Partout, la perplexité et l'inquiétude le disputent au sentiment de crise. A qui les Algériens peuvent-ils faire encore confiance ? Qui parviendra à apaiser un pays noué d'angoisse ? Pour notre communauté basée à l'étranger, la réponse est claire : ce n'est Bouteflika et le système, dans son ensemble, dont la gestion des affaires du pays depuis près de 15 longues années a montré toutes ses limites que risquent d'investir de leur confiance les Algériens. C'est du moins ce qui ressort du message adressé à John Kerry par plus de 500 Algériens établis aux Etats-Unis où il l'ont exhorté à soutenir le processus démocratique en Algérie en évitant que sa visite ne soit «exploitée par la campagne politique du président Bouteflika aux fins de légitimer et de cautionner sa réélection pour un 4e mandat». Au sein de notre communauté immigrée du Canada, la méfiance voire l'absence de toute confiance envers le pouvoir en place qui cherche à se maintenir quel qu'en soit le prix à payer est tout aussi manifeste. «… Il ne semble se dégager aucune force-tendance suffisamment solide pour transcender 50 ans de gabegie politique. Car rien, absolument rien, ne paraît, à ce que j'observe, pouvoir stopper les nuisances (et leurs acteurs enracinés) qui minent le pays. Autant de murailles dressées contre toute évolution digne de ce nom. Alors que faire quand on se veut candidat ? Etre un Président colmate-brèches ? Arbitre-otage pris dans l'étau d'inamovibles puissants intérêts aussi bien campés qu'inter- neutralisés ? Ou encore caution consentante, marionnette faire-valoir d'un lugubre énième simulacre de scrutin populaire dont les résultats sont d'ores et déjà négociés, décidés et consignés à la décimale de pourcentages près ?», constate le célèbre économiste, professeur à HEC Montréal, Omar Aktouf. Par ailleurs, plusieurs intellectuels (médecins, chefs d'entreprise, universitaires) établis à Genève et à Zurich ont, pour leur part, indiqué que «du côté de nos compatriotes de Suisse, aucune prise de position collective n'a, à ce jour, été publiquement exprimée. Les Algériens de Suisse sont très tristes et peinés du spectacle qu'offre l'élite algéroise d'Hydra pour la course à la présidentielle. Ils ont été très choqués par les attaques contre l'ANP. Ils ont un profond respect et estime pour l'ANP qui a sauvé et sauvera l'Algérie du fascisme vert». Nos interlocuteurs se disent, en outre, exaspérés par la «présence des P.E.P algériens corrompus qui s'installent en Suisse avec l'argent du peuple. La position du gouvernement à l'égard des Algériens n'est pas objective : d'un côté, s'indignent nos sources, «la chasse aux clandestins ‘‘haraga'' bat son plein et est organisée avec un certain zèle — en témoigne le nombre d'Algériens ‘‘harraga'' dans les prisons suisses. Il y a de la chasse en l'air aux Maghrébins pour freiner ou juguler le racisme ordinaire d'une certaine catégorie de Suisses – dixit la votation du 9 février 2014». De l'autre, notent-ils, «pour les fils des corrompus des P.E.P algériens, il y a une complaisance manifeste de la part des autorités suisses. On voit dans les boîtes de nuit, restaurants de luxe ou dans l'achat d'immobilier de luxe les fils à papa d'Hydra qui tentent de faire la concurrence aux fils des princes du Golfe». Au final, a-t-on conclu, «les membres de notre communauté se sentent éloignés des joutes électorales algériennes, mais se préoccupent vivement pour la paix et la prospérité de l'Algérie. C'est ce dont ils se soucient le plus». Et notre communauté immigrée au Royaume-Uni qu'en pense t-elle ? L'organisation à caractère politique ASC qui regroupe des intellectuels nationaux lance, depuis Londres, un appel pressant à l'adresse du peuple pour le boycott du scrutin du 17 avril. Et pour cause : Ces élections sont, à ses yeux, «une mascarade insultante». Aucun des candidats, «qui sont essentiellement des représentants de quelques facettes de ce système, sous une forme ou une autre, ne pourra ou voudra faire quoi que ce soit pour ce peuple». Et se focaliser sur Bouteflika peut s'avérer, selon l'ASC, «un piège tactique, voire même stratégique, politiquement parlant». Car, «dans la possibilité où, pour une raison ou une autre, le pouvoir, en réaction à la rue, nous sort un autre candidat/lapin de son chapeau au moment des résultats, on aura aboyé contre le mauvais arbre», insiste dans cet entretien Amine Mouffok, responsable de la communication au Comité exécutif de l'ASC.