Surprise ! Nacer Ben Ahmed Al Souidi, ministre du Développement économique du gouvernement d'Abou Dhabi, en visite cette semaine à Alger, a déclaré hier que son gouvernement était « prêt pour un partenariat dans le domaine de l'énergie ». Alors même que l'on croyait les Emiratis en train de plier discrètement bagage… Derniers coups médiatiques en date : EIIC (Dubaï) projetant d'abandonner le projet du parc Dounia, d'une usine de ciment et de fer à Oran, d'une plus grande ferme laitière d'Afrique et d'hôtels à Moretti et à Bab Ezzouar, soit près de 20 milliards de dollars d'investissements. Mohamed Ali Al Abbar, président du conseil d'administration de Dubaï Emaar, qui annonçait fin 2009 son retrait de plusieurs projets : création d'une zone de promotion et de développement à Sidi Abdellah, d'une ville de santé et d'une cité diplomatique à Staouéli et de développement de la zone touristique Colonel Abbas, le tout pour plus de 40 milliards de dollars. Le seul à sembler montrer un réel intérêt pour l'Algérie restait finalement Nacer Ben Ahmed Al Souidi. Cette semaine, il avait évoqué l'intérêt des investisseurs de son pays pour construire et gérer des ports et des aéroports en Algérie. Qu'en est-il réellement ? « Les Emiratis l'ont bien compris : aucun investissement hors hydrocarbures n'est possible », explique un haut cadre du ministère de la Promotion des investissements. Pourtant, les autorités algériennes avaient, depuis 1999, bâti « leur stratégie économique sur les investissements directs étrangers ! A l'époque, l'Algérie n'a pas lésiné sur les moyens pour les attirer », confie un diplomate européen. L'Algérie était devenue une destination d'attractivité des IDE et a drainé d'importants volumes d'investissements comparés aux autres pays du Maghreb. Mais cet attrait est à nuancer puisqu'il s'agit essentiellement d'IDE orientées vers l'exploitation des hydrocarbures. « Les Emiratis étaient alors sollicités pour aider les Algériens dans la relance de leur économie », révèle de son côté un diplomate arabe. Des intentions d'investissement à coups de milliards de dollars sont annoncées pour des projets de construction de grandes agglomérations urbaines, d'usines géantes dans le raffinage, le ciment. Qui se souvient encore de la déclaration du directeur de l'EIIC ? « Les décisions d'investissement d'EIIC sont basées sur une longue observation du marché et visent des projets structurants pour l'économie locale. » Près de deux ans après, ce qui était perçu comme un signal lumineux de la part des Emiratis et un engagement précieux pour Abdelaziz Bouteflika, s'est éteint dans la nuit du protectionnisme et du manque de vision. « Les Emiratis avaient pourtant répondu favorablement et avaient même suscité la colère de quelques pays arabes », confirme le diplomate arabe. « L'Algérie nous a tourné le dos, se souvient un diplomate français. Mais aujourd'hui, ils se plaignent de la faiblesse des investissements européens… » Même si officiellement, ces groupes ont motivé leur retrait du marché algérien par la crise qui affecte la sphère des investissements, les vraies raisons n'ont jamais été annoncées. « La déception des Emiratis est grande. Après l'affaire Orascom, ils ont compris qu'investir en Algérie était considérablement risqué. Si l'Algérie n'arrive pas à se stabiliser économiquement, elle n'y parvient pas non plus politiquement », avoue le diplomate arabe. Ajoutées à la bureaucratie et à l'archaïsme du système bancaire, les pénuries répétées de matériaux de construction et l'indisponibilité de la main d'œuvre qualifiée ont naturellement « fait fuir les investisseurs ». Seul domaine épargné : l'énergie. Le ministre du Développement économique du gouvernement d'Abou Dhabi, Nacer Ben Ahmed Al Souidi, l'a bien compris et ne cache pas ses intentions dans le secteur. A en croire un diplomate arabe : « Ce qui les intéresse, c'est la guerre non annoncée pour l'exploitation des gisements algériens. Les groupes étrangers et spécialement français n'ont cessé ces derniers temps de rafler de gros contrats, les Emiratis ne peuvent rester les bras croisés. » Allusion faite aux contrats remportés par Total en janvier dernier de plus d'un milliard d'euros et tout récemment par le groupe GDF Suez. En attendant une stratégie économique annoncée à maintes reprises, les hydrocarbures restent les mamelles les plus rentables de l'Algérie. Faciles à traire.