Un sit-in a été organisé jeudi dernier pour s'attaquer à la «maffia du littoral» au moment où une contre-manifestation a dénoncé des «intérêts fonciers inavoués». L'Association pour la protection et la sauvegarde du littoral de la wilaya de Béjaïa, Béjaïa Littoral, a appelé à un sit-in pour jeudi dernier, auquel ont répondu une dizaine de personnes. L'action, organisée pour dénoncer la «maffia du littoral», a été précédée d'un communiqué mis en ligne par l'association, qui va jusqu'à dénoncer l'implication de deux élus municipaux qu'elle ne nomme pas, mais qu'elle accuse de «construire illicitement à Saket et à Tazeboujt, sur la côte ouest». Les représentants de Béjaïa Littoral ont remis au wali par intérim une plateforme de revendications de treize points, où elle implique aussi un «élu de l'APW», concernant la côte est. «Que les maires arrêtent de leurrer la population en émettant des arrêtés et en accusant le manque d'adhésion aux opérations de démolition. Alors que tout le monde sait que le wali en est l'ordonnateur si la demande de réquisition est faite au préalable», écrit l'association dans le document remis au premier responsable de la wilaya. Parmi les treize revendications, il est réclamé «l'exécution effective des arrêtés de démolition des constructions illicites dans tout le littoral» et l'«assainissement de la situation anarchique sur les plages, mais aussi sur la petite île des Pisans, atteinte par le phénomène de l'insalubrité, du fait des bivouacs qui s'y déroulent». «L'actuel wali ne peut ignorer ce dossier de par son poste de secrétaire général. Il a bien exécuté les démolitions de Oued Dass, laissées par son prédécesseur», ont écrit les responsables de l'association. «Le wali est sensible au problème et a affiché sa disponibilité à réquisitionner la force publique, pour peu que les présidents d'APC le sollicitent», déclare à El Watan le président de l'association, Mourad Chabati, à l'issue de sa rencontre avec le wali par intérim. «Le recours à la verbalisation et à la justice ne ferait que retarder les opérations d'assainissement du bâti illicite», estime-t-on à Béjaïa Littoral. En plus de «la délocalisation des squatteurs des plages», l'association a ajouté à ses préoccupations «la fermeture des établissements de ‘‘divertissement'' non agréés», c'est-à-dire les cabarets. Mais cette revendication, mise en valeur sur une des affiches partagées sur les réseaux sociaux, est «décalée», aux yeux de nombreuses personnes qui soupçonnent une «influence islamiste». «Nous avons voulu tenir un seul sit-in à la fois pour les trois problèmes soulevés», nous répond Mourad Chabati. Dossier complexe Au moment même de ce sit-in, un autre a été improvisé quelques pas plus loin par des manifestants un peu plus nombreux que les premiers. Des délégués d'associations relevant du douar des Ath Amar Ouali, dont ceux de Tazeboujt et Ikebiyen, s'y sont rassemblés dans une contre-manifestation. Ils sont convaincus que l'association Béjaïa Littoral «défend des intérêts fonciers inavoués». L'enjeu en tout cas est l'épineux dossier du foncier, notamment à Tazeboujt, dont le conflit connaît encore des tensions. Chaque partie réclame l'exécution des arrêtés de démolition dans le camp adverse. Au moment où la première association court derrière l'exécution des arrêtés de démolition, dont ceux concernant des élus de l'APC, et dont un au moins a été annulé après régularisation, les associations des Ath Amar Ouali tiennent toujours à ce que soit démolies des constructions «illicites» dans la même zone où elles dénoncent un squattage de plusieurs hectares. Une opération de cadastre a été entamée et a été gelée dans le sillage du conflit qui a dérapé dangereusement. Un imbroglio marqué par l'arrestation de sept personnes, après l'incendie de la propriété d'un des occupants des lieux. Condamnés à 7 ans de prison ferme, les sept accusés en été finalement innocentés le 29 avril dernier, après deux mois de détention. Aussi, pour les animateurs de Béjaïa Littoral, le cambriolage des domiciles de deux de leurs responsables est en lien avec leurs activités associatives. Plus de 2000 oppositions ont été enregistrées pour une seule section de plus de 200 hectares, objet du conflit qui persiste. La direction de la Conservation foncière a d'ailleurs été prise d'assaut la semaine dernière par des habitants des Ath Amar Ouali, furieux que l'on ait établi un document foncier malgré l'existence des oppositions. Le dossier est complexe et la direction de la Conservation foncière, celle du cadastre et celle des Domaines ont fort à faire pour démêler l'écheveau.«L'opération du cadastre est gelée jusqu'à nouvel ordre», nous apprend le président de l'Association des Ath Amar Ouali, Farid Aït Mokhtar. Selon lui, aucun document ne peut être désormais établi concernant ces terrains litigieux par les services du cadastre. A l'en croire, l'opération du cadastre sera reprise de zéro. En parallèle, des tentatives de défrichage sont entreprises sur ces terres où des constructions poussent bel et bien. Le 31 juillet dernier, la gendarmerie a arrêté un individu qui était en train de défricher un lot à Boulimat et son bull a été saisi.