La «nouvelle vision» défendue par le responsable du département de l'Intérieur sonne la fin de l'ère Zerhouni, selon plusieurs observateurs.Les nouveaux walis ont pour mission de donner un coup d'accélérateur à la mise en œuvre du plan quinquennal et de préparer les prochaines échéances électorales. Le dernier mouvement des walis serait l'expression «d'une rupture avec le passé». Le mot lâché par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, sonne comme un coup de grâce asséné à l'ancien locataire de l'Intérieur, Yazid Zerhouni. La phrase de Ould Kablia disant que les changements opérés dans le corps de l'administration publique visent à «créer une rupture avec ce qui a été fait auparavant», porte un regard négatif et critique sur le bilan de Zerhouni et constitue un deuxième coup porté contre ce dernier après celui de son éviction du département de l'Intérieur. Ould Kablia partage pourtant avec son prédécesseur le bilan de 11 années à la tête des collectivités locales. Valse à deux temps Le discours qu'il tient aujourd'hui tranche complètement avec celui qu'il avait tenu à la cérémonie de passation de consignes le 30 mai dernier où il avait reçu le témoin des mains de Zerhouni. Ce dernier, qui avait pour l'occasion fait un bilan «élogieux» de son passage au ministère de l'Intérieur, a été conforté par Ould Kablia qui affirmait vouloir «assurer la continuité» du travail de son prédécesseur et que la feuille de route qu'il aura à présenter «s'inscrira en droite ligne de ce qui a été fait jusqu'à maintenant». Ce changement de ton ou cette valse à deux temps qu'opère Ould Kablia invite à s'interroger sur le poids des uns et des autres en haut lieu. Est-ce là la confirmation de la fin de l'ère Zerhouni et l'expression d'un repositionnement des pièces sur l'échiquier du pouvoir ? Ou bien, est-ce un discours destiné à la consommation du grand public pour faire croire à un changement de politique ? Ould Kablia affirme qu'il s'agit de la promotion d'«une vision nouvelle que les cadres désignés auront lorsqu'ils assumeront la responsabilité à la tête de la wilaya». Une «vision nouvelle» qui se traduira, dit-il, par l'application d'abord du plan quinquennal de développement mais aussi, et là la précision de Ould Kablia est à souligner, par «faire face aux échéances électorales de 2012 (législatives et locales) et de 2014 (élection présidentielle)». Est-ce à dire que le changement de walis devra s'accompagner ou faire le lit à un changement de choix politiques pour les prochaines échéances électorales ? Ou pour être plus précis dans la question, le système adoptera-t-il une autre famille politique que celle de l'actuel cercle présidentiel pour mener le bateau Algérie en 2014 ? La sortie pour le moins frappante de Ould Kablia n'est pas à sous-estimer compte tenu des signes d'un changement de cap dont les prémices ont éclaté avec les scandales de corruption, le recours au protectionnisme économique et le remaniement gouvernemental. Le mouvement dans le corps des walis ne peut se prévoir en dehors d'une stratégie globale dont les contours commencent à se préciser sans toutefois être assumée au grand jour. Le plus important mouvement depuis 2004 Le dernier mouvement a touché, faut-il le rappeler, outre les walis, les walis délégués, les secrétaires généraux de wilaya, les directeurs de la réglementation et des affaires générales (DRAG) ainsi que les directeurs de l'administration locale (DAL) et les chefs de daïra. Présidant jeudi à Alger une cérémonie d'installation des nouveaux walis, le nouveau locataire de l'Intérieur rappelle qu'il s'agit du plus important mouvement du genre depuis 2004 et que les walis installés ont été instruits d'une nouvelle mission, qui est celle de «la mise en place d'une administration rénovée avec de nouveaux modes d'organisation. Les walis sont appelés à traiter avec la plus grande rigueur tous les problèmes ayant une incidence directe sur la vie des citoyens, dont l'accueil du citoyen par l'administration, les problèmes d'hygiène, d'environnement, de transport, de circulation urbaine, de parkings anarchiques, de commerce informel, ainsi que de bureaucratie dans les administrations», indique le ministre sans souffler mot sur le non-respect des libertés. Il rappelle que les changements opérés dans l'administration locale ont concerné 28 walis mutés, 12 nouvellement nommés, 8 maintenus dans leurs wilayas respectives, 7 cadres promus walis délégués, 33 secrétaires généraux de wilaya, dont 10 nouvellement promus, l'ensemble des DRAG et DAL, avec deux nouvelles promotions, 215 chefs de daïra mutés, dont 35 nouvellement promus. Il ne citera toutefois pas les raisons qui ont mené au limogeage de certains cadres. Si rupture il y a, elle devra s'accompagner de transparence et dire où la faillite a eu lieu et sévir en sanctionnant les responsables qui ont failli à leur mission. Si rupture il y a, pourquoi continuer à maintenir l'état d'urgence et pourquoi toutes ces atteintes aux libertés ?