Le Front Polisario et l'Algérie ne décolèrent pas. Les deux parties sont mécontentes de la résolution adoptée vendredi dernier par le Conseil de sécurité, prorogeant le mandat de la Minurso pour une année. Et pour cause. A lire le texte, il apparaît clairement que ses auteurs ont délibérément opté pour le maintien du statu quo, lequel arrange les affaires du Maroc à qui l'immobilisme fait gagner du temps. La preuve ? Les cris de satisfaction du palais royal. La résolution n'a pas fait avancer d'un iota la cause de la paix, observant un silence total sur la reprise des hostilités depuis que les Forces armées royales se sont infiltrées dans la bande de Guerguerat, située à la frontière entre la RasD et la Mauritanie en violation de l'accord de cessez-le-feu en vigueur depuis 1991. Aucune mise en garde n'est adressée au Maroc pour son comportement agressif. Aucun calendrier n'est proposé pour faire avancer le processus référendaire, il n'est pas demandé aux parties en conflit, le Maroc et le Front Polisario, de s'asseoir à la table des négociations pour dégager une solution politique. Pourtant, les deux parties se sont entendu en décembre 1999 sur les listes électorales en vue d'un référendum d'autodétermination. La résolution adoptée vendredi met déjà les bâtons dans les roues à M. Staffan de Mistura, le nouveau représentant personnel du secrétaire général des Nations unies. Il n'a même pas commencé son travail et déjà le terrain est miné pour lui. Le Conseil de sécurité a décidé de le mener à l'échec. Il n'y a rien d'étonnant à cela. Il y a d'abord Antonio Guterres. L'homme est très hostile au Front Polisario et a affirmé publiquement son appui à l'expansionnisme marocain. Avant de Mistura, il avait proposé le poste à un ministre roumain des Affaires étrangères, un abonné aux invitations du palais royal. Guterres avait reculé parce que sa proposition avait provoqué un scandale au palais de verre de New York. Le Front Polisario et l'Algérie avaient dénoncé dans leurs communiqués respectifs des «forces hostiles» au Conseil de sécurité sans les nommer. On connaît au moins une force : la France. Depuis 1975, ce pays n'a pas caché son hostilité aux Sahraouis, allant jusqu'à massacrer avec ses bombardiers Jaguar, en avril 1976, des civils sahraouis qui fuyaient devant l'avancée des troupes marocaines, dans l'espoir de trouver refuge en Algérie. Pour Paris, il fallait empêcher à tout prix tout problème qui porterait préjudice à la stabilité de la monarchie marocaine. La protection ne s'est jamais démentie. Sayed El Ouali, chef du bureau du Front Polisario à Paris dans les années 1980, avait dîné un jour avec le secrétaire général du Quai d'Orsay. Durant le repas, il interpelle ce dernier : «Qu'est-ce qui explique l'hostilité de la France à l'égard de notre peuple, alors que nous n'avons aucun problème avec elle ?» Réponse : «Vous avez la malchance d'être dans le voisinage de l'Algérie. Si vous étiez géographiquement ailleurs, nous vous aurions soutenus.» Des propos qui ne laissent aucune ambiguïté et qui expliquent la permanence de l'attitude française, laquelle sacrifie l'amitié avec tous les peuples du Maghreb et la paix pour des intérêts étroits. Et cette paix n'est pas pour demain. Il ne reste au peuple sahraoui qu'à se battre et le vaincu ne sera pas celui que Rabat et Paris croient. Advertisements