Bravo ! Votre numéro a été tiré au sort et vous avez gagné... Appelez vite le numéro... pour recevoir votre cadeau. » De nombreux citoyens reçoivent ce message laconique par SMS sur leur téléphone portable annonçant une « bonne nouvelle ». Ils ont été désignés bénéficiaires de quelques cadeaux : un DVD, une PlayStation et la somme rondelette de 20 000 DA. Beaucoup de crédules sont tombés dans le traquenard de ces pseudo-prestataires de services sans scrupules. Un jeu ? Une plaisanterie ? Il faut l'appeler escroquerie. Une nouvelle arnaque qui se pratique à grande échelle aujourd'hui en Algérie. Les quelques naïfs qui en ont fait l'expérience l'ont vérifié à leurs dépens. En l'espace de quelques minutes, 600, 800 ou plus de 1000 DA sont consommés pour enfin voir la communication s'interrompe sans contrepartie pour le client. C'est le cas de Nacéra. Voulant profiter de l'aubaine « lui venant du ciel », elle a déboursé 800 DA et ne récoltera que du vent. Adieu, veaux, vaches et moutons. « J'ai reçu le message me demandant d'appeler le 080 pour recevoir un cadeau. En appelant, on m'a fait passer d'un service à l'autre. L'engrenage a été entrecoupé à chaque fois d'une musique et enfin la communication a été interrompue. J'ai été grugée et j'ai payé pour ça 800 DA », nous a-t-elle confié. Qui sont ces gens qui escroquent les citoyens ? Activent-ils dans la légalité ? Ont-ils des conventions avec les opérateurs de téléphonie mobile dont ils utilisent le réseau ? Les messages en question sont envoyés aux abonnés des trois opérateurs de téléphonie mobile activant sur le marché national, en l'occurrence Djezzy, Mobilis et Wataniya. Les arnaqueurs envoient des messages à leurs victimes via un des réseaux de ces opérateurs sans avoir leur autorisation ni avoir signé une convention avec eux. « Nous avons enregistré deux cas de ce genre chez nous. Nous n'avons aucune relation avec ces gens-là. Nos clients, s'il gagnent un cadeau, nous leur précisons le nom du service auquel ils doivent s'adresser pour le recevoir », a déclaré Ramdhane Djaziri, responsable à Wataniya Télécom. Pour lui : « Soit ce sont des gens qui utilisent Internet et piratent les numéros de nos services, soit des plaisantins ». Mais, a-t-il précisé, dans les deux cas, les abonnés de Wataniya doivent se présenter aux boutiques de l'opérateur pour s'informer. « C'est un phénomène grave. Pour protéger nos clients, nous leur conseillons de se présenter à nos boutiques afin de recueillir la bonne information à chaque fois qu'ils auront reçu ce genre de messages », a-t-il ajouté. Même son de cloche chez Mobilis et Djezzy. Selon M. Daâs, sous-directeur aux médias à Mobilis, « les arnaqueurs, ce sont des gens qui achètent des lignes téléphoniques frauduleusement ». « Nous n'avons signé aucun accord avec eux », a-t-il souligné. Que prévoit la loi ? Les textes juridiques interdisent les jeux de hasard. Toutefois pour ce nouveau cas, il y a semble-t-il un vide juridique. L'Autorité de régulation de la poste et des télécommunications (ARPT) ne peut pas agir pour mettre fin à ce phénomène. « Il nous faut une preuve palpable pour pouvoir vérifier et prendre les mesures qu'il faut. Les citoyens doivent saisir l'ARPT », a expliqué Mlle Boukli, juriste au département juridique de l'ARPT. Monts et merveilles au 080... L'autre phénomène qui s'est généralisé, c'est l'exploitation des services à valeur ajoutée de type audiotex. Au-delà des services surtaxés qu'on offre aux citoyens, les prestataires proposent à leurs clients des jeux. Des jeux qui leur « permettent de gagner de sublimes voitures, des voyages de luxe et des sommes importantes ». Un marché juteux, synonyme de richesse des prestataires. Ils investissent peu, mais gagnent beaucoup. Ce n'est pas le cas du petit citoyen qui se trouve influencé par les pages publicitaires diffusées quotidiennement par les médias. Le « gagnant » doit passer par un tirage au sort et gare au malchanceux. Exploité au début par une simple déclaration à l'ARPT, ce terrain est aujourd'hui réglementé. Selon Mlle Boukli, l'activité n'est pas interdite et les prestataires doivent avoir une autorisation de l'ARPT et se soumettre à un cahier des charges pour activer dans le domaine. Un décret exécutif a été même élaboré pour réglementer cette activité. Il s'agit du décret n°05-98 du 20 mars 2005 complétant le décret exécutif n°01-123 du 9 mai 2001 relatif au régime d'exploitation applicable à chaque type de réseaux, y compris radioélectriques et aux différents services de télécommunications. Le nouveau décret est applicable même sur les audiotex et centres d'appels. Les prestataires, a indiqué l'oratrice, reçoivent leur autorisation en payant une redevance de 10 millions de dinars et une partie variable, calculée sur la base du taux de 5% sur leur chiffre d'affaires, tel que défini dans le cahier des charges. L'opérateur violant la réglementation telle que définie dans ledit cahier sera, selon elle, sanctionné. « L'autorisation peut être retirée à la personne enfreignant la réglementation », a-t-elle dit. Le jeu proposé n'est pas, pour la juriste, un jeux de hasard d'autant plus que les tirages au sort se font avec la présence d'un huissier de justice. Alors, c'est aux citoyens de faire leur choix de participer ou non à ces jeux. Le père Noël existe-t-il ?