L'impuissance à résoudre la crise du logement et à réaliser un cadre urbain digne a une explication. Alors que les besoins sont gigantesques, Béjaïa est l'une des dernières wilayas dans la réalisation des logements bénéficiant des aides publiques. Le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, Noureddine Moussa, interpellé sur cette triste réalité, lors de sa visite mercredi à Béjaïa, n'a pas voulu admettre ce constat d'échec patent qu'enregistre la wilaya. Le ministre s'est toutefois dit «accepter les critiques de la presse». Les chiffres qui lui ont été exposés sur des tableaux dressés sur le site de Sidi Ali Lebhar, montrent, en effet, un mince bilan. En deux quinquennats, dans le chapitre de l'aide à l'accès au logement promotionnel aidé (LPA), «sur 13 714 unités inscrites, seules 8 585 sont achevées et 263 réceptionnées». Les 21 467 logements inscrits dans le plan quinquennal 2004-2009 ne sont pas encore réceptionnés en totalité. Deux ans après leur annonce, les chantiers de réalisation de 4092 unités ne sont même pas encore lancés. Le nouveau plan 2010-2014, qui promet 9500 aides pour l'acquisition de LPA, n'a pas encore été lancé. Ceci contraste avec la moyenne nationale telle qu'annoncée par le ministre : «70% des chantiers de réalisation des logements du plan 2010-1014 ont été lancés à travers l'Algérie». Dans cette formule, pour la moitié des 4000 logements LSP inscrits (au départ le ministère avait promis 6000 !!), on est encore au stade du lancement des avis d'appels d'offres (annoncés pour les prochains jours). Pour l'autre moitié du programme, les projets viennent à peine d'être confiés à des promoteurs publics, «les études étant toujours en cours». Principale critique qu'essuie le nouveau programme: Il ne prévoit qu'un faible quota de logements sociaux locatifs (LSL) dont ceux inscrits dans le cadre de la résorption de l'habitat précaire (RHP). Dans ce chapitre, le bilan n'en est pas moins maigre: «sur 19 150 logements inscrits, seuls 7015 sont achevés et aucun appartement n'a été réceptionné». Dans les autres formules, dont les logements réalisés dans le cadre du fonds national de péréquation des œuvres sociales (FNPOS), «sur 8 631 d'unités inscrites, seules 4 672 sont achevées». Mépris de la loi Autre grand problème auquel font face les souscripteurs au logement aidé : certains promoteurs refusent de fournir les documents de garantie prévus par la loi et les chantiers s'éternisent quand ils ne sont carrément pas abandonnés. Un exemple ? 80 souscripteurs aux logements LSP à Sidi Ali Lebhar, qui avaient payé un apport initial en 2007 (près d'un million de dinars), attendent désespérément leurs logements. Le chantier ne dépasse pas les 2% de réalisation. «Alors que la caisse nationale du logement (C.N.L) nous a accordés des décisions d'aide de l'Etat, aujourd'hui, quatre ans après, les contrats de vente sur plan (V.S.P) n'ont toujours pas été remis, le projet n'est même pas assuré et les travaux sont au stade de la plate forme non achevée», se plaint un des souscripteurs. On promet encore de réaliser une nouvelle ville de «9000 logements sur le plateau de Sidi-Boudraham.» Un site s'étalant sur 200 hectares, surplombant au Sud la ville de Béjaïa, appelé à accueillir des équipements publics dont le futur CHU. L'administration est-elle capable de construire une cité semblable à la coquette ancienne ville de Béjaïa? La tendance est au scepticisme. Au mieux, la future nouvelle ville sera une cité dortoir sans âme. Au pire, elle se fondera dans le décor déjà existant: un immense bidonville. Cette impuissance à résoudre la crise du logement et à réaliser un cadre urbain digne à Béjaïa a une explication: L'administration, lente et encombrée, l'est toujours. Inefficace, elle reste impuissante devant les demandes explosives des logements et d'un cadre de vie meilleur.