Mardi 25 juin. Jour férié pour le Qatar. Depuis quelques mois déjà, les médias arabes évoquaient l'idée d'un transfert de pouvoir de l'émir Hamad Al Thani à son fils Tamim, désigné prince hériter en 2003. Mardi matin, cheikh Hamad Al Thani annonce officiellement dans un discours télévisé qu'il remet les clés du pouvoir à son fils, pour laisser place «à la nouvelle génération» et «ouvrir une nouvelle page». C'est en effet une nouvelle page qui se tourne tant à l'échelle du Qatar qu'à celle du Monde arabe, puisque le Qatar est habitué aux coups d'Etat, tandis que la majorité des dirigeants moyen-orientaux ont gouverné jusqu'à leur mort. Si cet acte reste du domaine de la «modernité», quel sera le réel impact sur la politique du Qatar ? Cheikh Tamim prendra-t-il une nouvelle voie politique ou se contentera-t-il seulement de pérenniser celle de son père ? A seulement 33 ans, Tamim est le plus jeune souverain à la tête d'une monarchie, plus précisément de l'Etat le plus riche du monde en matière de PIB par habitant. Pas vraiment débutant, le fils héritier a acquis sa notoriété comme «Monsieur Sport» du Qatar, à la présidence des comités olympiques nationaux et internationaux, et surtout en devenant le propriétaire, en 2011, du club de football du Paris-Saint-Germain. Ces actions ont permis au pays d'appuyer leur rayonnement économique à l'échelle mondiale. En parallèle, le prince se voit attribuer des tâches plus importantes, comme la gestion de l'armée et de la sécurité intérieure, puis dans la diplomatie avec le dossier syrien. Discrétion Dans le livre Qatar, les secrets du coffre-fort, les journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot, spécialistes du Moyen-Orient, décrivent cheikh Tamim comme un homme «réfléchi et posé, ayant un bon sens politique». Si l'on annonce déjà une continuité dans la politique étrangère et intérieure, Tamim devrait toutefois apporter de la nouveauté surtout dans sa posture. Il devrait moins s'afficher, notamment à l'internationale, et s'orientera davantage vers le local. Dans un discours prononcé mercredi à la population, le nouvel émir a insisté sur la priorité qu'il accordera au pays et à son développement intérieur, sans citer le dossier ultra-sensible de la Syrie. Selon l'analyste Abdelkhalek Abdallah, «le rôle prépondérant joué par le Qatar dans les pays du Printemps arabe, y compris en Syrie, devrait s'atténuer». Ce qui ne signifie pas que les relations entretenues avec le Moyen-Orient seront mises de côté. Cependant, Tamim ne devrait pas être aussi impliqué que son père l'était, notamment avec son Premier ministre Hamad Ben Jassem qui ont été des piliers dans le soutien des rebelles syriens. Dans son discours, le nouveau roi a également tenu à préciser que «le remplacement de l'émir ne signifie pas que les défis et les responsabilités changent». Une idée qui annonce déjà la couleur quant à la politique du pays, qui restera inchangée malgré quelques nuances, le nouvel émir pouvant toujours consulter son père lors de ses décisions pour continuer à assurer la prospérité au Qatar. n