine de plus en plus à un type d'Etat informel, où l'arbitrage sur les décisions qui engagent l'avenir du pays varie en fonction des rapports de force du moment et non pas de choix politiques stratégiques. On observe en effet à partir des récents allers-retours en matière de décisions économiques, de politique éducative, de la santé, de politique sociale, sportive, que l'Etat, dans un contexte d'incertitudes sur le centre de prise de décision, est subverti par de nombreuses forces qui le fragilisent davantage, érodent ce qui lui reste de légitimité et mettent au-devant sa seule force coercitive. On ne peut ainsi parler de nouvelle classe pour ces catégories montantes. C'est bien Marx qui disait que «le grossier bon sens assimilait l'appartenance de classe, à la grosseur du porte-monnaie (...)», avant d'ajouter : «Ce n'est pas la richesse qui définit l'appartenance de classe, mais la nature du revenu.» Il ne faut pas en effet confondre richesse et capital et en déduire que l'on a là une classe en soi qui peut s'affirmer pour soi. Ces catégories sociales de jeunes et moins jeunes (fils, neveux, filles, épouses, frères, ou alliés matrimoniaux), souvent prête-noms de personnalités au sommet des institutions de l'Etat, de nouveaux oligarques, de commerçants bazaris, de nouveaux riches du container, spécialistes de l'import/import, dont certains sont en connexion avec des réseaux mafieux, sont loin de constituer une classe entrepreneuriale qui vise le développement national. Cela l'est d'autant moins qu'opportunistes, convaincus que leur situation dépendante de garants et protecteurs au sein de l'Etat, dont la position dans l'Etat par ailleurs soumise à des rapports de force internes changeants, est loin d'être pérenne, leurs priorités alors s'inscrivent toujours dans le court terme : comment s'enrichir et quelle qu'en soit la manière, comment réinvestir à l'étranger les bénéfices subrepticement réalisés. Comment les «rejetons de la nomenklatura» perçoivent-ils, selon vous, l'Etat ? Un «butin de guerre» cessible et transmissible ? Ces catégories pour la plus grande partie d'entre elles relèvent dans leurs comportements de ce que Thorsten Veblen avait décrit comme les pratiques sociales de ce qu'il a défini comme «la classe de loisir», caractérisée par une consommation ostentatoire, d'affichage, gaspillant du temps et des biens. Ces catégories sociales ont en effet des pratiques consuméristes ostentatoires, voire somptuaires ; elles se définissent des lieux de sociabilité dans l'entre-soi, résidences d'Etat, nouveaux quartiers branchés, lieux planétaires courus par la jet-set internationale. Beaucoup de membres de ces catégories, aux aguets quant au niveau du prix du baril, ne pensent pas que l'Etat est cessible et transmissible, mais ils restent assurés que le système, face à des contestations fragmentées et à une opposition divisée et faiblement ancrée dans la société, peut s'autoreproduire indéfiniment, en interne. Cependant conscients que seul l'Etat place et classe, et qu'il permet l'accès aux ressources, une de leurs pratiques, la plus développée, est celle de la rumeur pour faire valoir leur représentation, leurs portiers au sein de l'Etat, à travers des prédictions ininterrompues de remaniements de gouvernement qui ne cessent de se succéder. L'Etat nourricier a tendance à être privatisé et est de plus en plus séparé de la société. On pourrait à cet égard, toutes choses égales par ailleurs, et sans forcer les traits, relever qu'il y a une homologie, des affinités électives entre situation coloniale et situation nationale. Dans les deux cas historiques, il y a de fait une extranéité de l'Etat par rapport à la société et l'accès aux ressources économiques et politiques n'apparaît que comme le fait de pratiques de cooptation, clientélistes, fondées sur des rapports d'allégeance, de fidélité et de soumission. Si nous revenons, à titre d'illustration, sur la question de la reproduction par l'effet de certification, on observe dans une perspective de comparabilité historique, à partir d'une rapide analyse sociologique, que dans une espèce de continuité, les deux systèmes d'enseignement colonial et national ont fonctionné en quelque sorte «à vide». S'agissant du système colonial, les Algériens musulmans, ceux qu'on appelait «les indigènes», ont été faiblement concernés par le haut enseignement supérieur et hormis quelques rares élus du système, cooptés par effet de démonstration pour montrer ce que le système colonial pouvait faire pour les plus assimilés, la majorité rejoignait la masse prolétarisée des «indigènes». Il en est de même dans le système national, en dépit d'un développement massif de la scolarisation, le système d'enseignement fonctionnant par l'échec a produit en masse des diplômés et les dirigeants qui ont occupé l'Etat national ont plutôt ponctionné dans le «vivier» des produits d'un enseignement massifié et idéologisé en privilégiant les critères subjectifs, régionalistes, clientélistes et selon les rapports de force du moment, au détriment des qualifications et des compétences. A terme, la montée en puissance de cette «classe» menace-t-elle de changer la nature de ce même Etat, «égalitaire» à ses origines du Mouvement national ? Pour des raisons historiques, sociologiques et culturelles, la société algérienne est profondément égalitaire. Et le texte fondateur de la Soummam en a pris acte à travers sa revendication d'une République démocratique et sociale. Il y a une fameuse métaphore du langage populaire : «On est tous des enfants de neuf mois», qui fait florès chez les jeunes et exprime le mieux cette soif d'égalitarisme. Cet égalitarisme se manifeste quotidiennement dans le rejet de l'injustice, de la hogra, dans la critique et la défiance vis-à-vis des fortunes qui se font au jour le jour sous le parapluie de l'Etat, et dont la population en reçoit l'écho épisodique, sous forme de feuilletons pour occuper le bon peuple, à travers des scandales qui ne vont pas plus loin que de faire payer des lampistes ou des seconds couteaux de forces tapies au sein de l'Etat. «La nature» de cet Etat, investi par des forces prédatrices et intéressées à la seule réalisation de leurs intérêts de groupes, a déjà changé. Aussi bien ne peut-on parler de menaces d'une classe constituée, mais de forces sociales hétéroclites se constituant en réseaux conjoncturels de différentes catégories au sein et en dehors de l'Etat, qui utilisent les prérogatives de ce qui reste de l'Etat pour s'enrichir et investir à l'étranger, doutant de la pérennité d'un Etat qu'ils écument. On peut penser en effet que ces catégories et groupes sociaux peuvent se constituer en classe et s'approprier l'Etat à des fins de domination de classes dans plus ou moins un long terme, mais encore faudrait-il qu'ils fassent socioéconomiquement et idéologiquement coalescence, qu'ils fassent jonction, surtout autour d'une vision stratégique de l'évolution de l'économie et de la société, tenant compte des contraintes nationales, régionales et internationales. Il faut que se fabrique de l'hégémonie, que s'affirme ce qui pourrait constituer une conscience de classe. Or, si l'on excepte quelques cas ou secteurs, où on observe la transformation des stratégies de certains oligarques qui visent le développement du secteur productif national, la grande majorité de ces catégories sont dans un processus d'accumulation extraverti où «compradorisé». De plus, faut-il encore qu'au plan des valeurs et des idées, des référenciations et identifications, de ce qui relèverait de la fabrication de l'hégémonie de cette classe en devenir, on puisse tenir compte de la question du pluralisme de la société et des identités. Or, on en est loin et les références comme les pratiques restent plutôt enserrées dans un cadre traditionnaliste, où l'appel formel aux principes religieux le dispute à une gestion au jour le jour, en réseau clientéliste de prédation. On pourrait en effet, si cette transformation se confirmait, penser à une évolution vers un modèle turc imparfait, où cette classe économiquement affirmée pourrait être la base sociale et idéologique d'un Etat sultanien. Le modèle coréen du Sud est exclu de fait, pour exigences démocratiques et choix économiques clairs, qui ne sont pas dans l'agenda local. On pourrait également penser à une évolution, l'institution de l'armée devenant un acteur économique central, vers le modèle égyptien d'Etat autoritaire. En attendant, s'il y a changement, la tendance que l'on observe n'est pas celle de l'ascension d'une classe et de l'assise de sa domination, mais bien le dépècement de l'Etat par des groupes parasites qui s'en nourrissent. Et si des réformes structurelles urgentes ne sont pas engagées, on peut courir le risque de voir l'Etat disparaître ou au mieux laisser place à la seule coercition, source de contestations ininterrompues et de mouvements de contre-Etat qui finiront par redéfinir par la violence la carte politique et géopolitique du pays.