Cessez-le-feu à Ghaza: 183 prisonniers palestiniens seront libérés samedi    Coupe d'Algérie (1/8es de finale): l'USMH et le MOB passent, historique pour le CRT    "Soupçon d'Art, l'Art en partage", une exposition qui met en valeur le patrimoine culturel algérien et africain    Sauvetage de 15 candidats à l'immigration clandestine au nord-est des côtes de Boumerdes    Le Général d'Armée Chanegriha reçu à New Delhi par le Chef d'Etat-major de la Défense des Forces armées indiennes    Renouvellement par moitié des membres du Conseil de la nation : 99 dossiers de déclaration de candidature acceptés jusqu'à jeudi    La PCH, un "acteur incontournable" dans l'approvisionnement des hôpitaux nationaux en médicaments    Le FFS tient une session extraordinaire de son Conseil national    Conflit dans l'Est de la RDC : l'Algérie appelle à la "retenue" et à la "désescalade"    Présidence mauritanienne de l'UA: des performances à préserver    Foot/Supercoupe d'Algérie 2024 (MCA-CRB): deux prétendants convoitent le premier titre de la saison    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025: La 25e édition promet un spectacle grandiose à travers l'Est et le Sud du pays    Massacre de Sakiet Sidi Youcef: un autre exemple de la sauvagerie des expéditions punitives de l'armée coloniale    Chaib reçoit le Directeur général de l'AAPI    "Festival de l'image corporate": 14 films institutionnels distingués à Alger    Sonelgaz: signature d'un mémorandum d'entente avec Siemens Energy    L'Union des Organisations africaines contre le cancer ouverte à toutes les organisations du continent    Le ministre de la Santé se réunit avec les membres de la Commission nationale de prévention et de lutte contre le cancer    L'approche participative de Zitouni    Réunion de coordination portant suivi et évaluation des programmes de développement de la wilaya    Mise en service fin février de la ligne ferroviaire    Coupe d'Algérie Les 8es dans une ambiance survoltée    JS Kabylie : Le contrat de Lounas Adjout résilié    Retour de l'entraîneur Abdelhakem Benslimane    Le président de la République opère un mouvement partiel dans le corps des présidents de Cours et des procureurs généraux    Natacha Rey demande l'asile politique pour Piotr Tolstoï en Russie en raison de persécutions judiciaires    Brahim Merad annonce un élargissement à toutes les régions du pays    La police de Tébessa frappe à El Oued    Une bande de malfaiteurs spécialisée dans le vol des maisons neutralisée    Les décharges sauvages se multiplient à une cadence frénétique    C'est 30 ans de mensonges et de massacres au Moyen-Orient !    Le Mexique commence le déploiement de 10 000 soldats à la frontière avec les Etats-Unis    Palestine occupée : Des ONG appellent l'UE à mettre fin au commerce avec les colonies sionistes    Jeunes créateurs et investisseurs à l'honneur    La Mosquée-Cathédrale de Cordoue franchit la barre des 2 millions de visiteurs en 2024    Exposition d'artistes aux besoins spécifiques        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mohamed Khadda-Ezra Pound, les mots et les images
De l'identité en peinture et en poésie
Publié dans El Watan le 23 - 06 - 2005

c'était au cours d'une soirée littéraire. Mon ami, le grand peintre Mohamed Khadda (1930-1990), m'entendant évoquer le nom du grand poète américain Ezra Pound (1885-1972) et son long poème épique Les Cantos, me lança avec une agilité d'esprit :
« Et que fait l'amoureux de la langue arabe avec Ezra Pound ? » Connaissant l'humour de mon ami, et surtout, son art bien à lui, d'esquisser sur son propre visage des traits d'étonnement, voire d'ébahissement, je ne fus guère surpris par sa bonne question. Je lui répondis du tac au tac : « Et quel est ton rapport à toi, mon cher francisant, au grand miniaturiste musulman Al Wasiti ? » Le souvenir de Khadda me revint ces derniers temps en apprenant qu'une nouvelle traduction des Cantos venait d'être publiée en France. Cinq grands poètes français s'étaient attelés à la tâche, en vue d'apprivoiser, selon leur expression, ce « monstre littéraire qui n'a pas d'égal de nos jours ». Pound avait commencé la composition de son poème épique en 1917, et il n'a cessé de le revoir et de le peaufiner jusqu'à sa mort en 1972. En fait, toutes les relations sont possibles, de même que toutes les lectures, surtout celles ayant trait à la littérature et à la peinture, sont acceptables, voire justes et judicieuses à la fois. Sans procéder à un métissage de bas étage ou à un clonage monstrueux, Khadda a su, au contraire, réaliser un mariage heureux entre la culture occidentale dans ses formes les plus raffinées d'un côté, et la culture populaire maghrébine, d'un autre côté. Je l'ai toujours constaté dans sa manière de parler le dialectal algérien pour développer telle idée ou autre avec une certaine rapidité dans le débit. Ce qui me troublait encore, c'était bien sa relation à la culture arabe classique, tout principalement, au grand miniaturiste Al Wasiti. Celui-ci, on le sait, a illustré le livre des séances du grand prosateur Al Hariri en 1237, dans la ville de Baghdad. Y a-t-il la touche d'Al Wasiti dans les réalisations picturales de Mohamed Khadda ? Il faut se rapprocher de celles-ci, et tenter de les lire en dehors des recettes artistiques galvaudées de nos jours. Les connaisseurs se plaisent à répéter que les miniatures d'Al Wasiti, à l'image de la peinture byzantine, dont il est le contemporain, sont dénuées de toute perspective, et il y a, bien sûr, à redire à ce sujet. Apparemment, et selon les mêmes spécialistes, le grand artiste de Baghdad eut beau être un grand dessinateur et un coloriste de génie, il ne put être cependant que de son temps. En fait, dans le cas d'Al Wasiti, la perspective au sens moderne est prise en charge à travers les thèmes qu'il avait développés : troupeau de chameaux, élèves récitant le Saint Coran dans une mosquée, vente d'esclaves, soirée musicale chez le souverain de Baghdad, etc. Savoir situer le langage pictural, dans l'espace et dans le temps, c'est là toute la question. Mohamed Khadda, quant à lui, a bien compris la leçon d'Al Wasiti. Il me plaît, personnellement, de voir dans ses tableaux des champs et des vergers du Yémen vus du ciel, quelques échappées cubistes à la manière de certains peintres européens de la première moitié du XXe siècle et, bien sûr, la franchise du geste dans la calligraphie arabe classique. Il fallait encore entendre Mohamed Khadda lire la sourate Ezzalzala pour réaliser à quel point il avait réussi sa propre synthèse de la culture moderne et celle de l'ère classique musulmane. Oui, il y a beaucoup de l'esprit des villes et des agglomérations dans l'œuvre de Khadda. C'est pourquoi, j'en suis à me demander s'il ne lui a pas été donné de lire, dans une traduction française, le grand livre Al Khoutat de l'Egyptien Al Maghrizi, où il est surtout question des villes du Moyen-Orient et de la manière dont elles ont été construites. On peut être artiste foncièrement moderne, comme Khadda, tout en mettant un pied ferme dans le terroir maghrébin et la grande civilisation islamique. Je crois avoir dit tout cela à mon ami, en cette soirée littéraire dans les années 1980 du siècle dernier. Neuf siècles de distance, et cependant, la relation reste bien établie entre Khadda et Al Wasiti, même si le geste pictural a pris d'autres allures.Toutefois, le grand poète Ezra Pound n'est pas arrivé à nous départager. Khadda voyait en lui une sorte d'île volcanique surgie, tout d'un coup, des profondeurs d'un océan mythique. A-t-il lu ses Cantos ? Je ne le sais pas. Il me fit, cependant, confiance, surtout lorsque j'ai évoqué, devant lui, la possibilité de lire Ezra Pound d'une manière tout à fait picturale, c'est-à-dire, en se référant aux paysages de la vieille Europe, aux villes médiévales, aux fleuves de Chine, aux calligraphies gothiques et aux différentes gloses figurant dans son long poème épique. En bref, ce qu'il y a de certain sur ce chapitre, c'est que loin du feu des fausses querelles attisé par ceux qui n'ont rien compris à leur propre identité, l'arabisant que je fus, que je suis, et le francisant, que fut Mohamed Khadda, se sont retrouvés bien chez eux, dans la culture du terroir, et dans la culture universelle tout en disant à la modernité : soyez la bienvenue !

Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.