L'ironie du sort a voulu que la cuvette de Ouargla, qui fut pendant plusieurs décennies un égout à ciel ouvert avec des odeurs nauséabondes, devienne en 2011 – soit seulement six ans après le lancement du projet de lutte contre la remontée des eaux – le site le plus précoce de Méditerranée en matière de reproduction des flamants roses. Depuis que les premières eaux épurées de Ouargla sont arrivées à Sebkhat Sefioune, leur exutoire, les eaux remontantes ont disparu. Le projet : 152 km de canalisations souterraines qui constituent l'ossature du système intégré d'assainissement de la cuvette de Ouargla, de nombreuses stations de refoulement, de relevage et d'épuration et le joyau du projet, un canal de 41 km qui longe la périphérie de Ouargla vers Sebkhat Sefioune, un chott connu des cartographes et des anciens de Ouargla. Il s'étend sur plusieurs milliers d'hectares, point de chute des eaux des oueds venus du cœur du Sahara et du nord de l'Algérie : Oued Mya, Oued M'zab, Oued N'ssa, etc. Le lac Sefioune, où l'on sent à peine les émanations des eaux traitées, abrite actuellement un millier de flamants roses et autant de sarcelles, d'échasses blanches, d'avocettes élégantes, de bécasseaux et différents insectes et autres formes de vie aquatique insoupçonnée. Aquatique ? Le mot est magique au Sahara. Le site est plein de vie, de biodiversité, des bruits inhabituels des eaux qui s'écoulent du canal aux chants des oiseaux qui plongent pour se nourrir d'insectes à portée de main. La végétation est aussi au rendez-vous : en 2008, une sebkha asséchée recevait les aménagements nécessaires à un point d'eaux épurées et c'est à présent un magnifique lac où le phragmite a élu domicile et qui tranche extraordinairement avec le paysage désertique environnant. Le site peut recevoir tous les aménagements dignes d'un site touristique de premier ordre et dont la population ne connaît même pas l'existence. Une existence qui n'a pas échappé aux oiseaux qui, sitôt le repérage fait en 2009, sont revenus en 2010. La première reproduction n'a pas abouti. Des chercheurs de Ouargla et de Guelma ont suivi tout le parcours des flamants et à partir de décembre 2010, ils ont pu observer les parades nuptiales, la nidification et la naissance des premiers poussins de flamants. Le 24 avril dernier, 62 poussins ont été bagués, ils ont désormais la nationalité algérienne et pourront être reconnus en tant que tels. Le 24 avril 2011, Sebkhat Sefioune a été officiellement reconnue par la communauté scientifique comme le site le plus précoce de reproduction du flamant rose en mer Méditerranée.