Lorgnant tous les jolis minois des prétendantes au titre de Miss France, la France a prouvé samedi soir qu'elle ne se regarde pas le nombril. Lyon (France) De notre correspondant L'accession de Malika Ménard, 22 ans, au prénom « exotique » et au nom bien local, se voulait un exemple de mixité aboutie dans l'Hexagone. Sur le trône de pacotille de la plus belle Française, tout le monde regardait cette belle brunette aux yeux bleus qui représentait la Normandie, comme le produit de ces mélanges de plus en plus fréquents ces dernières décennies entre Maghrébines et Français ou – ça marche aussi dans l'autre sens –, entre Maghrébins et Françaises. Sauf que l'imagination autour d'un prénom a joué des tours. Dès dimanche à la mi-journée, alors que sur les sites d'informations en ligne les commentaires racistes, ouvertement xénophobes, se multipliaient déjà, la nouvelle Miss France levait toute ambiguïté sur l'antenne de RTL. « Vous vous appelez Ménard, un nom bien français, si j'ose dire, et un prénom du Maghreb, Malika, qui veut dire reine, vous seriez le symbole de l'identité française dont on parle tant en ce moment ! », affirme dans l'enthousiasme le journaliste, vite décontenancé par la réponse de l'impétrante : « Eh bien moi, je suis 100% française, je suis surtout le symbole de la tolérance, mes parents ont trouvé que c'était un joli prénom, avec une jolie consonance et une jolie signification, c'est tout ; il n'y a pas d'origine, c'est juste un symbole d'ouverture d'esprit, mes parents ne se sont pas demandés si cela allait pouvoir me porter préjudice plus tard. En fait, ma mère et ma grand-mère maternelles ont vécu au Maroc, cela prête à confusion, mais non, je suis Française, de parents français. » Un moment tout de même, samedi soir, Geneviève de Fontenay, la diva de l'organisation du concours Miss France, pouvait être ravie de cette Miss au prénom arabe choisie de manière populaire par les téléspectateurs eux-mêmes. Elle avait été vilipendée il y a quelques jours pour avoir alimenté la chronique avec ses réponses au quotidien La Dépêche du Midi, disant qu'« une Miss France qui se prénommerait Fatima ou Khadija serait un bien beau symbole ». Il faut dire que parmi les concurrentes, il y avait une jeune femme d'origine algérienne par son grand-père, Juliette Boubaaya (Miss Picardie). Avec encore plus de prémonition, elle précisait : « En vérité, nos galas n'ont jamais suscité de réactions racistes. La beauté, comme l'intelligence, n'a pas de couleur. Au fond d'eux, les Français ne sont pas racistes, en dépit des efforts de certains hommes politiques pour éveiller chez eux le rejet de l'étranger sous couvert d'identité nationale ». Ce concours anodin et futile, et souvent triste à pleurer, aura ainsi apporté une étonnante et optimiste pièce au dossier de la cohésion nationale.