Depuis l'annonce des premiers résultats du scrutin donnant Ahmadinejad en tête avec 63% des voix, largement devant son principal rival, les manifestants pro-Moussavi se sont donné rendez-vous devant le ministère de l'Intérieur, Place Fatemi dans le centre de Téhéran. Téhéran (Iran) De notre envoyée spéciale Ces tentatives de regroupement ont donné lieu à un affrontement entre la police antiémeute et les partisans de Mir Hossein Moussavi qui dure depuis samedi. Plusieurs milliers de manifestants ont scandé des slogans dénonçant les résultats officiels et ont incendié des pneus devant le ministère de l'Intérieur. Ils se sont fait entendre aux cris de : « Dictature, dictature ! » ou encore « Démission du gouvernement ». De jeunes manifestants affrontaient la police dans d'autres endroits de Téhéran. « Moussavi, Moussavi, récupère nos votes », scandaient les manifestants, pour la plupart des jeunes, dont certains ont mis le feu à des poubelles. La police a chargé les manifestants à la matraque et a lancé des bombes lacrymogènes sans toutefois pouvoir les disperser. Ailleurs, dans la capitale, des témoins signalaient une banque incendiée. Une grande artère de Téhéran a, par ailleurs, été bloquée par quelque 300 jeunes qui ont formé une chaîne humaine en scandant « Honte à toi Ahmadi, laisse le gouvernement tranquille ! » Mir Hossein Moussavi qui s'était proclamé vainqueur avant le verdict des urnes a tôt fait d'accuser les autorités de « trucage ». Il a appelé ses partisans à travers son site internet à résister au pouvoir du « mensonge et à la dictature ». « Je préviens que je ne céderai pas à cette manipulation », a-t-il promis, dénonçant une « trahison du vote populaire ». Moussavi a également adressé une lettre aux mollahs de Qom réclamant leur intervention. Sa lettre commence par un ironique verset coranique « Ina lillah wa ina ilayhi larajioun » (A Dieu nous appartenons à Lui nous retournons). Une façon de signifier que ce scrutin présidentiel marque « la mort » de l'espoir qu'a incarné d'après lui la jeunesse iranienne. Et de les mettre en garde : « Votre silence peut avoir des conséquences beaucoup plus graves que la fraude électorale. » Et en parlant de silence, les autorités ont décrété un silence radio à Téhéran en bloquant la téléphonie mobile et l'accès à l'Internet, sans doute pour empêcher les pro-Moussavi d'user des moyens technologiques de communication (SMS, MMS, facebook, Youtube…) pour faire partager leur révolte au monde entier. Ni le candidat ni ses conseillers ne pouvaient être joints par téléphone et plusieurs sites Internet pro-Moussavi restaient difficiles d'accès. « Nous avons écrit Moussavi et ils ont lu Ahmadinejad », tonne ironiquement un citoyen iranien, la cinquantaine, dans les rues de Téhéran. Les réactions des Iraniens dans les rues de Téhéran expriment avec force le désespoir : « Pourquoi avez-vous peur ? Pourquoi vous vous cachez ? Nous avons fait une révolution, on peut en faire une deuxième ! », scande à tue-tête une femme de 50 ans, la tête enveloppée dans son tchador noir.