Belkacem Babaci, animateur de “Rihla Fettarikh” de radio El-Bahdja, est né au Bastion 23. Une magnifique bâtisse qui servait de lieu de détente aux raïs de la Régence d'Alger. Ayant occupé de hautes fonctions dans l'Etat, il sera “remercié” après avoir dirigé la Délégation pour la sauvegarde de la Casbah, du temps du Gouvernorat du Grand-Alger. La Délégation dissoute (?), Babaci se met à l'écriture et raconte tous les matins sur El Bahdja de “croustillantes” histoires. De la Casbah à la Radio. On ne trouverait pas mieux pour situer votre itinéraire... Après la dissolution de la Délégation pour la réhabilitation et la sauvegarde de la Casbah d'Alger, je me suis consacré à l'écriture de l'histoire d'Alger. Je ne suis pas historien au sens académique du terme. Je suis en quelque sorte le “Guide” du vieil Alger qui aime raconter par écrit ou sur les ondes de la radio la vie de l'illustre raïs Hamidou ou la légende de Fatima El Maakra. Mes recherches s'appuient sur les écrits de différents auteurs, des récits que me transmettaient les anciens, qui continuent jusqu'à présent à le faire. Pour l'anecdote, j'ai été interpellé récemment par un brave homme qui connaissait assez bien les dédales du vieil Alger pour me dire ceci : “La fameuse fontaine turque, appelée “Echroub Ouahreb” (Bois et sauve-toi !) était érigée à Belcourt et non pas à la Casbah comme le font croire certains”. Cette précision, vérifiée par ailleurs, servira évidemment à enrichir mes connaissances. Bien sûr, le fait que j'aie évolué dans ce milieu casbadji est pour beaucoup dans ce que j'entreprend actuellement à El Bahdja, je veux parler de l'émission Tahwissa Fettarikh (voyage à travers l'histoire). Comment s'était effectué vos débuts ? Pas de trac ? Je vais vous confier quelque chose : lorsque je suis sur le plateau, je ne fais pas attention au décors (régie, etc). Je plonge corps et âme dans le récit, surtout s'il est question de rapporter des passages croustillants sur la vie d'une personne donnée. J'ai gardé la même attitude qu'il y a 3 ans, quand on m'a engagé à la radio El Bahdja. J'ai débuté avec Raïs Hamidou, le chef de la “Taïfa” (corporation) des raïs de la Régence d'Alger. Déjà écrit, le conte a été diffusé comme premier essai. La vie de ce grand chef marin, le seul homme non turque (autochtone) à avoir commandé la flotte de la Régence, intéressait énormément les auditeurs. D'autant plus que le style (du récit) était direct. Les gens qui m'écoutaient ont manifesté leur intérêt pour ce passage, par téléphone ou par courrier. Ce qui incita la direction de la radio à créer une émission matinale avec deux diffusions, l'une à 6h30 et l'autre 7h30. Pas trop chargé ? A l'aise. Ceci dit, mon activité radio se résume en 3 rubriques, la 1re raconte Mezghenna, de l'époque de son roi Salim Toumi jusqu'à la fin de la présence turque, la 2e est intitulée “Epopée d'Al Djazaïr Banou Mezghenna”, qui traite de résistance contre l'occupant français, de 1830 à 1954. Dans ce chapitre, j'ai tendance à m'attarder sur les “à côtés” d'illustres résistants, comme la fameuse histoire de Lalla Fatma n'Soumer dont est tombé follement amoureux le général Randon qui la présentait comme étant la Jeanne d'Arc du Djurdjura et qu'il voulait coûte que coûte épouser lorsqu'elle était sa prisonnière. En guise de réponse, son frère Si Chérif, imam de n'Soumer, rétorqua : “On ne donne pas des figues sucrées à des cochons”. Ce à quoi le sinistre général abdiqua. Babaci homme de radio. Vous acceptez ce statut ? Oui, dans la mesure où mes auditeurs sont issus de tous les milieux. Des jeunes, moins jeunes, femmes au foyer, cadres supérieurs et profession libérale. Mais les lycéens constituent une bonne partie de l'auditoire. Une frange vers laquelle je me déplace d'ailleurs souvent dans le cadre des activités culturelles organisées par les lycées d'Alger. Ils n'hésitent pas à me poser des questions très pertinentes sur l'histoire d'Alger (anté-coloniale). Peut-être que les manuels scolaires ne sont pas explicites par rapport à cette époque de l'histoire de l'Algérie.