Tous les migrants, près de 140, qui étaient encore présents à bord du navire Diciotti dans le port de Catane, en Sicile, ont débarqué dans la nuit de samedi à dimanche, selon des médias. Le ministre de l'Intérieur italien, Matteo Salvini, tenant de la ligne dure sur l'immigration, a donné son feu vert tard samedi soir après l'accord de l'Eglise catholique italienne, de l'Albanie et de l'Irlande de se répartir les migrants qui se trouvaient à bord du navire des garde-côtes italiens. Secourus en mer dans la nuit du 15 au 16 août, ces migrants étaient depuis lundi dernier dans le port de Catane, interdits de débarquement par Matteo Salvini. La décision d'interdire le débarquement de ces migrants a entraîné samedi soir l'ouverture d'une enquête judiciaire contre le ministre de l'Intérieur pour «séquestration de personnes», «arrestations illégales» et «abus de pouvoir». Les migrants secourus par le Diciotti ont relancé la polémique entre Rome et Bruxelles sur la question des réfugiés. Vendredi, le vice-Premier ministre italien, Luigi Di Maio, a confirmé son intention de réduire la contribution de l'Italie au budget de l'Union européenne (UE), faute d'accord à Bruxelles sur le sort de migrants bloqués sur un navire italien. «L'Union européenne a décidé de tourner le dos à l'Italie encore une fois», a écrit Di Maio sur sa page Facebook, ajoutant que son pays n'a alors pas d'autre choix que de «prendre de manière unilatérale, une mesure compensatrice». «Nous sommes prêts à réduire les fonds que nous donnons à l'Union européenne», a-t-il ajouté, soulignant que l'Italie n'accepterait plus d'être «humiliée». Le leader du Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) est suivi le même jour sur ce point par l'autre chef de file de la majorité gouvernementale, la Ligue (extrême-droite), Matteo Salvini. «Si en Europe ils font semblant de ne pas comprendre, étant donné que nous payons abondamment, on fera ce qu'il faut pour payer un peu moins», a déclaré ce dernier à une radio italienne. «Ils veulent les 20 milliards payés par les citoyens italiens ? Qu'ils démontrent de le mériter et qu'ils prennent en charge un problème que nous ne pouvons plus affronter seuls. Les frontières de l'Italie sont celles de l'Europe», a encore écrit Di Maio. En réaction, la Commission européenne a estimé, un peu plus tard dans la journée, que les menaces ne menaient «nulle part». «En Europe, les menaces ne servent à rien et ne mènent nulle part», a déclaré le porte-parole Alexander Winterstein, lors d'un point de presse quotidien de l'Exécutif européen. «Les commentaires peu constructifs n'aident pas et ne nous rapprochent pas d'une solution», a-t-il aussi souligné. Hier, le commissaire européen à la Migration, Dimitris Avramopoulos, a déclaré que les attaques de l'Italie contre l'UE signifient «se tirer une balle dans le pied». «Je pense que les hommes politiques de votre pays devraient comprendre que vous n'êtes pas seuls en ce moment, que l'Europe cherche à vous aider. Au contraire, qui attaque l'UE se tire une balle dans le pied», a-t-il indiqué dans une interview publiée dimanche par le quotidien italien La Repubblica (gauche). Et d'observer : «La Commission dit clairement non aux menaces, elles sont inacceptables. Tous les gouvernements sont tenus de respecter les obligations qui découlent de l'appartenance à l'UE.» Pour le commissaire européen, «nous ne pouvons pas aller de l'avant avec des solutions ad hoc pour chaque navire. Le phénomène migratoire ne s'arrêtera pas rapidement, donc nous devons le gérer tous ensemble comme une unique famille européenne.» Selon les chiffres de la Commission européenne, en 2016 l'Italie a contribué au budget à près de 14 milliards d'euros, et reçu 11,6 milliards au travers de différents programmes européens. En 2017, les fonds reçus par l'Italie se montaient à 10 milliards. Quelque 700 000 migrants ont débarqué sur les côtes italiennes depuis 2014, mais le nombre de ces arrivées avait diminué de plus de 80% à fin juin par rapport à l'an dernier, selon le ministère de l'Intérieur.