L'innovation : L'IFU appliqué aux sociétés L'idée n'est pas nouvelle pour les tenants de la rentabilité fiscale, puisque l'imposition sur le chiffre d'affaires et non sur le résultat est censée procurer plus de recettes fiscales en provenance de la catégorie concernée de contribuables. Dans un passé encore récent, la France avait instauré une Imposition forfaitaire annuelle due quels que soient les bénéfices (ou pertes) des sociétés : son montant était également indexé sur le chiffre d'affaires, sans pour autant être une imposition finale. Elle était même devenue une charge déductible fiscalement et ne s'imputait plus sur le montant de l'Impôt sur les sociétés. Un mode de calcul très proche de la Taxe sur l'activité professionnelle (TAP), qui lui reste sans changement en Algérie. L'Imposition forfaitaire annuelle a subi en France les critiques de ses détracteurs et ses limites de pratique pour être finalement abandonnée en 2014 : une façon de rétablir le principe de base selon lequel l'impôt doit être prélevé selon la capacité contributive des entreprises. En Algérie, le mix des caractéristiques de la population fiscale et de l'organisation de l'administration plaident pour que l'IFU soit reconnu comme une simplification du système de suivi des redevables de l'IFU et des obligations déclaratives des entreprises concernées. Il n'est, par contre, pas encore établi si le suivi des redevables n'en sera pas pour autant surchargé par les réclamations des contribuables, à l'occasion des évaluations des bases imposables faite par l'administration et par la gestion des transitions du régime de l'IFU au régime dit du réel. Pour les sociétés, le critère lié à la personne morale commerçante n'est plus la référence, le niveau du chiffre d'affaires est le seul déterminant. En effet, l'article 136 du code des Impôts directs et taxes assimilées se trouve modifié pour exclure de l'assiette de l'IBS celles qui sont soumises à l'IFU pour corroborer le contenu de l'article 282 bis du même code. De quoi déstabiliser les tenants du juridisme attachés à la distinction entre la personne morale et la personne des associés ou actionnaires. La réalité du terrain combinée aux attentes des différentes associations professionnelles permettra certainement d'adapter cette mesure pour l'amener au croisement optimum de l'objectif de collecte de ressources fiscales et celui des entreprises de payer un impôt en relation avec l'activité déployée, mais également avec la structure d'entreprise. A titre d'exemple, le cas des sociétés nouvellement créées, hors du champ des exonérations, mériterait d'être examiné, car la taxation sur le chiffre d'affaires, quel que soit le niveau d'investissement par l'entreprise, peut se révéler être un frein à la production. De même que l'IFU appliqué aux entreprises individuelles sur le long terme n'est pas structurant sur le plan de l'attractivité du statut de société aux entreprises individuelles, dans les contextes de pérennité et de succession, la niche de l'impôt forfaitaire pouvant les contenir dans une situation de facilité et non de croissance. Le temps et les précisions sur les modalités d'application établiront si l'IFU a un caractère discriminatoire, eu égard au contexte de concurrence, tout comme sur le sujet du taux de l'Impôt sur l'IBS. Le débat sur le taux de l'IBS Très simple à retenir, par l'unicité de taux, la nouvelle règle rajoute quatre points à l'ancien taux de 19% pour les producteurs, et réduit de deux points l'ancien taux de 25% pour les prestataires de services et les revendeurs en l'état, y compris les importateurs. Le taux de l'IBS est donc de 23% à partir du 1er janvier 2015 et s'applique d'emblée aux bénéfices de l'exercice 2014 tels qu'ils seront déclarés au plus tard le 30 avril 2015. L'administration fiscale a plaidé cette unicité de taux par les difficultés rencontrées, par ses services d'assiette et de contrôle, pour la mise en application des anciens taux (19% et 25%), plus particulièrement dans le cas des activités mixtes que certaines sociétés auraient usé comme moyen d'évasion fiscale. De leur côté, les associations à caractère économique demandent la révision de cette mesure, pour corriger la discrimination faite entre les producteurs et les importateurs, mais également pour faire du taux d'imposition un levier d'investissement dans le secteur productif. La dualité de taux d'impôt sur les bénéfices a pourtant bien été appliquée de 1992 à 2008, en distinguant le taux normal du taux réduit, ce dernier particulièrement conçu pour l'imposition des bénéfices réinvestis. Sans doute faudra-il y revenir pour une reconnaissance de la différenciation entre producteurs et revendeurs, la première catégorie étant la plus engagée sur l'acte d'investissement. D'un autre côté, l'inventaire des mesures d'encouragement et avantages fiscaux est à faire pour vérifier la synchronisation de ces mesures avec leur effet. Il convient d'ailleurs de signaler, sur ce sujet, que l'article 75 de la loi de finances pour 2015 consacre l'exonération temporaire pour une période de cinq ans, de l'IBS ou de l'IRG et de la TAP pour les investissements réalisés dans certaines activités relevant des filières industrielles suivantes : Sidérurgiques et métallurgiques, liants hydrauliques, électriques et électroménagers, chimie industrielle, mécanique et automobile, pharmaceutiques, aéronautique, construction et réparation navales, technologies avancées, industrie agroalimentaire, textiles et habillement, cuirs et produits dérivés, cuirs et produits dérivés bois et industrie du meuble. Le même article 75 garantit également à ces filières une bonification de 3% du taux d'intérêt applicable aux prêts bancaires accordés pour le financement de ces investissements. Il faudra toutefois attendre la définition plus détaillée de ces filières par le Conseil national de l'investissement pour une meilleure identification des projets éligibles à ces mesures. Pour rappel, les mesures d'encouragement à l'investissement consistent en l'état actuel de la législation, pour la phase dite d'exploitation, à exonérer de l'IBS et de la TAP, pour une période de trois ans les investissements créant jusqu'à cent emplois, pour une période de cinq ans ceux qui créent plus de cent emplois et sans condition de création d'emplois les investissements dans les filières stratégiques. L'article 75 qui ne modifie pas l'ordonnance n° 01-03 du 20 août 2001, relative au développement de l'investissement, semble être le précurseur du dispositif de relocalisation des mesures incitatives de type fiscal au sein des textes fiscaux.