Ce qui se passe en Libye interpelle la conscience humaine, la nôtre encore plus, en raison de tout ce qui nous lie à ce pays. Un peuple frère et voisin solidaire de notre guerre de libération est en train de subir une répression sanglante pour avoir réclamé pacifiquement sa liberté et sa dignité. Les Algériens, gouvernement, classe politique et société civile, se taisent et regardent, se rendant ainsi complices d'un massacre programmé. Le silence officiel sur la révolte en Tunisie est, pour le moins, incompréhensible et inacceptable ; la timide réaction à celle de l'Egypte confirme que le gouvernement n'avait pas mesuré la réalité de la demande de liberté chez ce peuple, et enfin, l'appel téléphonique de notre Président à El Gueddafi, lui exprimant la solidarité de l'Algérie, marque son décalage avec la renaissance de cette partie du monde et un dédain pour les sentiments de sa propre population vis-à-vis des soulèvements des peuples tunisien, égyptien et libyen. Ces peuples retiendront, et l'histoire également, que nous avons manqué de solidarité dans des moments forts et douloureux qui forgent leur destin. Ils ont toutes les raisons de croire que l'Algérie d'aujourd'hui n'est pas la digne héritière de l'esprit de Novembre.
Abdelaziz Rahabi. Ancien ministre de la Communication et de la Culture Alger, le 22 février 2011