Des sources, et leur recueil au traitement, production, et aux modes de diffusion et distribution. Mais aussi la réception des messages, et au-delà l'archivage et le stockage. Cette révolution fait ressortir trois catégories de tendances : un regroupement de branches de métiers ; des redéfinitions de tâches et disparition d'autres, et enfin la naissance de nouveaux métiers dans le journalisme. Dans le fond de cette dynamique une réalité s'impose de plus en plus : le journaliste est de plus en plus éloigné du terrain. Ainsi le sens même de la profession vient à être corrompu. L'infinie palette de recettes offertes par la Toile au «journalisme assis » l'éloigne de l'évènement et de l'interrogation contradictoire des témoins et des sources. Exit la présence sur les faits, place à l'écriture du « récit ». En même temps que les professionnels eux-mêmes vivent ces nouvelles recettes il y a eu ces dernières années émergence d'un phénomène en le « journalisme de blog » : quasiment chacune et chacun peut devenir journaliste, dans des marges de liberté infinies et pour des auditoires potentiellement illimités. De cette double évolution il y a d'abord la fin du monopole d'information dévolu au journaliste. Mais aussi une érosion des spécificités de la profession de journaliste. Quelle identité professionnelle commune à construire quand les anciennes rédactions s'effritent ? La tendance est à l'exercice de « rédactions virtuelles ». La fin de la confrontation d'idées en conférences de rédaction – devenues obsolètes – ouvre le champ à l'exercice du pouvoir éditorial à une minorité de membres, plus aisément sensibilisés par les managers de l'entreprise. Ainsi les contenus des journaux, et plus encore des radios et télés peuvent être chargés plus facilement de « l'infotainment», magma d'information et de produits de divertissement par la publicité. Dans ce contexte le site angryjournalist.com, lancé par Kiyoshi Martinez se présente comme un premier panorama d'expression libre du malaise actuel des journalistes américains. Un lieu d'épanchement de la colère. Le site aurait reçu pas moins de 3 525 messages anonymes de plaintes de journalistes. Les sujets vont de l'emprise toujours plus forte des annonceurs sur les contenus des médias à la poursuite du sensationnalisme pour marquer la production. Les auteurs soulèvent aussi des questions sur l'augmentation de la charge de travail, le stress et la censure. On relève aussi que les interférences d'Internet sur le mode de production du journalisme commencent à susciter de grandes appréhensions, notamment chez les aînés des journalistes. L'un d'entre eux n'hésite pas à observer : «Je suis en colère contre mon patron qui veut que j'écrive désormais une chronique trois fois par semaine, que j'alimente un blog au quotidien et que je complète mes sujets avec du contenu pour le site». La tentation du remplissage lamine le souci de l'information et ses exigences. Kiyoshi Martinez, créateur du site, ancien rédacteur en chef web de cinq journaux régionaux américains dit s'être inspiré d'une étude d'un professeur de l'Université Ball State (Indiana), qui a montré qu'un journaliste sur trois de moins 34 ans voudrait quitter la profession. Internet, fouetté par les règles du marché, offre décidément un formidable champ à la concurrence. En contrepoint a été immédiatement crée le site des « journalistes heureux » : happyjournalist.com. L'un des correspondants y écrit : «Je suis heureux de pouvoir lireune profession sous influence de l'InternetLe journalisme dans tous ses états angryjournalist.com tous les jours».