On se croirait en pleine période coloniale, ou dans un pays où la liberté de circulation n'est pas permise à tout le monde, surtout pas aux… étudiants. Et ce n'est pas ces nouveaux «ennemis» qui font autant peur aux autorités, qui le nieront. Lundi, des dizaines d'étudiants ont été empêchés, par les éléments de la police, de regagner la capitale. Les transports inter-wilayas ont été arrêtés au niveau de la gare routière du Caroubier. Tous les passagers, soumis à la fouille par des policiers, ont le droit de descendre du bus excepté les étudiants. «Après avoir vérifié nos papiers et nos cartes d'étudiant, un policier nous a interdit de quitter le bus. Il a retiré les papiers au chauffeur et l'a sommé de quitter les lieux», raconte S. A., étudiante à l'Ecole normale supérieure des enseignants de Bouzaréah, empêchée de rejoindre son école après avoir passé, comme à l'accoutumée, le week-end chez ses parents, à Bejaïa. Le policier qui ne manque pas d'ironie dit au chauffeur : «Jetez-les dans l'oued !» Agression Intrigué, le chauffeur rebrousse chemin, «escorté» par une voiture de police pour s'assurer que le chauffeur a bien compris le message : «Les étudiants ne doivent pas rentrer à Alger.» Effectivement, il a déposé les étudiants à la sortie du tunnel de Oued Ouchayeh. La peur au ventre, les étudiants marchent côte à côte sur le bord de l'autoroute. Une étudiante s'est faite agresser et on lui a volé son collier en or. Un autre groupe d'étudiants, venu de Tizi Ouzou, a vécu la même situation. Ils se sont retrouvés à quelques encablures de oued El Harrach. «Nous avons été livrés à nous-mêmes et traités comme des malfrats. Avons-nous le droit de circuler librement dans notre pays ? Les policiers ont certainement cru qu'on allait prendre part à la marche des étudiants, mais quelqu'un qui a l'intention d'y participer n'arrive pas à 12h30, il vient la veille !» s'emporte K. S. de Tizi Ouzou, étudiante à Bouzaréah. Par ailleurs, une enseignante de français vivant à Tidjelabine (Boumerdès) n'a pas été «autorisée», à son tour, de rallier Alger le même jour. «Abus de pouvoir» ou «violation des droits de l'homme», comme le dénoncent ces étudiants, rien ne justifie de telles pratiques deux mois après «la levée» de l'état d'urgence.