Tout le monde a vu juste. La violence se poursuivra en Irak, et rien ne semble l'arrêter, pas même les mesures dissuasives du cabinet irakien. C'est ainsi que l'Irak a vécu hier ce qui est apparemment le pire attentat depuis l'invasion américaine. Au moins 114 personnes ont été tuées et 133 blessées dans une attaque-suicide commise à Hilla, localité du sud de Baghdad. L'attentat a été commis par un kamikaze, a indiqué un sapeur-pompier qui a participé aux secours. La police a expliqué le lourd bilan par le nombre important de personnes qui se trouvaient dans la matinée sur le lieu de l'explosion, un quartier très animé de la ville, à majorité chiite. Des dizaines de fonctionnaires étaient rassemblés pour des visites médicales dans la rue, où des dizaines de petits commerçants proposaient leurs produits à même le sol. Pour le gouverneur de la province de Babylone, dont Hilla est le chef-lieu, « cet acte criminel a visé des citoyens qui n'ont aucune relation avec l'armée et la police et qui ont choisi de vivre en paix ». Le directeur de la police scientifique, Thamer Sultan, a indiqué que la voiture utilisée dans l'attaque avait été bourrée de plusieurs dizaines de kilogrammes de TNT et de nombreux obus de mortier, pour « faire le maximum de victimes ». Dans cette région au nord et à l'ouest de Baghdad, cinq Irakiens, dont trois soldats et un traducteur, ont été tués dans une série d'attaques alors qu'un soldat américain a été tué dimanche à Baghdad. Dans le même temps, apprenait-on, 211 rebelles présumés ont été arrêtés dans la province d'Al Anbar, à l'ouest de Baghdad, depuis le lancement de l'opération américaine River Blitz le 20 février dans cette région, selon l'armée américaine. L'un des demi-frères du président déchu Saddam Hussein, soupçonné de financer la rébellion, a été capturé « il y a trois jours » sur la frontière avec la Syrie, ont affirmé de hauts responsables irakiens, sans vouloir en préciser les circonstances ni se prononcer sur une éventuelle participation de Damas, au lendemain de l'annonce de la capture de Sabaoui Ibrahim Al Hassan, ancien chef du tout-puissant service de renseignement. « Sabaoui Ibrahim Al Hassan a été capturé à la frontière syrienne il y a trois jours », a indiqué le chef du service de renseignements du ministère de l'Intérieur, Hussein Ali Kamel, ajoutant que l'ancien responsable « effectuait de fréquents va-et-vient entre l'Irak et la Syrie ». A la question de savoir si la Syrie avait joué un rôle dans sa capture, il a répondu : « Peu nous importe si les Syriens ont mis ou pas la pression sur lui, ce qui est important, c'est qu'on l'ait capturé. » Le conseiller à la sécurité nationale Mouaffak Al Roubaï n'a pas confirmé ni infirmé une coopération syrienne. « Il y a tant de criminels qui commettent des attentats terroristes en Irak et ils sont toujours en liberté en Syrie », a-t-il affirmé tout en souhaitant que Damas se montre « plus coopératif » pour livrer ces suspects. Hassan figurait à la 36e place sur la liste américaine des 55 personnalités les plus recherchées de l'ancien régime. Malgré cette guerre, les tractations en vue de la répartition des postes au sein du prochain cabinet se pousruivent. En ce sens, le chef du Parti islamique, la principale formation sunnite du pays, Mohsen Abdel Hamid, a apporté son soutien à la candidature du Kurde Jalal Talabani au poste de président. La liste d'alliance kurde, qui a remporté 75 des 275 sièges de l'Assemblée nationale le 30 janvier, poursuivait ses négociations avec la liste chiite de l'Alliance unifiée irakienne, qui a raflé 140 sièges, pour la formation du nouveau gouvernement. Mais en fin de compte, que pourra le prochain cabinet ? Compter les morts très certainement, mais ce n'est pas ce que les Irakiens attendent.