«L'Algérie traverse une crise de langue unique dans le monde arabe.» L'ancien ambassadeur américain, David Pearce, décrit dans un câble datant du 16 octobre 2008, avec stupéfaction l'indigence linguistique des Algériens. «Le groupe 20-40 ans, qui sont aujourd'hui candidats à l'embauche, parle un mélange confus de langue française, arabe et berbère, que certains chefs d'entreprise jugent ‘'inutile''. Ils ne peuvent se faire comprendre par n'importe qui, sauf par eux-mêmes», souligne-t-il. Intitulé : «Analphabètes trilingues : crise de la langue en Algérie», le télégramme en question reprend une discussion tenue lors d'un dîner (iftar) à la résidence de l'ambassadeur vers la fin du Ramadhan, en présence d'hommes d'affaires algériens. L'ambassadeur américain s'étonne notamment de ce qu'ils appellent le «collage» des langues. «Les diplomates qui viennent en Algérie après avoir été dans la région sont surpris de voir que les Algériens terminent rarement une phrase dans la même langue», rapporte-t-il. Cela est d'autant plus dangereux, à ses yeux, que cela pourrait permettre à «l'extrémisme de prendre racine». Pour remédier à cette situation, l'ambassadeur écrit à Washington que l'Algérie a besoin d'un «plan Marshall» – selon l'expression d'un représentant du ministère de l'Enseignement supérieur – pour la langue anglaise. Dans la mesure où le français fait indéniablement partie de l'identité algérienne, estime-t-il, l'Algérie a besoin d'une langue «neutre».