Aussi bien à Chlef qu'à Tlemcen, en passant par Skikda ou Tipasa, la mort des soldats dans l'embuscade meurtrière du 30 juillet dernier, dans le massif montagneux de Azzaba, a été un choc pour beaucoup d'Algériens. Selon nos sources, l'attaque de Azzaba, à Skikda, a été menée par au moins une quinzaine de terroristes, qui avaient au préalable surveillé les mouvements de la section de Bissi. De nombreux villages et villes du pays ont vécu cette fin de semaine dans le deuil et la douleur de la perte d'un de leurs fils dans l'embuscade meurtrière de Skikda. Quelques chaînes de télévision ont retransmis les longues processions funéraires, précédées d'un carré d'hommes en tenue d'apparat hissant des cercueils drapés de l'emblème national, sous les youyous mêlés de sanglots. Aussi bien à Chlef qu' à Tlemcen, en passant par Skikda ou Tipasa, l'enterrement des soldats tués dans l'embuscade meurtrière du 30 juillet dernier, dans le massif montagneux de Azzaba, à Skikda, a été une rude épreuve pour beaucoup d'Algériens. Zakaria, Ziane, Oussama, Mohamed Sofiane, Brahim ou encore Aïssa ont tous l'âge de croquer la vie à pleines dents. Eux et tout le reste de la section dont ils faisaient partie ne se souciaient nullement du danger qui les guettait dans ce cantonnement de Bissi, le massif montagneux de Azzaba, en ce début de journée caniculaire du 30 juillet. Mais ils ont été surpris par un déluge de salves d'armes automatiques tirées par un groupe de terroristes, d'une dizaine d'éléments, regroupés pour commettre le carnage. Malgré l'effet de surprise et le nombre élevé des victimes, les jeunes soldats ont pu tenir le coup. Leur riposte a causé des blessures à un certain nombre d'assaillants, retardés d'ailleurs dans leur escapade jusqu'à l'arrivée des renforts. Le bilan est très lourd. Sur le coup, 7 soldats ont trouvé la mort, alors que 14 autres ont été blessés, pour beaucoup, grièvement. La nouvelle a vite fait le tour des réseaux sociaux alors que l'hôpital de Azzaba était assailli par les ambulances. Le mouvement de solidarité envers les victimes prend de l'ampleur au point où les services de sécurité avaient du mal à retenir la foule qui a envahi l'hôpital pour apporter son aide. Durant toute la journée, la polémique sur le bilan de cette attaque prend de l'ampleur, alors que les autorités gardaient un silence de plomb sur l'attaque. Laconique, le premier communiqué émanant du ministère de la Défense nationale tombe en fin de journée. Il évoque une «opération de fouille et de recherche», suscitant davantage de spéculation. «Dans le cadre de la lutte antiterroriste, et suite à une opération de fouille et de recherche dans la localité de Bissi, commune de Azzaba, au niveau du secteur militaire de Skikda, en 5e Région militaire, un détachement de l'Armée nationale populaire a abattu, aujourd'hui 30 juillet 2018, trois terroristes, et a récupéré deux pistolets-mitrailleurs de type kalachnikov, un fusil semi-automatique de type Simonov et six chargeurs garnis de munitions», lit-on dans le communiqué. Aucun mot sur les soldats tombés au champ d'honneur, ni sur les blessés ou les circonstances de l'attaque. Le lendemain, un deuxième communiqué fait état de l'élimination d'un quatrième terroriste, toujours sans évoquer l'embuscade, en affirmant : «Dans le cadre de la lutte antiterroriste et suite à l'opération de recherche et de ratissage dans la localité de Bissi, commune de Azzaba, wilaya de Skikda/5e Région militaire, un détachement de l'Armée nationale populaire a abattu, le 30 juillet 2018, un quatrième terroriste et récupéré un pistolet-mitrailleur de type kalachnikov et une quantité de munitions. Ainsi, le bilan de cette opération, qui est toujours en cours, s'élève à la neutralisation de quatre terroristes et la récupération de trois pistolets-mitrailleurs de type kalachnikov, un fusil semi-automatique de type Simonov et une quantité de munitions.» Le 1er et le 2 août, les chaînes de télévision privées et les réseaux sociaux diffusent les images de cérémonies funèbres des jeunes martyrs dans plusieurs wilayas du pays. Samedi dernier, un troisième communiqué du ministère de la Défense nationale rend publique l'identification des quatre terroristes abattus, en affirmant : «Dans le cadre de la lutte antiterroriste et suite à l'opération menée par un détachement de l'Anp, le 30 juillet 2018, dans la localité de Bissi, commune de Azzaba (...) ayant permis d'éliminer quatre dangereux terroristes (...), il a été procédé à l'identification de ces criminels. Il s'agit de Hamoudi Ammar, dit Abou Derrar, qui avait rallié les groupes terroristes en 1994, Mezhoud Mouaddh, dit Mourad Abou Abed Salem, qui avait rallié les groupes terroristes en 2009, Yousfi Khaled, dit Kaakaa Douaoudi, qui avait rallié les groupes terroristes en 2008, et Bininal Rabah, dit Abdellah El Mettiri, qui avait rejoint les groupes terroristes en 1995. Cette opération s'inscrit dans la dynamique des opérations qualitatives menées par nos forces armées pour assainir le pays du fléau du terrorisme et asseoir la sécurité et la quiétude à travers l'ensemble du territoire.» En faisant le choix de ne pas évoquer les circonstances dans lesquelles ces quatre terroristes ont été abattus et de mettre sous embargo le bilan des victimes de cette embuscade meurtrière, le ministère de la Défense n'a fait qu'ouvrir la voie aux spéculations. Or, tout le monde sait que les massifs forestiers de Skikda ont été et restent toujours des zones de passage, après avoir été une région de repli pour toutes les organisations terroristes, depuis l'AIS (Armée islamique du salut) jusqu'à Daech (que dirigeait El Gouri avant son élimination par les services de sécurité), en passant par le GIA et l'Aqmi. La pression des forces de sécurité autour des phalanges de la mort encore en activité a permis de sécuriser une grande partie de ces étendues forestières, où quelques groupes souvent venus d'autres régions de l'Est, comme Jijel ou encore Tébessa, mais aussi ceux chassés de la Kabylie, comme les éléments de l'Aqmi, ou encore les rescapés de Djound El Khilafa, (Daesh) qui sévissent toujours. En tout, nous précise une source sécuritaire, l'effectif de ces «résidus» terroristes «avoisine la cinquantaine, avec un noyau dur composé d'une vingtaine d'éléments aguerris qui avaient rejoint les maquis durant les années 1990. Ils évoluent en petits groupes de trois à quatre éléments». Pour nos interlocuteurs, l'attaque de Azzaba a été menée par au moins une quinzaine de terroristes, qui avaient au préalable surveillé les mouvements de la section de Bissi. «Les terroristes ont dû surveiller les mouvements de la section, avant de passer à l'action. L'effet de surprise a fait le reste. Mais, il est certain qu'ils ne s'attendaient pas à la riposte des soldats, puisqu'ils ont perdu quelques-uns de leurs acolytes, et ont eu des difficultés à se replier», révèlent nos interlocuteurs. Il faut dire que les assaillants étaient bien préparés, ajoutent nos sources, d'autant que dans leurs rangs se trouvaient l'émir de la région El Tarf, Hamoudi Ammar, dit Abou Derrar, qui avait commencé dans les rangs du GIA, en 1994, et fini par être parmi les plus proches de Droukdel, l'émir d'Aqmi, dont le sort n'est pas connu depuis au moins trois années. C'est pour dire que les jeunes soldats de l'Anp, pris au piège du déluge de feu en ce matin du 30 juillet, avaient en face d'eux des terroristes qui ont passé les trois quarts de leur vie dans les maquis. Malgré cette inégalité des forces, ils ont riposté d'une manière héroïque, pour limiter le nombre de victimes. Les hommages nationaux qu'ils méritent sont un devoir et l'Etat n'a pas à cacher le sacrifice de ses enfants par ces temps où les luttes politico-politiciennes pour le fauteuil d'El Mouradia font rage.