Cette cérémonie officielle de remise d'une trentaine de médailles de l'ordre du Mérite national, sous les auspices du président de la République, devait être étrennée par le chef du gouvernement, Abdelmalek Sellal. Un contretemps de dernière minute. Ce sont, alors, le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, et le ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, qui étaient les hôtes et les remettants de cette soirée. Et ce, en présence d'un aréopage constitué d'artistes, comme Abdelmadjid Meskoud, Hassen Benzerari, de ministres, tels que Mme Nouria Benghabrit , ministre de l'Education nationale, Tayeb Louh, ministre de la Justice, du conseiller du Président, Mohamed Ali Boughazi, le wali d'Alger, Abdelkader Zoukh, Ahmed Madi, président du Syndicat national des éditeurs du livre (SNEL), Sami Bencheikh, directeur général de l'Office national des droits d'auteur (ONDA), Lakhdar Bentorki, directeur de l'ONCI, ou encore Abdelwahab Derbal, président de la Haute instance indépendante de surveillance des élections (HIISE), pour ne citer que ceux-là. Parmi les impétrants à titre posthume, figure Mouloud Mammeri (1917-1989), le célèbre écrivain, anthropologue et linguiste, l'auteur de la Colline oubliée. Slimane Hachi, directeur du Centre national de recherche anthropologique et historique (CNRAH) recevant cette distinction au nom de la famille Mammeri nous a confié : «C'est un honneur de m'avoir délégué à cette cérémonie. Un immense honneur. Une charge. C'est un privilège que de représenter la famille de Da L'Mouloud. C'est Mouloud Mammeri lui-même qui m'a recruté au sein du CNRAH, dont il était le directeur. J'étais un jeune étudiant. Vous savez sur quel critère de recrutement il vous juge ? C'est sur la fréquentation de la bibliothèque. Il avait une capacité d'écoute incroyable, mais pas distraite… A la fin, quand vous rentrez chez-vous, vous êtes joyeux. Il vous a montré de l'intérêt et écouté. Ce qui veut dire que vous êtes intelligent…C'est lui l'inventeur du présent. Il travaillait sur tout ce qui est banal aujourd'hui. Ce qui est suspect, clandestin, complexe et difficile de son temps. Il travaillait sur les musiques. Sur la culture vécue. Il n'aimait pas le qualificatif ‘‘populaire''. La culture du Maghreb qu'il jugeait ‘‘indissociable''.» Bouteldja Belkacem, fantôme de l'Opéra. Les autres médailles décernées regroupent de grands noms de la culture : Abderrahmane Hadj Salah, académicien et chercheur linguistique, Abou Laïd Doudou, écrivain, traducteur et académicien, Nabhani Kribaâ, philosophe et penseur, Cheikh Bouamrane, philosophe, penseur et académicien, Mouloud Mammeri, penseur, écrivain et anthropologue, Chaâbane Ouahioune, écrivain et romancier, Djamel Amrani, poète, Yamina Mechakra, écrivaine et chercheur universitaire, Baya Mahieddine (Fatma Haddad), artiste-peintre, Brahim Beladjrab, artiste et chercheur en patrimoine, Amar Ezzahi, le maître du chaâbi, Tayssir Akla, musicien et artiste, Ahmed Ben Bouzid (Cheikh Attalah), artiste et homme de théâtre, Mohamed Salim Riad, cinéaste, Hadj Rahim, réalisateur et grand homme de télévision. De leur vivant, les bénéficiaires étaient El Cheikh Saïd Kâabache, théologien, Abdelmadjid Meskoud, chanteur de châabi (El Assima), Hasna El Becharia, chanteuse, Akli Yahiatene, grand chanteur d'expression kabyle, Mohamed Lamari, chanteur, Blaoui El Houari, maître du wahrani, Fadhel Noubli, musicologue, Lounis Aït Menguellet, illustre poète et artiste d'expression kabyle, (mais absent car en tournée au Canada), Mounir Bouchenaki, expert en archéologie, Djouher Amhis Ouksel, écrivaine et pédagogue, Larbi Dahou, écrivain et poète, Mohamed Salah Seddik, écrivain, Choukri Mesli, plasticien, Nacerddine Saïdouni, historien, Mohamed Abou El Kacem Khemar, poète. Le ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, déclarera à propos de cet hommage pluriel : «C'est une tradition instituée par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, comme reconnaissance à des hommes de lettres, artistes, des penseurs, des historiens et autres chercheurs ayant contribué au rayonnement de la culture algérienne…» Sur la liste dévoilée des prochains honorés figurent les artistes Dahmane El Harrachi, Khelifi Ahmed, Cheb Hasni, Abelkader Alloual, Azzedine Medjoubi, Sabah Saghira…Malheureusement, point de Bouteldja Belkacem, le père du raï, Cheikha Rimitti, la diva, et Matoub Lounès, le poète et protest singer. Actuellement, la veuve de la légende du raï, Bouteldja Belkacem, décédé le 1er septembre 2015 à l'âge de 64 ans, est handicapée motrice (suite à une erreur médicale), un calvaire pour la déplacer. Elle réside au 3e étage d'un immeuble au quartier haï Zitoun, Dar El Beïda, à Oran. La famille Bouteldja ne ferme pas la porte de l'appartement (location) à clé. Sa veuve épouse ne peut l'ouvrir. Hormis une petite aide annuelle (ou semi-annuelle) de l'ONDA, la veuve Bouteldja n'a ni retraite, ni salaire, ni pension, ni une autre aide. Sa fille, est sans emploi. Ce sont les voisins, des âmes charitables forçant le respect, qui subviennent aux besoins de cette famille. Alors que la famille de Bouteldja Belkacem avait reçu une lettre personnelle de condoléances émanant du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, où il rendait hommage à la légende du raï. No comment !