Incroyable mais vrai. Les services des Douanes refusent carrément d'appliquer une décision de justice, un jugement exécutoire du tribunal de Boudouaou (Boumerdès) leur intimant l'ordre de libérer la machine destinée à la nouvelle usine du groupe Cevital de production de membranes destinées à la production de l'eau ultra pure. Le jugement dont nous détenons une copie oblige «la défenderesse, l'administration de la douane représentée par le receveur des Douanes, à finaliser les procédures de dédouanement de la marchandise importée par la société par actions Evcon Industry, représentée par son directeur général, et qui est une presse pour plaques sandwich DL 2300 A5 qui se trouve au port sec Atlantic domicilié au quartier Ben Ajal, commune de Boudouaou (Boumerdès), et la restituer immédiatement à la demanderesse sans conditions ni restrictions, tout en l'exemptant de tous les frais liés à son séjour au niveau des entrepôts de la défenderesse qui assume également les frais de justice». «Le tribunal a statué en première instance, publiquement et en présence des deux parties.» Sur la forme : accepter la rectification de la dénomination de la défenderesse à Administration de la douane représentée par le receveur des Douanes de Boumerdès en lieu et place de la direction générale des Douanes représentée par le receveur des Douanes et accepter la requête sur la forme. C'est un parcours du combattant pour ce projet d'une importance économique avérée pour le pays. Le tribunal a écarté l'argument de «l'absence de sa qualité», qu'il a d'ailleurs déclaré «sans objet dès lors que la demanderesse maintient sa demande de rectification de la dénomination de la défenderesse à administration des Douanes représentée par Monsieur le receveur des Douanes de Boumerdès, domicilié au port sec Atlantic Boudouaou. La justice qui a considéré par ailleurs que la requête remplit l'ensemble des prescriptions légales stipulées dans les articles 13, 14 et 15 du code de procédures civiles et administratives», l'a déclarée recevable sur la forme. Sur le fond, il a été jugé que la valeur réelle «de la marchandise qui se trouve au niveau du port sec de Boudouaou, constituée d'une presse pour plaques sandwich de type DL 2300 A5, qui est un prototype fabriqué uniquement, spécifiquement et exclusivement pour la demanderesse, avec des spécificités et caractéristiques techniques qui n'existent dans aucune autre machine, correspond à la valeur déclarée. Tel était d'ailleurs le cœur du litige. Le groupe Cevital avançait qu'il avait importé une presse pour plaques sandwich de type DL 2300 A5, qui est un prototype fabriqué uniquement, spécifiquement et exclusivement pour elle par une entreprise sud-coréenne, avec le concours de plusieurs entreprises européennes ; et que cette machine est d'une technologie de dernière génération, avec des spécificités techniques exceptionnelles et uniques en leur genre, ce qui explique son prix évalué à 2 915 000,00 indiqué dans la facture n°2018/3005». Et les Douanes refusaient le dédouanement de la machine au motif que le montant déclaré ne correspond pas à sa valeur réelle, en se basant sur une expertise réalisée en vertu d'une ordonnance du président du tribunal de Boudouaou. En réalité, «l'expert ignore les spécificités techniques de la machine qu'il a prise pour une machine ordinaire d'injection de plastique, causant des dommages à la demanderesse avec la possibilité d'une détérioration de l'état de la machine, sans compter ses frais de stockage qui augmentent de jour en jour». «Le 3 septembre 2018 et le 30 septembre 2018 deux ordonnances ont été délivrées par ce tribunal de Boudouaou portant désignation de deux experts, Laaribi Tahar et Chebout Hocine, spécialisés dans la fabrication d'équipements industriels, pour se rendre sur les lieux de l'entreposage de la machine objet du litige afin de l'inspecter sur le plan technique, déterminer sa qualité et le type de marchandise qu'elle produit ainsi que son prix réel au moment de son importation en devise». Et le verdict des deux experts a été sans appel. «Les caractéristiques techniques de l'équipement comme étant une machine unique en son genre, la première sur le marché mondial, d'une technologie supérieure dans sa fabrication et qui produit des plaques sandwich pour le traitement d'eau pure et d'une qualité supérieure.» Il a été jugé en effet que «son prix est acceptable, non exagéré et justifié par la conception unique et la qualité des matériaux utilisés». Suite à cela, le tribunal a décidé de répondre favorablement à la demande de Cevital visant à obliger les services des Douanes «à lever la rétention frappant la machine et finaliser les procédures de son dédouanement». «Les frais de justice incombent à la partie perdante.» Mais qui est cette main invisible qui empêche alors l'exécution d'une décision de justice prise au nom du peuple algérien ?