La caravane djelfaouie a fait dans l'innovation pour avoir planté son imposante tente nomade sur la scène du théâtre de verdure du chef-lieu de wilaya. C'est sous elle, ornée à l'intérieur par les fameux tapis naïlis, que les galas en soirée ont été donnés. C'était une façon de bien signifier, cela a été dit, l'identité ethnoculturelle de la région, celle de la confédération des tribus des Ouled Naïl et l'attachement à la mémoire bédouine. Le jour de l'inauguration de la semaine culturelle, on ne pouvait d'ailleurs s'y tromper avec en devanture un artisanat spécifique d'une région à cheval (aux0 deux sens de l'expression) entre une zone steppique des Hauts Plateaux et le Sahara. Il se résume pour l'essentiel au tissage de l'habillement, de la tapisserie et des… tentes. Sous celle évoquée en exergue, assis à la façon de la « gaâda », un orchestre habillé à la mode bédouine, ample abaya immaculée et chech altier, se donne au chant propre aux vastitudes. La gasba est détrônée sans désavantage par le luth dont l'instrumentiste joue à merveille. Les voix sont puissantes mais chargées d'émotion parce qu'il n'est pas donné à quiconque d'entonner l'épique « Aye, yaye ». L'art lyrique donné en spectacle est d'abord chanson d'écoute, ce qui ne correspond pas forcément à l'attente d'un public lorsqu'on ne lui offre que cela, un public qui sort après 22 h pour des raisons festives. Ainsi, le jour de l'ouverture, il a déserté le théâtre de verdure parce que la chanson qui donnait l'illusion d'un chant « ghazal » virait court à l'amour du divin et au prêchi-prêcha à forte dose. Cela ne fait pas bon ménage avec le besoin de distraction recherché des spectateurs. C'est dire si la conception des caravanes culturelles devrait tout autant prendre en considération autant les besoins du public que ceux de la volonté de faire connaître le patrimoine culturel local. Ainsi en-a-t-il été avec Adrar, la précédente caravane qui a déçu pour avoir ramené une troupe qui ne maîtrise pas véritablement l'art de l'Ahlellil et qui en a donné une piètre représentation à un public venu en faire la connaissance. Par ailleurs, les poètes djelfaouis, qui étaient de la partie et qui étaient loin d'être de simples rimailleurs, se sont malheureusement contenus dans le convenu et le conventionnel. Il restait cette troupe réduite à quatre danseurs et qui, malgré la faiblesse du nombre, a tenté de donner la meilleure représentation d'une des rares danses mixtes du patrimoine national, une chorégraphie où le couple homme/femme est au centre. Les rapides sautillements au son de la ghaïta et au rythme des bendir, sont gracieux alors que les bras tendus avec au bout les mains qui font du flafla dégagent une exquise sensualité. Caravane en demi-teinte mais certainement pas la plus faible des dix qui, depuis plus d'une année, ont rendu visite à Témouchent, à leur instar, elle donne à penser que le ministère serait bien inspiré de revoir sa politique des caravanes culturelles.