Quarante minutes de retard pour trente minutes de conférence, durant laquelle certains journalistes présents hier à Dejnane El Mithak se sont échinés à déplacer leurs micros d'un pupitre à l'autre pour pouvoir récolter la bonne parole du ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, et de son homologue algérien Mourad Medelci. L'Algérie, qui avait blacklisté l'ancien locataire du Quai d'Orsay, Bernard Kouchner, en refusant de le recevoir, a mis les petits plats dans les grands pour cette rencontre. Les deux pays semblent vouloir régler, par la concertation et le dialogue, les questions encore en suspens. C'est ce qui fera dire au ministre français que «les relations algéro-françaises connaissent actuellement une période d'embellie». Derrière ce numéro de claquettes des deux ministres, le problème libyen reste la pierre d'achoppement qui vient assombrir l'entente cordiale entre les deux pays. Même si Alain Juppé s'est réjoui de «l'attachement» de l'Algérie aux résolutions du Conseil de sécurité, il a tenu à rappeler certaines positions françaises dans le conflit libyen et a souligné que l'intervention de son pays en Libye s'inscrivait dans le cadre de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l'ONU, visant non seulement, a-t-il rappelé, à imposer une zone d'exclusion aérienne, mais aussi la protection des populations civiles locales. Le chef de la diplomatie française a toutefois reconnu que «l'intervention militaire en Libye n'était pas une fin en soi», soutenant, dans ce cadre, que la France était pour «une solution politique», rejoignant en ce sens la position algérienne. Alain Juppé a également estimé que la solution politique passait, d'une part, par un «authentique» cessez-le-feu et où l'armée du colonel El Gueddafi «retournerait dans les casernes», et, d'autre part, par «le départ du leader libyen du pouvoir civil et militaire». C'est l'une des conditions, a-t-il estimé, pour qu'un processus de dialogue et de réconciliation nationale soit entamé en Libye. S'agissant du Conseil national de transition (CNT) libyen, il a indiqué que la France entretenait avec ce dernier des «relations très étroites», soutenant, dans le même ordre d'idées, que «sa représentativité était reconnue par un très grand nombre de pays». «Nous considérons le CNT comme un interlocuteur incontournable», a-t-il déclaré, soulignant que l'Unon africaine (UA) avait un rôle «absolument essentiel» à jouer pour trouver une solution à la crise libyenne. Du côté algérien, le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a souligné que la position algérienne découlait de celles de la Ligue des Etats arabes et de l'Union africaine, cette dernière ayant tracé une feuille de route pour une sortie de crise dans ce pays. «Par conséquent, c'est une position collective que l'Algérie adoptera lorsqu'il s'agira de reconnaître le Conseil national libyen de transition», a fait savoir le ministre algérien.